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HONORIUS II


mettre fin en se soumettant à une nouvelle élection. Le 21 déceinhre, devant les cardinaux réunis, il se dépouille des ornements pontificaux. « Les cardinaux, dit Boson, voyant son humilité et fort désireux pour l’avenir de ne point introduire dans l'Église romaine aucune innovation, acclamèrent Honorius, lui rendirent hommage, et lui donnèrent l’obédience accoutumée comme à leur pasteur et au pape universel. »

La politique d' Honorius II fut la continuation de telle de son prédécesseur Galliste II. Elle devait porter les plus heureux fruits ; dans ses relations avec l’Allemagne, Honorius jouira d’un triomphe pacifique fort rare durant toute la querelle du sacerdoce et de l’empire. Henri V meurt en 1125 ; le pape s’intéresse immédiatement à l'élection de son successeur. Deux légats partent pour Mayence, où ils se concerteront avec l’archevêque Adalhert et les principaux évêques d’Allemagne. Il s’agissait de faire prévaloir, dans la question de l’accession au trône, le principe de l'élection sur celui de l’hérédité ; il s’agissait surtout d'écarter ceux qui tenaient de trop près à cette dj’nastie heniicienne dont l'Église vient de souffrir si cruellement. Le choix des dignitaires ecclésiastiques se porta sur Lothaire de Supplimbourg, que l’on savait bien disposé en faveur de l'Église ; il fut accepté par un grand nombre des princes séculiers. Finalement I>othaire V fut reconnu par tous. Mais il dut, soit aussitôt avant son élection, soit peut-être seulement après, faire à l'Église une concession fort importante et qui amendait considérablement le concordat de Worms. <t L'Église aurait la liberté qu’elle avait toujours souhaitée, c’est-à-dire les élections (aux dignités ecclésiastiques) libres et non des élections extorquées par la crainte du roi, ni gênées comme autrefois par la présence du prince, ni restreintes par aucune demande de sa part ; l’empereur, de son côté, conférerait l’investiture par le scepti’e à celui qui aurait été élu librement et canoniqucnient consacré. » Narratio (le electione Lotharii in regem Romanorum.

Lothai.c alla plus loin encore dans la voie des concessions ; il semble bien qu’il envoya à Rome une délégation pour demander au pape Honorius de le confirmer dans sa dignité de roi des Romains. C’est du moins ce qu’indiquent les Annales de Disembtrg (près de Mayence). Si le fait est exact, il est caractéristique de la victoire remportée par le sacerdoce sur l’empire. Moins de cent ans auparavant, c'étaient les empereurs qui désignaient les papes, et le décret de Nicolas H, en 1059, reconnaissait encore au roi des Romains le droit de confirmer l'élection du successeur de Pierre. L’entente cordiale entre les deux pouvoirs persévéra durant tout le pontificat d’Honorius H. Loth-tire eut recours au pape dans sa lutte 'outre Conrad de Hohenstaufen, ((ui, après avoir pris en Allemagne le titre de roi des Momains. était descendu en Italie pour ceindre à Milan la couronne de fer. L’antiempereur avait trouvé appui dans le 'Icrgé rlu nord de la péninsule soit en Lombardie, Noit en Vénitie. Mais le pape demeura lidèleà Lothaire : le jour fie Pâques, 22 avril 1128, il lança l’excommunilation solennelle contre Conrad, son frère rrédéric i-t tous leurs adhérents. Le cardinal.Jean de Crémone tut chargé de déposer l’archevêque de.Milan, favorable à Conrad, et, quelque temps après, Honorius envoyait à Riivenne le cardinal Pierre, pour déposer en son nom les patriarches d'.Aquilée et de Venise, qui avaient pris parti pour Conrad, et qui continuaient d’ailleurs à reconnaître pour pape le fameux Maurice Bourdin, qu’Henri V avait jadis opposé il Gélase II.

F-^n retour des services rendus par lui à Lothaire, Honorius attendait de celui-ci aide et protection dans les

difflcultés que le pouvoir temporel du pape rencontrait en Italie. Tant qu’il ne s’agissait que de réduire à l’obéissance les barons féodaux de la Campanie, le pape s’en tirait encore. Mais l’affaire de la succession du duché de Fouille le jeta en des embarras extrêmes, pour lesquels il implora, vainement d’ailleurs, l’intervention de l’empereur. Abandonné par les seigneurs qu’il avait essayé de liguer contre les prétentions de Roger, comte de Sicile, le pape vit sa petite armée, décimée par les fièvres et la maladie, incapable de rien faire contre un ennemi qui sans cesse se dérobait. Il dut entrer en composition, investir Roger du comté de PouiUe ; sans le savoir, il préparait à son successeur les pires difficultés. L’antipape Anaclet II n’aura pas de plus ferme soutien que le nouveau roi des Deux-Siciles.

Les affaires temporelles ne furent pas le seul objet lies préoccupations d’Honorius H. Il eut à régler plusieurs différends d’ordre spirituel, soit avec les [irinces, soit avec les évêques. En Angleterre, il réussit, à force de négociations, à faire accepter au roi Henri I"^ l’envoi d’un légat ; en même temps, il tranchait le conflit séculaire entre York et Cantorbéry. L’archevêque d’York aurait droit de préséance sur son collègue, Jaflé, Regesta, n. 7226, mais l’archevêque de Cantorbéry devrait être considéré comme légat du pape pour l’Angleterre et l’Ecosse. Jaffé, n. 7284. En France, Honorius dut s’interposer dans la querelle qrii mit aux prises le roi Louis VI, d’une part, et, de l’autre, l'évêque de Paris, appuyé par son métropolitain l’archevêque de Sens et les autres évêques de la province. Pour des raisons qu’il est assez difiicile de déterminer, l'évêque de Paris avait encouru la disgrâce du roi et s'était vu <lépouiller de ses biens ; sa vie même, paraît-il, aurait été en danger. RéfuL’ié à Cîteaux, il avait réfiondu à ces mesures vexatoires en jetant l’interdit sur le domaine royal. Louis VI fut assez habile pour extorquer d’Honorius la levée de l’interdit. Saint Bernard, qui avait pris fait et cause pour les évêques, se plaignit amèrement dans plusieurs lettres au pape du funeste résultat qu’avait produit la condescendance pontificale. Epist., xL.y-L, P. L., t. CLxxxii.col. 149 sq. Signalons enfin l’envoi d’un légat en Ecosse, Jaffé, 11. 7204, et la protection accordée à un ovèque de Norvège, contre le roi Sigurd. Jaffé, n. 7224.

Honorius dut également imposer son autorité aux dignitaires ecclésiastiques tentés de la méconnaître. L'évêque de Verdun, Ilenri, une créature d’Henri V, avait essayé ; diverses reprises de se soustraire aux légitimes exigences de Calliste II et d’Honorius, qui le sommaient de eiur s’expliquer w Rome sur les nombreux griefs qui lui étaieiU imimt-cs. Honorius finit par en avoir raison. IMutôl que de se soumettre au jugement du légat, le cardinal Matthieu, évoque d’Albano, Henri préféra, sur le conseil amical de saint Bernard, donner sa démission en 1129. (L’affaire tout au long dans VHisloria brcvis episcoporum Virduncnsium. Monumenla Germanise hislorica. Sciiplorcs, t. x, p. 504 sq.) L’abbé de Cluny, Ponce, ne fut pas plus heureux. Ce personnage, plus politique que religieux, avait dû son élévation au rôle qu’il avait joué en 1119, lors du décès do (îélase II et de l'élection de Calliste II. Sous sa direction, l’abbaye ne tarda pas à se relâcher de l’idéal monastique ; les couvents voisins qui la reconnaissaient comme leur supérieure se détachèrent de son obédience. C'était le commencement de la déc^ndence de ces clunisiens qui avalent été durant un siècle le plus ferme appui de l'Église. Averti, le pape Calliste força Ponce à démissionner et lui imposa le pèlerinage en Terre Sainte. Pierre le Vénérable, qui succéda à Ponce, fit refleurir dans l’abbaye les vertus monastiques et