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IMMUNITÉS ECCLÉSIASTIQUES


clercs. — 1. Les privilèges précédents s’acquièrent aussi bien par l’entrée en religion que par la réception de la tonsure. Le canon 614 du Code déclare, en effet, que les religieux, même laïcs et novices, jouissent des privilèges des clercs dont il est question aux canons 119 et 123. Par religieux il faut entendre ceux qu" ont émis des vœux publics, même temporaires, can. 488, 1. Les novices participent aux privilèges, mais non pas les simples postulants. De plus les membres des sociétés religieuses sans vœux, même laïques, bien que n’étant pas admis, sauf disposition spéciale, aux privilèges des religieux, bénéficient des immunités cléricales, can. 680. D’après le canon 613, § 2, les moniales jouissent des privilèges de l’ordre d’hommes auxquels elles sont rattachées. Les moniales sont les religieuses à vœux solennels ou celles qui, bien qu’appartenant à un institut à vœux solennels, ont été autorisées dans certaines régions par le saint-siège à ne prononcer que des vœux simples, par exemple, en France, sauf le comté de Nice et la Savoie. Cf. canon 488. D’ailleurs, le canon 490 assimile les religieuses aux religieux. Pour quelques autres détails nous renvoyons à ce que nous avons dit plus haut à propos du privilège du canon : l’énumération, que nous avons faite en cet endroit, de ceux et de celles que protège ce privilège peut être appliquée à l’ensemble des immunités personnelles. Voir col. 1223. Ces divers canons du Code ne ront pas des innovations : ils ne font que confirmer une législation depuis longtemps en vigueur.

2. Un clerc ne peut pas renoncer à ses privilèges qui, bien que personnels, ne sont pas strictement individuels. L’Église, en effet, les a établis pour le bien général et l’honneur du clergé et non pas simplement à l’avantage des individus, can. 123. Les immunités sont perdues par les clercs et les religieux réduits à l’étal laïque, can. 213, § 2, 640-648, et par les clercs qui, ayant été déposés et ayant refusé de revenir à résipiscence après monition ont reçu de leur ordinaire défense ds porter l’habit ecclésiastique, can. 2304. Si ces peines sont remises ou que l’intéressé rentre soit dans la cléricature, soit dans l’état religieux, les immunités renaissent ipso facto, can. 123.

V. Immunités réelles et immunités locales. — Nous serons plus bref sur cette deuxième catégorie d’immunités que sur la première, parce qu’à vrai dire il n’en reste plus que des vestiges dans la législation ecclésiastique actuelle. Le Code de droit canonique n’y consacre même pas de titre ou de section à part, et le mot d’immunité locale ou réelle n’y est pas, à notre connaissance, prononcé une seule fois. Ce fait ne tient pas uniquement au malheur des temps, en certains cas l’immunité n’est plus rappelée par l’Église, parce que l’état des mœurs est tel qu’elle se trouve ordinairement respectée par la force même des choses ou par la sauvegarde de l’opinion. On ne songerait plus de nos jours, par exemple, à tenir une foire dans un édifice consacré au culte ; au moyen âge, certaines populations s’arrogeaient trop facilement cette licence.

L’immunité locale est celle qui est attachée aux églises et accessoirement aux cimetières ; l’immunité réelle protège la propriété ecclésiastique.

1 » L’immunité locale. — Elle se subdivise en deux immunités particulières : l’interdiction des actes profanes, le droit d’asile.

1. L’interdiction des actes pro/anes. — Les jugements séculiers sont prohibés dans les églises sous peine de nullité parla législation traditionnelle. Cette interdiction résulte du canon 5 « du titre xLix, De immunitate ecclesiarum du I. III « des Décrétâtes, où Lucius III (1181-1185) les défend quand ils entraînent une effusion de sang ou une peine corporelle, et du c. 2 du titre xxiii dn livre III » du Sexte (c’est un décret du

concile de Lyon tenu en 1274, sous Grégoire X), qui étend la prohibition à toute procédure civile conduite par des laïques et ajoute la clause de nullité. Les procès ecclésiastiques sont permis dans les églises bien qu’il convienne de les instruire ailleurs.

On ne doit pas faire de négoce dans les églises et les cimetières, même transitoirement. Cf. le c. Decei, 3 « du titre xxiii, t. III, in Sexto. La coutume presque générale autorise la vente des objets de piété, du moins si elle ne trouble pas les offices.

La prohibition des réunions publiques résulte encore du même chapitre Decei. L’usage et l’interprétation commune exceptent les assemblées qui ont quelque rapport avec la religion, par exemple, celles des associations charitables.

Les occupations profanes auxquelles on pourrait se livrer dans les églises sont d’ailleurs, d’une façon générale, un abus à faire cesser. C’est dans ce sens que le concile de Trente a interprété les fœda et profana coHoquia, dont parle le chapitre Decei : ab ecclesiis vero musicas eas, ubi, sive organo, sive cantu, lascivum aut impurum aliquid miscetur, item sœculares omnts aciiones, vana atqne adeo profana colloquia, deambulationes, strepitus, clamores, arceant (episcopi). Sess. XXII, Decretum de observandis in celebratione missæ. Les spectacles pieux (mais la S. C. Consistoriale a interdit les représentations cinématographiques dans les églises, le 10 décembre 1912, cf. Acta apostolicx scdis, 1912, p. 724), la collation des grades universitaires sont autorisés.

Enfin les églises ne doivent pas servir de gardemeubles aux laïques, sauf en cas de nécessité comme la guerre ou un incendie et alors uniquement tant que besoin est. Décrétâtes, I. III, tit. xlix, c. 2. C’est le canon 19 « du IV » concile de Latran de 1215. On exceptait de cette défense la sacristie et les chambres attenantes à l’église.

Ces diverses décisions s’expliquent par le fait qu’en beaucoup d’endroits l’église était le seul édifice public un peu vaste et que dans les enceintes resserrées des villes fortifiées elle constituait un lieu de passage presque inévitable.

Tout vol dans une église est-il un sacrilège ? Un texte du Décret le dit. Causa XVII, q. iv, c. 21. Il n’y aurait sacrilège, semble-t-il, que s’il s’agissait d’un objet sacré.

On considérait comme protégés par ces immunités toutes les églises et tous les oratoires publics, même avant leur bénédiction, en vertu du c. 9 du lit. xi.ix du livre III des Décrétales (Grégoire IX à l’évêque d’Astorga en 1233) qui invoque, dans ce cas le simple fait de la destination au culte antérieur à la consécration. On assimilait à ces édifices les chapelles des séminaires, palais épiscopaux et communautés, même non bénites, qui, étant réservées au culte divin par l’autorité épiscopale, sont des lieux sacrés et rentrent dans les précisions de la règle 51 du droit au Sexle : Semct Dca dicotum non est ad usus humanos iilterius trun.’tfercndum. Cf. Décrétales, t. IV, c. 3, d’Urbain III (1185-1187). II n’en était pas de môme des oratoires domestiques au sens strict (le (^ode défend même de les bénir. c ; f. can. 1 196). Les cimetières enfin jouissaient des immunités des églises en ce qui concerne le négoce et les procès séculiers. Décrétales, t. III, tit. XLix, c.5et c. Decet du Sexte. Le canon l" du titre xlix du 1. III des Décrétales défend même les procès séculiers dans les locaux attenant aux église.s. Sur l’ensemble de cette discipline, cf. S. Many, De locis sacris, Paris, 1904, p. 87-93.

Le Code de droit canon est assez bref sur ce sujet. (Cependant les principes qu’il pose permettent de l’interpréter en ayant recours aux précisions du droit antérieur, conformément à la règle générale du