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encore que cela soil exprime yivt la traduction grecque. On avait voulu seulement insister sur l’absence en Jésus des tendances déréglées, montrer que sa volonté était entièrement exempte de péché.

Cette anecdote, dont l’exactitude est infiniment vraisemblable, reparaît dans l’ouvrage le plus important de Maxime, dans le compte rendu de ce fameux dialogue du saint abbé avec Pyrrhus (le patriarche déposé de Constanlinople), qui est la pièce capitale de la controverse contre le monothéli^me. Mansi, t. x, col. 739 ; P. (i., t xci, col. 328 sq. Ayant épuisé les arguments theologiques pour défendre son point de vue, Pyrrhus invoque l’enseignement d’Honorius dans la fameuse lettre à Sergius. « Mais, lui répond Maxime, (luel est de cette lettre l’interprète le plus digne de loi, ou bien celui qui l’a composée au nom d’Honorius et qui illumine aujourd’hui encore tout l’Occident de sa piété et de sa vertu, ou bien ceux qui,

i Conslantinople, en parlent d’après leurs désirs"? —

Éxidemment, dit Pyrrhus, celui qui a composé la leltre. — Eh bien, reprend Maxime, cet homme, écrivant à l’empereur Constantin, au nom du pape Jean, déclare ceci : Nous parlions d’une seule volonté dans le Seigneur, non point d’une volonté unique pour la divinité et l’hunianité, mais d’une volonté unique de l’humanité. » Pyrrhus convient donc que son prédécesseur a eu tort, en toute bonne foi d’ailleurs, de s’attacher trop exclusivement au mot, â-XojTtfpov -fj Xé?£[ r.oozi’j fi^/Mz, ToOto iSiçato.

Telle était la manière dont on défendait, quelques années après la mort d’Honorius, la mémoire de ce pontife. Nous avons déjà dit ce que nous pensions de l'échappatoire imaginée par Jean IV. Pour avoir été reprise par d’illustres théologiens, en tête descpæls il faut citer Baronius et Fîellarmin, elle ne laisse pas quc de proposer une solation simpliste du problème que crée la célèbre phrase : Cesl pourquoi nous confessons une seule volonté.

J’espère avoir montré, dans la paraphrase du texte d’Honorius, que la pensée du pape vaut mieux que les formules par lesquelles il la traduit, que ces formules elles-mêmes peuvent à la grande rigueur supporter une interprétation qui ne s'écarte pas trop de l’orthodoxie officielle. Mais de là à conclure, comme l’ont fait nombre de théologiens, à l’orthodoxie parlaite des deux lettres d’Honorius, il y a, ce semble, ((uelque distance. Encore une fois, la pensée du pape se meut très certainement sur le terrain des formules chalcédoniennes ; l’existence des deux natures, qui subsistent l’une à côté de l’autre sans se confondre, sans que, tout spécialement, la nature divine absorbe l’humanité, la convertisse en quelque chose qui n’ait plus rien d’humain (k-.^AT.-.'-K, àjj-'yj : '.> ;), est le postulat fondamental d’où procèdent les développements du pape. Mais il a été comme hypnotisé par l’affirmation de l’unité de personne, sur laquelle revenaient sans cesse les monophysites déclares ou inconscients. A chafque instant, il semble devoir tirer de ce principe la proposition nettement héréticpie : volonté uniquement affaire de personne. Or (Dieu soit louél), au moment même où il paraît employer les termes les plus énergiques, avec une sorte de prudence instinctive il évite l’expression damnable. Ai Heu des termes abstraits de personne et de nature, il emploie les termes concrets : -' un seul Seigneur JésusChrist, le seul et même Verbe incarné », qui donnent à SCS développements les plus aventureux une allure correcte.

Voilà pour la partie proprement doctrinale de la lettre ; quant aux prescriptions d’ordre disciplinaire qui constituent la seconde partie, on peut dire qu’il s’y Irouve également bien des choses reerettables. lin denx mots, Monorius prescrit le silence aux deux

partis, comme si les deux partis, représentant l’un et l’autre la doctrine catholique, n’eussent différé que sur des manières de l’expliquer. Or, l'événement l’a prouvé, l’un des partis, celui dcCyrusd’Alexandrie, évoluait à coup sûr vers l’hérésie ; l’autre représentait au mieux la tendance catholique. « Qu’eussent pensé les théologiens du xvre siècle, liit fort justement Bossuet, si le pape Léon X avait proscrit simultanément à l'époque de Luther les termes de transsubstantiation et d’impanation ? » IMcttre sur le même pied le terme 'jji’j jvsGysfa'., qui représente la plus pure doctrine elialcédonienne, et l’expression [AÎa svEoyîia, qui, juise en soi et sans correctif, est l’expression concrète du monophysisme, c'était à coup sûr une maladresse, sinon une erreur. Il n’y eut pas, de la part du pape, erreur doctrinale, en ce sens qu’il réprouvait l’expression Suo svspysi’ai, pour autant que certains yvoulaient trouver une atteinte à l’unité de la personne (liine ; mais quelle inconséquence et ciuelle légèreté ! Condamner en même temps les deux formules, c'était involontairement favoriser l’hérésie ; avec quelle justesse le VI* concile aura-t-il le droit de faire ce reproche à Honoriusl

Mais ce n’est pas tout, et le document pontifical révèle à un examen plus approfondi un défaut plus grave encore. Il ne rectifie pas les fausses doctrines plus ou moins latentes dans la lettre, peut-être dans la conscience, de Sergius., J’ai dit, au début, que Sergius était vraisemblablement de bonne foi eu soumettant à la plus haute autorité de l'Église la question litigieuse qui troublait l’Orient. Comme de juste, il a présenté les choses sous le jour qui lui était le plus favorable, il a donné à l’expression de sa doctrine le tour le plus avantageux, il en a masqué les insuffisances, s’est bien gardé de mettre en relief les dangers qu’elle pouvait faire courir à l’orthodoxie. Il était là dans son rôle. Parler à ce propos de l’astuce byzantine me semble un moyen imaginé pour déplacer des responsabilités. C'était au pape, en définitive, de s’entourer, avant de répondre à ce factum doctrinal, de tous les conseils nécessaires, de percer à jour l’astuce du Byzantin, si astuce il y avait, de remettre dans la voie droite une intelligence inquiète et une conscience hésitante, au cas, plus vraisemblable, où Sergius agissait en toute bonne foi. Le pape ne l’a pas fait. Soit manque de sagacité, soit <lésir de maintenir à toute lorec les bonnes relations de Fîome avec le basileus, il a approuvé purement l’I simplement l’attitude de Sergius. Il me semble donc bien dilTu-ile de vonscrirc au jugement que, après Baronius. tant de théologiens ont porte sur les deux lettres d’Honorius ; Ilis quidem ml nuu/is caIholicum dici pnlnissc, nil mnijis pium oc sanctuin, iiH dvniqve Ilis temporibus ad pncein in Ecclesia consiTiHindom ntiliiis rxroqiinri rideri potnit. Annales. Comme le fait très bien rcmarquer Combéfij, mieux valait la guerre qu’une semblable [laix. Hisloria nionolhclilanim, p. 18.S.

l’n dernier mot sur les deux lettres d’Honorius. Ont-elles le caractère d’un document ci cathedra ? C’est un de<))oints sur lesquels ont le jilns vivement discuté autrefois partisans et adversaires de l’infaillibilité personnelle du souverain pontife. Les derniers voulaient à toute force reconnaître dans les deux lettres un document r.r calhedrn ; on en oit aisément la raison. Non moins bien se découvre la raison pour laquelle les ultranioidnins voulaient faire des deux lettres d’Honr/rius de-- documents strictement privés. Si elles étaient telles, il n’y avait même pas à s’attarder à discuter leur contenu. Il ne saurait être ciuestion de dépouiller ici toute la littérature tie ce point particulier, .le m’arrêterai seulement à la formule la plus récente qui ail été donnée pour résoudre le pio-