Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.1.djvu/569

Cette page n’a pas encore été corrigée

1123

IMMACULEE CONCEPTION

1124

(le docteurs appartenant à des ordres religieux, 14 cisterciens, 72 dominicains, 32 franciscains, 10 augustins, 2 carmes. A quoi s’ajoutent des textes scripturaires et six raisons théologiques qui ne présentent rien de nouveau, (^ela fait, Bandelli développe, c. xxxiii-XXXIX, cette seconde conclusion : « Dire que la bienheureuse Vierge n’a pas été conçue dans le péché originel, c’est avancer une assertion non conforme à la piété, non est piiim : » mais, au cours de la discussion, la formule de négative devient positive : est impium. A l’opposé, une troisième conclusion, c. xi, : " L’opinion suivant laquelle la bienheureuse ^’ierge a contracté le péché originel dans sa conception, est très conforme à la saine piété, maximæ congruil fidei pielati. » Enfin trois conséquences pratiques étaient tirées : 1° « Croire ou affirmer obstinément, perlinaciler, que la bienheureuse Vierge n’a pas été conçue dans le péché originel est chose illicite, non est licitum. » 2° « Prêcher d’une façon catégorique, asscrtive, que la bienheureuse Vierge a été exempte du péché originel dans sa conception, est chose illicite, non est licitum. » 3° « Assister aux sermons où l’on prêche que la bienheureuse Vierge n’a pas été conçue dans le péché originel, est chose dangereuse, periculosum est. »

Dans la 11’= partie du livre, Bandelli réfutait les arguments que les défenseurs du privilège avaient apportés à la conférence de Ferrare. Deux de ses réponses doivent être signalées. On avait fait appel à la fête de la conception, célébrée par l’Église ; Bandelli soutient qu’il s’agit de la conception spirituelle, de conceptione secundum spiritum, qua fuit conccpla Dec : en d’autres termes, de la sanctification de Marie, distincte et séparée de la conception proprement dite par un intervalle de temps très court et pour ainsi dire imperceptible, modica et quasi imperceptibili morula. On avait allégué les indulgences accordées par le pape à ceux qui réciteraient l’office composé par Léonard de Nogarole ; Bandelli fait la même réponse, en l’accompagnant de cette réflexion hardie : « Si toutefois le seigneur pape a vu cet office, ce que beaucoup contestent, à cause detantdeclioses futiles qu’on y dit, propter mulla verba nuçjaloria qua ; in illo conlinentur. »

Ce n’est pas le lieu de soumettre au creuset de la critique les deux cent soixante témoignages allégués dans cet ouvrage. Ils se ramènent à deux catégories générales, suivant qu’ils sont empruntés aux Livres saints et aux Pères, ou bien aux théologiens scolastiques à partir de saint Anselme. Beaucoup des premiers se réduisent à des affirmations générales sur l’universalité de la rédemption et du péché originel ou sur la connexion entre ce dernier et la concupiscence inhérente à l’acte générateur dans l’ordre actuel. (>cs affirmations prouvent bien que, d’après les Pères, Marie tombait de droit sous la loi commune, mais elles restent en dehors du point précis de la controverse : une préservation de fait, en vertu d’une dérogation spéciale et privilégiée. Sans parler de la question d’authenticité ou d’intégrité ou d’autorité réelle, qui se pose en certains cas, les témoignages des docteurs scolastiques, défavorables à la pieuse croyance, ne tranchaient pas pareux-mêmes le débat, puisqu’à ces témoignages on pouvait opposer des témoignages contraires, de plus en plus nomlireux, et qu’en outre, d’autres éléments de solution intervenaient en ligne de compte, suivant l’idée contenue dans cette remarque humoristique du P. Déodat Marie : « Bandelh, en 1481, citait 260 docteurs très illustres ; les franciscains se défendaient avec l’autorité de 360 livres liturgiques, missels, bréviaires, livres d’heures, calendriers. » Un tournoi theolugique, I-e Havre, 1907, p. 83.

Un autre point de vue était à considérer : la façon dont l’auteur du livre avait traité la pieuse croyance ou ses défenseurs, et l’interprétation qu’il avait donnée

de la constitution Cum præexcelsa. Sixte IV ne goûta ni l’une ni l’autre ; dans une seconde bulle émise en 1482, Grave nimis, il déclara fausses et erronées, jalsas et erroneas ac a oerilUe aliénas, les assertions de ceux qui prétendaient appliquer à la seule conception spirituelle ou sanctification de la glorieuse’ierge la fêle célébrée par l’Église romaine, ou accuser d’hérésie les partisans de la pieuse croyance. Ceux qui oseraient proférer ces assertions seraient, par le fait mêmr, excommuniés. L’année suivante, le 4 septembre, nouvelle bulle, ou plutôt reprise de la précédente, avec cette particularité que la réprobation et les censures ecclésiastiques atteignent aussi quiconque affirmerait qu’il y a péché, soit à célébrer l’office de la Conception, soit à écouter les sermons où l’on prêche le glorieux privilège. C’est sous cette dernière forme que la constitution Grave nimis a été insérée dans le Corpus juris. Extravagantes communes, loc. cit., c. 2.

Cet acte clôt la première étape dans la série des actes officiels du saint-siège en faveur de la pieusecroyance. Un double résultat était acquis : maintenant, la fête de la Conception était non seulement approuvée, mais formellement acceptée par l’Église romaine ; en outre, le saint-siège prenait la défense de la pieuse croyance, en ce sens qu’il ne permettait plus de faire intervenir, à son sujet, les mots d’hérésie ni de péché. Un siècle et demi plus tard, le 31 août 1617, le cardinal Bellarmin émettra dans un vote célèbre cette proposition : Non poiesi de finir i sententiam communiorem (celle qui soutient le privilège) esse hæreticam ; c’est à la constitution de Sixte l qu’il se référera : Probedur, quia Ecclesiu seu sedes apostolica definivit contrarium. Sixtus enim IV in extravaganti grave sjmiîj expresse définit eos qui dicunt hærelicum esse dicere beatam Virginem sine peccato originali esse conceptam. falsiim dicere et excommunicat illos excommunicationc reservata summo pontifici. Le Bachelet, Ven. Servi Dei Roberti card. Bellarmini de immacukda beatæ virginis Mariæ votum, Paris, 1905, p. 29.

Littérature de l’époque : A. de Roskovâny, op. cit., t. i, p. 115 sq., 262 sq., 287 ; Pierre de Al va, ouvrages cités ; Mgr Malou, op. cit., t. ii, p. 146 sq. ; H. Holzapfel, Billiutheca /ranciscana, auteurs franciscains du xv siècle.

Documents liturgiques : G. Dreves, Analecia hymnica, passim ; A. Noyon, dossier ms. ; Passaglia, op. cit., t. ii ;. n. 1687 sq. ; Mgr Malou, op. c17., t.i, p. 142 sq.

Constitutions si.xtines : Roskovâny, op. f17., t.i, p. 122sq. ; Plazza, op. cit., p. 229 sq.

11. DE SIXTE IV A ALEXANDRE VU (1485-1687) : GÉNÉRALISATION DE LA CROYANCE ET DÉTERMINA-TION DE L’OBJET DE LA FÊTE. — Les deux choses sont dans un rapport d’étroite dépendance, car c’est dans la mesure même où la croyance à l’immaculée conception de Marie se généralise, que la fête prend de plus en plus nettement un sens immaculiste ; sens consacré, à la fin de cette période, par la bulle Sollicitudo, d’Alexandre VIL L’opposition persiste de la part d’une minorité qui va toujours en diminuant. Cette circonstance impose aux autres la nécessite de continuer l’ancienne lutte, et même de défendre les actes pontificaux qui favorisent la pieuse croyance ; parallèlement, un travail théologique se poursuit, ayant pour objet divers points relatifs à l’explication du glorieux privilège : degré de certitude qu’on peut attribuer à la pieuse croyance, perfection et moment précis de la sanctification première de la bienheureuse S’ierge, nature de la dette du péché à laquelle elle fui soumise.

1 » Apres les constitutions sixtines : opposition et défense. — L’énergique intervention de Sixte IN" contint les ardeurs de ceux qui attaquaient le privilège mariai, mais seulement pour quelque temps. Dès 1494, parut à’enise un écrit composé par le dominicain