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IMMACULEE CONCEPTION


fication. Ainsi procède Hugues de Saint-Cher, créé cardinal en 1244 ; après avoir dit que la bienheureuse Vierge contracta le péché originel et que, par conséquent, on ne doit pas fêter sa conception : « Ceux qui la célèbrent, conclut-il, doivent avoir en vue la sanctification dont elle fut gratifiée dans le sein de sa mère : qui célébrant, debent habcre respeclum ad sanctificationem eiiis, qua sanctificala est in utero matris suie. » Postula super Eccl., VII, d’après Pierre de Alva, Radii solis, col. 1126. Un autre dominicain, Etienne de Bourbon, voir col. 1034, développe cette idée. A la conception charnelle de la Vierge, qui s’est faite dans le péché, il oppose « sa conception spirituelle, celle qui eut lieu au sein maternel quand, quarante jours environ après la première, son âme préalablement unie au corps organisé fut sanctifiée. » Puis, à l’adresse de ceux qui célébraient la conception : » C’est, ajout e-t-il, à cette conception secrète qu’ils doivent ramener leur fête, ad illam secretam conceptionem debent festum suum retorqære, c’est-à-dire au moment où, par l’infusion de la grâce dans l’âme de Marie vivant au sein de sa mère, le Très-Haut sanctifia sa demeure, la consacra comme temple du Saint-Esprit et la purifia du péché originel. » Le docteur angélique n’interprète pas autrement la fête célél)rée de son temps. QuodL, VI, a. 7. Quand il déclare ailleurs qu’il n’y a pas lieu de réprouver totalement cette coutume, il revient à la même déclaration : il faut qu’en célébrant la fête, on ait en vue, non pas la conception elle-même, mais la sanctification de la Vierge, vénérée au jour de sa conception dans l’ignorance où nous sommes du moment précis où la sanctification s’est opérée : non tanien pcr hoc quod festum conceplionis celebratur, datur intelligi quod in sua conceptionc fuerit sancta ; sed quia quo tempore sanctiâcata fuerit ignoratur, celebratur festum sanctificationis cjus pot lus quam conceptionis, in die conccplionis ipsius. Sum. theoL, HP, q. xxvii, a. 2, ad 311>ii.

Si les trois théologiens dominicains s’accordaient à considérer comme tolérable une fêle de la sanctification de Marie, ils n’allaient pas jusqu’à l’admettre eux-mêmes. D’autres trouvèrent qu’il y avait là un motif suffisant pour établir une solennité distincte de celle de la Nativité et ils l’admirent. Dans plusieurs documents liturgiques de l’époque on rencontre des exiiressions qui ont cette si ; ^nification et qui ne la dépassent pas. Exemple, dans une hymne panormilaine sur la bienheureuse Vierj^e, cette.’)<’strophe :

Quae est ista

Qua ; sic iirogrcditiir’:

Mira siirjiit.

Mire conficitur,

L’t aurora ?

In <)l)scuris noctis

concipitur ;

Sanctitatis

sed ilie torgitur

sine mora ?

F. Dicves, Analecta hymnica, t. l, p. 117. Prosarium /ns. Panormitanum sœc. Xlll… Svquentia de BV.M. quod ( ?) fecit fr. Bon. Joluinnes de Missina ordinis prædictitnrum.

De même, dans une poésie De deliciis Virginis gloriofi’r, par.Jean Peckam, primai de (^uitorbéry († 1202), cette 2° strophe :

Salve Uco consecrata,

Prius<)iiani iiuic niundo nnla.

Intra matris utcrum…

Jbid., t. L, p..’)08.

L’introduction d’une fêle de la sanctification de Marie, par opposition à la fête de la conception proprement dite, aura pour conséquenre d’introduire dans la terminologie une nouvelle équivoque, l-, n sInIc théoloui<luc, le mol de sanrlilication s’apiilique pro))reiiient a l’ànie, bien qu’il puisse aussi conenir au corps par extension et analogie. A|)]>liqué < l’ànie, il exprime, <ie soi, un simjile fait : l’union a Dieu par

la grâce sanctifiante, et ne précise rien de l’époque ou l’union se produit. Aussi n’y a-t-il pas d’opposition entre les termes de conception et de sanctification, pris absolument ; l’opposition intervient quand on suppose entre les deux un rapport d’antériorité et de postériorité stricte, chronologique, ou quand on transforme l’idée de simple sanctification en celle de sanctification purificatrice, sous-entendant par le fait même un sujet déjà existant qui, n’étant pas pur et saint, a besoin de le devenir. Dés lors, il pourra se faire qu’il y ait fête de la sanctification de la mère de Dieu dans des sens divers : dans le sens immaculiste, pour ceux qui considéreraient la conception et la sanctification comme simultanées ; dans un sens opposé, pour ceux qui considéreraient la conception comme soumise à la loi du péché originel et la sanctification comme purifiant du même péché ; dans un sens moyen, abstraction faite du moment prccis où la sanctification eut lieu, pour ceux qui trouveraient un motif suffisant de culte spécial dans la sanctilication considérée comme antérieure à la naissance, mais sans se prononcer absolument ni pour ni contre l’immaculée conception. Pour ceux qui tiendront résolument le second sens, comme la plupart des théologiens dominicains aux siècles suivants, l’adoption d’une fête de la sanctification de Marie sera plutôt un obstacle à la reconnaissance du privilège, parce qu’elle en contiendra implicitement la négation. Pour d’autres, au contraire, l’acceptation de cette fête ne sera qu’un acheminement prochain vers le terme.

Ce dernier cas a eu son application dans l’ordre des frères mineurs. De ce point de vue, l’attitude de saint Bonaventure à l’égard de la fête de la Conception, In. IV Sent., . 111, dist. III, part. I, a. 1, q. i, adl’nn, mérite d’être remarquée ; c’est celle d’un homme qui, hésite entre deux partis. Il n’ose pas approuver complètement : la fête n’a pas l’appui des Pères, saint Bernard l’a même désapprouvée ; elle n’est pas pleinement confoniic aux principe « ( ui rétiissent l’Église universelle dans le culte rendu aux saints, car toutes les fêtes qui les concernent supposent la sainteté en celui qu’on vénère, sainteté qui ne peut se trouver dans la Vierge avant l’infusion de l’ànie. D’un autre côté, le saint docteur n’ose i as désapprouver purement et simplement. La révélation céleste dont les partisans de la fête se réclament, ne fait pas loi, il est vrai : mais comme elle n’énonce rien de contraire à l’orthodoxie, on n’est pas lorcé de la nier. Il peut se faire aussi que la solennité se rapporle moins au jour de la conccptioii qu’; i celui de la sanctification, et comme ce dernier est iiuertain, il n’est pas déraisoiiiial<le de fêter la sanctilicatiun au jour de la coiiccplion. « Quoi qu’il en soit, les âmes pieuses peuvent se réjouir de ce qui a été.’ommencé al rs <, )ui pourrait apiirciuirc que celle dont le salut uu monde est sorti, la bienheureuse Vierjic, a été conçue, sans en rendre à Dieu de solennelles actions de grâces et sans se réjouir dans le Sauvcurv > Si un lils de roi naissail avec une intlriniié UmiU il devrait être délivré plus tard, si, par exeiii ; >le il naissait boiteux, ne laudrait-il lias plutùt se rejouir de sa naissance que de némir.sur son mal ?’De nièiiie, si quelqu’un fête.Mar.c au jour de sa coiue li. ii, ayant (>lulôt en vue sa future sanctilication que sa coni’cplion présente, il ne semble pas ré)iréheiisi le > El le docteur séra]>liiquc s’en tient lii, sans v<iu oir ni ai)prouver ni désa)ipr(Jiier posilivciiiein ; ci ajoute pourtant : " Si quelqu’un.élèljrc cette suiciniili, iii.n par amour de la nouveauté, mais par u.i rcci seminicnl de dévotion envers la ierne, persuade q ^ ii ne fait rien de contraire ii ce qui peut se irer ci la sainte Écriture par voir tic conscquence. j’esm, c et