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HONORAIRES DE MESSES

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porels de ceux à qui l’on confère des biens spirituels, approuve l’application de la messe en faveur de personnes individuelles et commande même aux pasteurs d'âmes de l’appliquer ainsi à leurs ouailles, comme il est formellement exprimé par le concile de Trente, sess. XXIII, c. i.Derc/o/nî., et par Benoît XIV, dans sa constitution Cuin sempcr oblatas, § 2.

En effet, ce qui est nécessaire pour l’administration d’un bien spirituel, n’est pas le prix matériel de ce bien, non estimable à prix d’argent. A ce sujet. De Lugo, De sacramento eucharisiiæ, disp. XXI, n. 2, fait une comparaison qui met cette vérité en lumière. Supposons, dit-il, qu’un peintre ne veuille pas vendre ses œuvres, mais que, mù par un sentiment de piété, il s’engage, même par vœu, à décorer gratuitement une église. Il ne manquerait pas à son vœu, s"il demandait à cette église de lui fournir les couleurs, les toiles et tout ce qui serait nécessaire ; ou s’il demandait à cette église les sommes d’argent pour acquérir tous ces objets. Il pourrait dire encore qu’il peint gratuitement. Bien plus, si, pour accomplir parfaitement ce travail, il avait besoin d’une nourriture spéciale, il pourrait, même en la demaiidant, dire encore qu’il peint gratuitement.

Supposons également qu’un saint ait reçu de Dieu un don surnaturel pour guérir certains genres de maladie, et qu’il veuille donner gratuitement ce qu’il a gratuitement reçu : supposons qu’il soit appelé par un prince, dans ce but, comme saint François de Paule fut appelé par le roi Louis XI. Demanderait-il les sommes nécessaires pour faire le voyage, et, durant son séjour dans le palais du prince, serait-il nourri aux frais de celui-ci, il pourrait dire encore qu’il le guérit gratuitement, car ces sommes ne seraient pas le pri.x de la guérison, mais seulement le prix de ce qui est nécessaire pour que le thaumaturge puisse exercer son ministère bienfaisant.

On doit raisonner d’une manière analogue pour l’application spéciale du sacrifice de la messe. Pour que cette application gratuite puisse être faite, la première condition est que le prêtre puisse vivre. L’offrande pour l’entretien du prêtre n’est pas le prix du bien spirituel que le prêtre donne gratuitement ; mais seulement le prix de ce cpii est nécessaire pour que ce bien spirituel, non estimable à prix d’argent, puisse être gratuitement donné. Celui qui reçoit ce bien spirituel, et qui, pour l’avoir, a promis quelque chose pourl’entretien du prêtre, est obligé en justice à donner ce qu’il a promis pour cet entretien ; comme le prêtre, de son côté, est obligé en justice à donner ce bien spirituel, quand il l’a promis à celui qui a voulu coopérer en partie à son entretien. Voir Le canonisle contemporain, 1893, p. 73 ; Gaspard, Traclaliix canonicus de sanctissima eucharistia, c. iv, sect. ii, a. 2, § 2, n. 466, 538, t. I, p. 329, 391 sq. ; Manv. Pricleclioncs de missa, p. 83-90.

4. Peut-on accuser de simonie le prêtre qui célèbre parce qu’il a un honoraire, et qui ne célébrerait pas s’il n’en avait iioint ? Assurément la conduite de ce Iirêtre n’est pas digne d'éloges ; mais on ne jieut aflirmer qu’il ail commis le crime de simonie, à moins que réellement il ne considère l’honoraire comme le prix du sacrifice lui-même. Sans doute, l’honoraire est l)our lui un motif de secouer sa nonchalance et d'être moins néglinent ; mais ce prêtre n'équipare pas la messe à une pièce de monnaie.

A cette solution n’est pas opposée la condamnation de la 4('}' proposition réprouvée par le pape Innocent XI, et fjui est ainsi conçue : Darr temporale prn apirilunli. non est simnnia… rliamsi temporale sil principale motivum dandi spirituale. imo eliam sit finis ip.iiti.1 rei spirilualis. sic ut illud pliiris stitimeiur qiiam res spirilualis. Dans cette propo sition, en effet, les mots principale motivum sont synonymes de prctium rei spiritualis, comme l’explique saint Alphonse, Theolugia moralis, I. III, De præceptis decalogi et Ecclesiæ, t. I, c. ii, dub. ii, a. 1, n. 54, 4 in-4<>, Rome, 1905-1912, édit. Gaudé, t. i, p. 401 ; tandis que, dans le cas proposé, l’honoraire est le prix non du bien spirituel conféré par l’application de la messe, mais le prix du soutien du prêtre. Gury-Ballerini, Compendium iheologise moralis, Tractatus de eucharistia, part. II, c. iii, a. 3, n. 370, q. VII, 2 in-8°, Rome, 1882, t. ii, p. 253 ; Lehmkuhl, Theologia moralis, part. II, I. I, tr. IV, sect. ii, De sanctissima eucliaristia ut est sacriftcium, c. ii, § 3, n. 198, ad 5°'", 2 in-S », Fribourg-en-Brisgau, 1893, t. II, p. 146 ; Gasparri, Tractatus canonicus de sanctissima eucftaristia, c. iv, n. 544, t. i, p. 395.

6 Fondation de messes à perpétuité. — Au ixe siècle, la coutume des honoraires de messes était déjà très répandue. Rien plus, on ne se contentait pas de faire dire des messes, de son vivant : on voulait, après la mort, en assurer la célébration à perpétuité. Les capitulaires de Charlemagne nous ont transmis le formulaire dont on se servait pour les fondations de ce genre, t. VI, c. cclxxxv. Cet usage ne tut pas moins en vigueur durant les siècles suivants. Vila S. Pelri Damiani per Joannem monachum ejus discipulum, c. II, P. L., t. cxLiv, col. 117 ; Baronius, Annales ecclesiastici, 12 in-fol., Rome, 1593-1007, an. 1054, t. xi, p. 230 ; Decretum Gratiani, part. III. De consecrat., dist. I, c. 53, Su//(t' ! 7 ; concile d’York (1194), can. 3, Mansi, t. xxii, col. 842 ; concile de Paris (1212), can. 5, n. 12, Mansi, t. xxiii, col. 822 ; concile de Wurzbourg (1287), Mansi, t. xxiv, col. 943 ; concile de Palence, en Espagne (1322). Mansi, t. xxiv, col. 704 ; concile de Tolède (1324), can. 67, ; Mansi, t. xxv, col. 733, 734 ; concile de Malines (1570), tit.xiv, De decanis pastoribus, c. 12 ; Bail, Sumnia conciliorum omnium, 2 in-fol., Paris, 1672, t. ii, p. 717, col. 1.

Fixation du taux.

Plusieurs auraient souhaité

que l’honoraire de chaque messe fût, en général, suffisant pour l’entretien quotidien du prêtre chargé de la dire. Nous trouvons un exemple de ce désir dans le canon 23 du concile tenu à Avignon en 1594 : Omnes ftortamur qui missas celebrare jaciunt, ut saccrdotibustanlanheleemoii nie nomine, impen ^anlquantum pro l’ictu décent i et lioncslo illias sufflcial..F.quum est enim ut, juxia opostoli sententiam, qui allari servit, de allari vivat. Cf. Thomassin, Ancienne et nouvelle discipline de l’f-'glise, part IV, t. III, c. vi, n. 5, t. v, p. 475.

Les anciens cérémoniaux ai)pelaient. pour ce motif, l’honoraire de messe le prcsbiilcrium. L’emploi de ce terme, pris en ce sens, s’est conservé en divers endroits jusqu'à nos jours, en particulier dans la basilique vaticane do Saint-Pierre. Quand le pape y a chanté la messe iiontificale, soit à l’occasion d’une canonisation, soit pour quelque fête solennelle, le cardinalarchiprêtrc de la basilique, accompagné de deux chanoines préposés à la sacristie, s’approche du souverain pontife, et lui offre une bourse contenant vingt-cinq pièces d’argent, en lui disant ces paroles : Beatissime Pater, capitulum et canonici huius sacrosanctæ basilicx sanctilali veslrie consuetum oflerunl presbijterium pro missa hene cantata. Cf. Benoît XIV, De servorum Dei beatifîcatione et bcatorum canonizalione, t. I, c. xxxvi, § 10, n. 26, 16 in-8 », Naples, 17731775. t. II, p. 145 sq.

III. A QUI APPARTIENT-IL UE FIXER LE TAUX DES

HONORAIRES DE MESSES ?^ 1° A partir du xviie siècle, les décrets des Congrégations romaines se multiplient, au sujet de la discipline plus sévère qui tend à s'établir par rapport aux honoraires de messes. Signalons en parliculier les décrets de la S. C. du Concile du