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IMAGES (CULTE DES)


une injure à celui que l’image représente, et il en sera de même de l’honneur ; car l’image, comme le symbole, est essentiellement relative.

4. Objections et réponses.

a) Plusieurs de ces objections ont pour but de prouver que le culte des images est une idolâtrie. Car c’est la grande accusation de tous les iconomaques. Ils l’étayent tout d’abord sur l’Écriture.

« Ils prétendent, dit Bossuet, que s’incliner et fléchir

le genou devant une image, quelle qu’elle soit, fût-ce celle de Jésus-Christ, et pour quelque motif que ce soit, c’est tomber dans une erreur capitale, puisque c’est contrevenir à un commandement du Décalogue, et encore du plus essentiel, c’est-à-dire à celui qui règle le culte de Dieu. » Cf. Deut., v, 6-9. Cette défense est confirmée par la destruction du serpent d’airain, louée par l’Écriture. IV Reg., xvni, 3-4. Et ils précisent leur objection en disant que les paroles d’un commandement doivent être prises simplement et dans leur sens littéral. — Mais précisément, quel est le sens littéral ? Si le commandement divin, pris à la lettre, défendait tout culte des images, il faudrait aussi que, pris à la lettre, il en prohibât toute confection, parce qu’en effet les deux ne font qu’un même commandement. Aussi les iconomaques extrêmes ont poussé jusque-là leur erreur ; ils ont bien vu qu’adoucir la défense de faire des images était adoucir la défense de les honorer. Nous avons dit plus haut ce qu’il fallait penser de la proliibition touchant l’usage des images. Les mêmes considérations s’appliquent à l’objection présente et nous font connaître quel est le vrai sens littéral du passage invoqué. Ce que Dieu défend, tout le contexte l’indique, c’est qu’on ait d’autres dieux que lui, c’est qu’on pense qu’une image matérielle puisse exprimer sa nature, qu’on fasse de telles images et qu’on se prosterne devant elles, à la façon des païens qui attribuaient à leurs idoles la divinité. Ce que Dieu défend, en un mot, c’est l’idolâtrie. Il faut donc entendre ce qu’elle est pour bien comprendre le dessein de Dieu dans le commandement dont il s’agit. « L’idolâtrie, dit Bossuet, n’est pas tant une erreur particulière touchant la Divinité que c’en est une ignorance profonde, qui rend les hommes capables de toutes sortes d’erreurs. » Deux points principaux faisaient le fond de la religion des païens :

« Ils regardaient leurs idoles comme des portraits de

leurs dieux. Bien plus, ils les regardaient comme leurs dieux mêmes : ils disaient tantôt l’un et tantôt l’autre, et mêlaient ordinairement l’un et l’autre ensemble… Premièrement, il est certain qu’ils se figuraient la Divinité corporelle, et croyaient pouvoir la représenter au naturel par des traits et par des couleurs. Comme leurs dieux au fond n’étaient que des hommes, pour concevoir la Divinité, ils ne sortaient point de la forme du corps humain : ils y corrigeaient seulement quelques défauts ; ils donnaient aux dieux des corps plus grands et plus robustes, et quand ils voulaient, plus subtils, plus déliés et plus vites. Ces dieux pouvaient se rendre invisibles et s’envelopper de nuages. Les païens ne leur refusaient aucune de ces commodités ; mais enfin ils ne sortaient point des images corporelles ; et quoi que pussent dire quelques philosophes, ils croyaient que par l’art et par le dessin on pouvait venir à bout de tirer les dieux au naturel. C’était là le fond de leur religion… Mais les païens passaient encore plus avant, et ils croyaient voir eflectivement la Divinité présente dans leurs idoles. Il ne faut point leur demander comment cela se faisait. Les uns, ignorants et stupides, étourdis par l’autorité publique, croyaient leurs idoles dieux, sans aller plus loin ; d’autres, qui raiïlnaient davantage, croyaient les diviniser en les consacrant..Selon eux, la Divinité se renfermait dans une matière corrupliblc, se mêlait et s’incorporait

dans les statues. Qu’importe de rechercher toutes leurs imaginations touchant leurs idoles ? tant il y a qu’ils conspiraient tous à y attacher la Divinité, et ensuite leur religion et leur confiance. Ils les craignaient, ils les admiraient, ils leur adressaient leurs vœux, ils leur offraient leurs sacrifices : enfin ils les regardaient comme leurs dieux tutélaires, et leur rendaient publiquement les honneurs divins. » Du culte des images, ii loc. cit., p. 77 et 78. C’est tout cela que le Décalogue défend, et l’on verra, par la réponse à l’objection suivante, combien les catholiques sont loin de telles pratiques et de telles erreurs. Quant à la destruction du serpent d’airain louée par l’Écriture, elle s’explique par la conduite des Juifs, qui avaient commencé à l’adorer à la manière des païens. — Nous omettons les objections tirées des Pères, qu’il serait trop long d’examiner. Les textes allégués se rapportent soit au culte absolu, soit aux images destinées à représenter la nature divine, soit à des abus à prévenir ou à extirper.

b) Avoir des images dans les temples, se prosterner devant elles, c’est imiter les païens, c’est agir en païens ; car les païens, que font-ils autre chose ? Entrez dans un temple païen, puis dans un temple catholique, ne verrez— vous point que de part et d’autre il y a des images et que l’on se prosterne devant elles ? Par là, l’Église ne fait-elle pas voir qu’elle est retombée dans l’idolâtrie ? — La réponse est tout à fait simple et facile. Quand il s’agit de juger un acte extérieur qui de soi a une portée multiple, comme est le prosternement (TcpoaxûvT^atç), et dont toute la valeur et la signification dépend de l’intention d’où il procède, c’est évidemment l’intention qu’il faut uniquement regarder et sur elle qu’il faut régler son jugement. C’est le principe qu’ont unanimement suivi les défenseurs des images et les Pères de Nicée (787). On le trouve exposé et développé dans le remarquable discours de Léonce, évêque de Néapolis, cité par le concile.

« Comme je l’ai dit souvent, il faut rechercher l’intention

dans tout salut et dans toute proskynèse. Or, si tu m’accuses d’adorer comme Dieu l’image de la croix, pourquoi n’accuses-tu pas Jacob, qui a adoré le sommet du bâton de Joseph, mais il est clair qu’il n’a pas adoré le bois qu’il voyait, mais, par le bois, Joseph : ainsi nous, nous adorons le Christ par la croix… Parce que tu m’as vu saluer l’image du Christ ou de sa mère immaculée, ou de tout autre juste, tu t’indignes et tu bondis, l’injure à la bouche, et tu nous appelles idolâtres. Dis-moi, ne frémis-tu pas ? ne trembles-tu pas ? ne rougis-tu pas, en me voyant abattre par toute la terre les temples des idoles et édifier des temples de martyrs ? Si j’adorais les idoles, pourquoi honorerais-je les martyrs qui ont détruit les idoles ? Si j’honore et glorifie des morceaux de bois comme des dieux, comment puis-je honorer et glorifier les martyrs qui ont détruit ces simulacres de bois ? etc. » Mansi, op. cit., t. xni, col. 45-48. Cf. col. 52. Et plus loin : « Nous ne disons pas à la figure de la croix, ni aux figures des saints : Vous êtes nos dieux, car les images ne sont pas des dieux, mais seulement des similitudes du Christ et des saints, placées et vénérées pour le souvenir, l’honneur et pour l’ornement des églises, » col. 53. Saint Germain, dans sa lettre à Thomas, évoque de Claudiopolis, après avoir dit que le peuple chrétien adore et glorifie la seule Trinité vivifiante, ajoute :

« Le peuple chrétien, vrai et sincère adorateur de la

Trinité, n’encourt pas la condamnation des idoles, écrite dans les saints Livres, en ayant les images des saints pour se souvenir de leur vertu ; de même que personne ne fait au bienheureux apôtre Paul, qui défendait la circoncision de la chair et s’élevait contre ceux qui voulaient être justifiés par la loi, un reproche et un crime d’avoir circoncis Timothéc, de s’être