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IMAGES (CULTE DES ;

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Cf. t. XIII, col. 325. « I/honneur de l’image, dit aussi le concile, passe au prototype et celui qui voit l’image du roi voit en elle le roi. Celui donc qui vénère l’image vénùre en elle le roi ; car c’est son apparence et sa forme qui sont dans l’image ; et de même que celui qui fait injure à l’image du roi subit justement un châtiment, comme ayant injurié véritablement le roi, bien que l’image ne soit pas autre chose que du bois avec des couleurs et de la cire unies et mélangées, ainsi celui qui injurie l’image de n’importe qui adresse son injure à celui dont l’image est la reproduction. Mais la nature même des choses nous apprend, que quand l’image est déshonorée, c’est évidemment le prototype qui est déshonoré : tout le monde sait cela. » Mansi, op. cit., t. xni, col. 273. Ainsi, mépriser l’image de Jésus-Christ sera mépriser Jésus-Christ, lui-même. Refuser la proskynèse à l’image de Jésus-Christ sera la refuser à Jésus-Christ même. Professer qu’il ne faut point honorer l’image de Jésus-Christ, c’est professer qu’il ne faut point honorer Jésus-Christ. Anlirrhelicus, III, c. IV, 5, P. G., t. xcix, col. 429. S’il en est ainsi, si l’opprobre rejaillit sur l’original, le culte aussi qui est son contraire, oppositorum eadem est ratio. Et vraiment c’est vouloir détruire le culte du Christ que de vouloir détruire celui de son image.

b} A simili. — Si, dans la vie civile et domestique, on rend un honneur aux images, et que cet honneur ne s’adresse aucunement à la matière de l’image, mais seulement à celui qu’elle représente, pourquoi en serait-il autrement dans la vie religieuse ? L’homme est le même partout et partout l’image a la même essence et les mômes caractères fondamentaux. Quand on apporte aux villes, dit le pape Hadrien l", les efïîgies et les images des empereurs et que les magistrats et le peuple viennent à sa rencontre, ce n’est pas le tableau qu’ils honorent ou la peinture faite d’enduit de cire, mais bien la figure de l’empereur. » Mansi, op. cit., t. xii, col. 1068. « Dis-moi, dit Léonce de Néapolis en Chypre, cité par le concile, dis-moi donc, toi qui penses qu’il ne faut rien vénérer de ce qui est fait de main d’homme, ni absolument rien de créé, est-ce que bien souvent, en voyant dans ta chambre un habit ou un ornement de ta femme ou de tes enfants décédés, tu ne les as pas saisis, baisés et arrosés de larmes, sans que personne t’en fît un reproche ? Tu n’as pas adoré les vêtements comme Dieu, mais tu as montré en les baisant ton affection envers celui qui en était autrefois revêtu. » Mansi, op. cit., t. xiii, col. 45. Si, dans la vie sociale et domestique, il y a un honneur, un culte relatif, c’est tout naturellement qu’il y en aura un aussi dans la vie religieuse. Si l’on honore quelque chose qu’a possédée une personne qui nous est chère à un titre spécial ou qui la représente, à plus forte raison devra-ton honorer ce qui appartient à Dieu, ce qui représente une personne divine ou amie de Dieu, les temples, les autels, les reliques, les Écritures divines, et enfin les images saintes.

3. La comparaison des images saintes avec d’autres objets sacrés que l’on vénère d’un culte relatif fut aussi un argument puissant des iconophiles. On a déjà remarqué que le concile, dans son ôpoç, parle de la figure de la « croix précieuse et vivifiante » et des saints Évangiles, et dit qu’il faut rendre aux saintes images le même honneur qu’on rend à ces objets. C’est le moment d’exposer ce double argument, qui a toute la force d’un argument ad hominem.

a) Si les iconomaques honorent le livre des Évangiles, ce ne peut être à cause des lettres ou des sons matériels, c’est parce que lettres et sons rappellent les mystères de Jésus-Christ ; mais pareillement l’image rappelle les mêmes choses que l’Évangile : ils s’expliquent mutuellement ; ils ont donc droit aux

mêmes honneurs. Mansi, op. cit., t. xiii, col. 482. Poursuivant la comparaison qu’il a déjà faite de l’Écriture et de l’image, qui ont même utilité, saint Nicéphore continue : « Si l’Évangile qui résonne aux oreilles mérite tant d’honneur (car la foi dépend de l’ouïe), certes ce qui tombe sous la vue et nous fournit par ce sens le même enseignement que la lecture, ou bien l’emporte sur elle à cause de la rapidité de l’instruction, car la vue a plus de force que l’ouïe pour persuader, ou bien tout au moins n’est pas au second rang. Le même honneur lui sera donc rendu qu’à l’Évangile. » Antirrhcticus, III, 5, P. G., t. c, col. 384. (Il va sans dire qu’il faut restreindre ce rapprochement à la clarté de l’exposition et ne pas l’étendre à l’autorité.)

b) Plus souvent encore qu’avec le livre, on compare, pour justifier leur culte, les images saintes avec la croix. L’honneur donné à la croix et même à la figure de la croix n’était contesté par aucun des iconomaques. On conçoit donc quelle était la faiblesse de leur position. Les iconophiles ne pouvaient manquer d’en tirer parti. Ils le firent, et parfois avec un grand luxe d’arguments. Saint Jean Damascène, du culte rendu aux instruments de la passion et à la figure de la croix, tire un éloquent argument a fortiori en faveur de l’image du Christ. « Si j’honore et vénère comme des moyens de salut la croix, la lance, le roseau, l’éponge, par lesquels les Juifs déicides ont couvert d’opprobres mon Maître et l’ont tué, n’adorerai-je pas les images faites par les fidèles dans une intention droite pour glorifier et rappeler les souffrances du Christ ? Si j’adore l’image de la croix, faite de n’importe quelle matière, n’honorerai-je pas l’image de celui qui a été crucifié et qui nous présente la croix comme un salut ? "Cï àTuavôpwTrîaç ! Que je n’adore pas la matière, c’est clair 1 Détruite la forme de la croix, faite.de bois par exemple, je jette le bois au feu : ainsi des images. » De imaginibus, orat. ii, 19, P. G., t. xav, col. 1305. En dehors de son ôpoç, le concile fait aussi plusieurs fois la même comparaison. Mansi, op. cit., t. xiii, col. 269-272, 284. Dans son IP Antirrhétique, saint Théodore Studite presse fort l’argument ad tiomincm : ’Ex aoij [xoi tô vlxSv xà ï<ja XéyovTi, P. G., t. xax, col. 359-362. Mais c’est surtout saint Nicéphore qui développe cet argument et s’attache à montrer combien l’image du Christ l’emporte sur sa croix et l’image de sa croix. Dans son IIP Antirrhétique, il présente dans ce but dix raisons dont voici la première : « L’image est la ressemblance du Christ ; elle est semblable à son corps, nous décrit la figure de son corps, nous rappelle sa forme et nous signifie en le reproduisant le mode de son action, de sa doctrine ou le plus souvent de sa passion. La figure de la croix n’est ni semblable à son corps, ni ne nous montre aucune des choses dites. Or ce qui est semblable à quelqu’un lui est plus proche et le touche de plus près que ce qui ne lui est pas semblable, parce qu’il nous le fait mieux connaître au moyen de la ressemblance, , et à cause de cela, est aussi plus précieux. Donc la figure du Christ, qui le touche de plus près et le fait mieux connaître, devra être d’un plus grand prix et en plus grande vénération que la figure de la croix, qui parmi nous est précieuse et vénérable, u P. G., t. c, col. 428.

Un autre argument ad hominem est celui qu’on adresse à Calvin, qui, ne croyant pas à la présence réelle de Notre-Seigneur dans l’eucharistie, explique la terrible sentence de saint Paul sur la communion indigne, en disant que l’injure faite au symbole va à ce qui est symbolisé. C’est évidemment se condamner soi-même et dévoiler son parti-pris que de faire appel à un principe pour expliquer un texte gênant et n’en vouloir plus sentir la force quand ce sont les adversaires qui l’invoquent. Si l’injure au symbole est une injure à ce qui est sj’inbolisé, l’injure à l’image sera donc