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IMAGES (CULTE DES ;


l’on rend à des créatures intelligentes a reçu celui de dulie, qui veut dire service aussi, mais que l’usage a restreint à signifier l’honneur que l’on rend à une créature, non pas à cause de la dépendance, mais à cause de la charité, non servilute sed charilaie. « Nous vénérons (7rpocxuvoî)(i.ev) les anges, mais nous ne les servons pas (où XaTp£Ûo(xev) », dit saint Anastase, patriarche d’Antioche, tant de fois cité dans le concile de Nicée. Que nous ne devions la latrie qu’à Dieu seul, cela apparaît de ce que nous n’avons l’être que de lui, et que de lui seul nous pouvons avoir notre félicité. Il n’y a rien d’intermédiaire en effet entre l’âme raisonnable et Dieu, car il n’y a que la vue de Dieu, vérité immuable qui puisse la béatifier. Les autres créatures sont ou à côté ou au-dessous ; à côté, les anges, heureux de la même source ; au-dessous, la nature inanimée. Le culte donné aux objets inanimés prend un nom particulier dans le concile, c’est la fiji. ?), l’honneur, le respect. On les honore et respecte parce qu’ils disent rapport à Dieu ou aux serviteurs de Dieu. « Ceux qui disent qu’ils ont de l’honneur (Ti[j.av) pour les images et leur refusent la vénération (TrpoaxuvTjatç) sont convaincus d’hypocrisie », dit Taraise au concile de Nicée. Mansi, op. cit., t. xni, col. 56. A noter que, si la latrie ne se dit que de Dieu, la dulie peut se dire aussi de Dieu, et la ti[jlï) des saints et de Dieu. Mais pour les images et autres objets inanimés, on ne dit que Tiiy}, pour les saints que tij^yj et SouXsta et pour Dieu Ti(x-yj, SouXeîa et Xa-ïpeta, cette dernière expression étant réservée à son culte. Notons aussi que le terme de dulie, n’a été déterminé à signifier le culte des saints que plus tard, et procède de la distinction que saint Augustin a remarquée dans l’Écriture entre le service dû à Dieu (Xarpeia) et celui que l’on rend aux créatures (SouXeîa).

2. L’expression du culte.

Le culte ne se termine pas dans le cœur, il s’épanche, il éclate au dehors. En tant qu’il est dans l’âme, c’est le culte intérieur ; l’expression sensible de l’hommage intérieur s’appelle culte extérieur. Le culte total est constitué des deux, mais de telle sorte que l’acte extérieur n’a sa valeur que de l’acte intérieur. Le signe ordinaire, l’expression habituelle du culte et de tout hommage est l’inclination, le fléchissement du corps. Chez les Orientaux, cette inclination se faisait jusqu’à terre et s’appelait TtpoaxûvTjotç, à proprement parler, prosternement accompagné d’un baiser. On ne peut le traduire par adoration qu’en prenant ce mot dans le sens plus large qu’il a en latin. Si nous le faisons quelquefois, c’est en l’accompagnant du mot grec pour en préciser le sens. Ce mot de proskynèse peut être pris dans le sens de culte, mais strictement il signifie l’expression du culte. Saint Jean Damascène le définit : « indice de soumission et d’honneur, marque de soumission, c’est-à-dire d’infériorité et d’humilité. » De imaginibus, orat. I, 14 ; iii, 27, P. G., t. cxiv, col. 1244, 1348. Anastase d’Antioche, cité par le II « concile de Nicée, avait donné cette définition : « expression de l’honneur, du respect. Mansi, t. xiii, col. 5C.

Comme le culte dont elle est le signe, la TtpoaxûvYjoiç a une signification large et analogue. Elle peut s’appliquer à tout culte civil ou religieux. De soi indéterminée, c’est le sentiment intérieur d’où elle procède qui lui donne sa signification précise, qui fait qu’elle est Xa-rpeuTixT) ou ti(Z7)tixy) une vraie adoration ou simple honneur. C’est ce que les défenseurs des images ont eu soin de faire remarquer et pourquoi ils ont établi tant de modes de proskynèses, dont le premier est toujours celui qui se donne à Dieu selon la latrie. De imaginibus, orat. iii, 28, P. G., t. xav, col. 1348. Cf. S. Nicéphore, Antirrlicticus, III, 10, P. G., t. c, col. 392. Le concile déclare expressément que ce n’est pat la même chose que npooxuveîv et Xaxperieiv, et

base cette distinction sur le texte de l’Evansile : xùpiov TÔv 0e6v aou Trpoaxuvyjæiç, xal aÙTw [iôvco Xarpsùasiç. où il note que [aévco n’est employé que pour le mot Xarpeùceiç. Matth., iv, 10. Mansi, t. xni, col., 56.

Comme on a distingué un culte propre à Dieu, qui est celui de latrie, on a institué aussi pour ce culte un signe, une action extérieure qui lui est propre et qu’on ne peut employer dans le culte des créatures. « Cette action, c’est le sacrifice où on lui offre quelque cliose avec des cérémonies qui marquent expressément qu’il est le seul de qui tout dépend. Cette action, du consentement de tous les peuples, est réservée à la Divinité… Telle est la nature du sacrifice, qu’il attribue toujours la divinité à celui à qui on l’offre. » Bossuet, Le culte dû à Dieu, viii. Multa denique de cultu divine usurpata sunt, dit saint Augustin, quæ honoribus defenmiur huinanis, sive humilitate nimia, sive adulalione pestifera : ita tamen, ut quibus ca deferunfur, homincs habercntur, qui dicuntur colendi et honorandi, si autom cis mullum additur, et adorandi ; quis vero sacrificandum censuit, nisi ei quem Deum, aut scivit, aut putavit, aut finxit. De civitale Dei, t. X, c. iv, P. L., t. xli, col. 281. Saint Germain, cité par le concile, donne aussi le sacrifice auguste des chrétiens comme la marque propre de la latrie. Mansi, t. xiii, col. 120. Et même ce mot latrie était employé anciennement pour désigner ces divins mystères eux-mêmes. Voir, par exemple, S. Épiphane, Hær., t. III, c. ii, 22, P. G., t. xlii, col. 828.

On voit donc, par ce qui précède, ce qu’il faut entendre par le culte que les catholiques rendent aux images, comment il se distingue de celui qui se rend aux personnes, et surtout à Dieu lui-même. Cela suffit pour le moment. Nous verrons plus loin les sentiments divers des théologiens sur la nature du culte à rendre aux images. Il est temps de faire voir comment l’Église expose son dogme, le légitime et le défend.

Doctrine de l’Église.

C’est ici le lieu de reproduire

les principaux documents qui contiennent la doctrine officielle de l’Église et que nous n’avons fait qu’indiquer à propos de l’usage des images.

1. La définition du concile de Nicée (787) :

« Nous décidons avec toute exactitude et soin de rétablir,

semblablement à la figure de la croix précieuse et vivifiante, les saintes et vénérables images, faites de couleurs, de mosaïques ou de quelque autre matière décente, dans les églises de Dieu, sur les A-ases et les vêtements sacrés, sur les murs et les planches, dans les maisons et sur les chemins : à savoir l’image de Jésus-Christ, notre Seigneur, IMcu et Sauveur, celle de notre souveraine immaculée la sainte mère de Dieu, des anges honorables et de tous les pieux et saints personnages, car plus orf les regarde longuement à travers la représentation de l’image, plus ceux qui les contemplent sont excités au souvenir et au désir des prototypes ; de leur rendre salut et adoration d’homieur (ttu.r ; TixT|V TtpoGxvvrifT ; -/) : non pas certes la latrie véritable qui provient de la foi et qui ne convient qu’à Dieu, mais l’hoimcur que l’on donne ù la figure de la croix précieuse et vivifiante, aux saints Évangiles et aux autres objets sacrés ; d’approcher d’elles de l’encens et des lumières, conune c’était la pieuse coutume des anciens. Car l’honneur témoigné à l’image passe au prototype et celui-là qui vénère l’image vénère la personne qu’elle représente… Si donc il en est qui ont la témérité de penser ou d’enseigner autrement, de mépriser à la façon des hérétiques impies les traditions ecclésiastiques, de méditer quelque nouveauté ou de rejeter quelqu’une des choses consacrées par l’Eglise, Évangile, figure de la croix, représentation par l’image ou reliques de martyr ; ou de travailler avec fraude et fourberie à détruire quelqu’une des traditions légitimes de l’Église catholique ; ou encore d’employer à <les usages profanes les vases sacrés ou les saints monastères : ils seront déposés s’ils sont évoques ou clercs, et excommuniés, s’ils sont moines ou laïques. " Mansi, Concil., t. xiîl, ci>l. 377-380.

La définition proprement dite comporte trois décisions : a. La première concerne l’usage des saintes images. Il faut les admcttn. » comme on admet la croix