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IMAGES (CULTE DES :


de son incarnalion, et (’gaiement les iinaf^cs des saints, qui indiquent les combats de chacun contre le démon, et leurs victoires et leurs couronnes. Il n’est pas vrai, comme tu penses, que les chrétiens les divinisent et les adorent, mais dans la ferveur de leur zèle et de leur foi, ils contemplent les images des saints, en se souvenant de leur culte envers Dieu. » Mansi, t. xni, col. 168. Cette deuxième utilité, l’image la fournit d’une manière permanente. « Par elles (les images), dit le 11= concile de Nicée, nous avons toujours le souvenir de Dieu. La lecture n’est pas toujours chantée dans les temples vénérables, mais la représentation par l’image y est comme une chaire, qui, le soir, le matin et au miUeu du jour, nous raconte et nous proclame la vérité de ce qui s’est passé. » Mansi, t. xni, col. 361.

Ces deux utilités, instruire et rappeler, de l’image lui sont communes, avons-nous vii, avec le discours et le hvre. Les iconophiles, au moyen de ce rapprochement, tirent un argument très fort de l’emploi de l’Écriture sainte. Si l’on accepte l’Écriture sainte, on doit aussi recevoir l’image sainte. Saint Jean Damascène, dans sa division des images, les place dans la même catégorie : « Le sixième genre d’image est celle qui est faite en mémoire des choses passées, soit d’un prodige, miracle ou action vertueuse, pour la gloire, l’honneur, la louange (aT7)XoYpa9tav) de ceux qui ont excellé dans la vertu, soit d’une action condamnable, pour l’opprobre et la honte des méchants, et qui devient l’utilité de ceux qui, dans la suite, la regarderont : à savoir pour que nous fuyions les vices et cherchions à acquérir les vertus. Or, cette image est de deux sortes. Ou bien elle est tracée par le discours dans les livres (car la lettre est l’image du discours) et c’est ainsi que Dieu a gravé la loi sur des tables et a ordonné de retracer par l’écriture la vie de ceux qui ont été ses amis, ou elle est perceptible par le simple regard, et c’est ainsi que Dieu a ordonné de placer dans l’arche l’urne et la verge… De la même manière, maintenant, nous traçons avec amour les images des hommes qui ont été vertueux pour nous les rappeler et nous exciter à les imiter. » P. G., t. xciv, col. 1341-1344. Le Ile concile de Nicée presse le rapprochement : « Si les Pères ont transmis qu’il ne faut point lire l’Évangile, ils ont transmis par là même qu’il ne faut point faire d’image ; mais s’ils ont transmis la première chose, ils ont par là même transmis la seconde. La représentation par l’image reproduit la narration évangélique et celle-ci développe celle-là, et toutes les deux sont bonnes et précieuses. Elles se montrent l’une l’autre (àXXr)Xcùv 8y]Xa)Ti>câ). » Mansi, t. xiii, col. 269. Tout aussi catégorique est saint Nicéphore : « Qui reçoit l’Écriture admet nécessairement aussi la représentation ; s’il rejette l’une, il doit aussi rejeter l’autre. Et puisque tout le mystère de l’anéantissement du Verbe est l’œuvre de la providence divine, et qu’il a plu à Dieu de nous faire voir avec bonté, même en cette manière, les desseins de sa miséricorde ; à cause de cela, il a fallu aussi ce genre d’écriture, plus grossière et néanmoins plus claire, pour les gens simples et frustes, afin que même les illettrés rencontrassent et apprissent par la simple vue ce qu’ils sont privés de connaître par la lecture et ainsi reçussent une connaissance plus abrégée et plus claire des choses. Car, ce que souvent l’esprit n’a pas saisi en entendant les paroles, la vue, en le percevant d’une manière stable, l’a interprété plus clairement. On est donc ainsi conduit plus facilement au souvenir de ce que Jésus-Christ a fait et souffert pour nous, et plus rapidement que par le développement des paroles, pour autant que la vue est plus prompte que l’ouïe à connaître les choses et à .s’assurer de leur vérité. » Antirrhelicus, III, 3, P. G., t. G, col. 380-381.

c) De la seconde utilité des images, qui est de faire vivement souvenir des bienfaits de Dieu et des exemples des saints, une troisième découle : les images excitent, nourrissent et entretiennent la vie chrétienne cl dévole : consolation de la piété, sentiments de reconnaissance envers Dieu, d’admiration envers les saints, de désir de les imiter ; ce sont tous avantages que procurent les images, par la façon vive ^ont elles nous représentent les mystères de la religion et les exemples (le la sainteté. C’est là surtout qu’apparaît leur supériorité sur la parole, comme le dit saint Thomas (voir plus haut) et comme avant lui le proclamait déjà la raison d’Horace (ad Pisones) :

Segnius irritant animos immissa per aures Quam ((Uîe sunt oculis subjecta Tidelibus…

Pour exciter notre affection, nous aimons à avoir et à contempler les images de ceux qui nous sont chers, le fils de son père, l’épouse de son mari, les sujets de leur roi et l’ami de son ami. Cette vue en effet ravive le sentiment en agissant sur l’imagination et la mémoire. Le concile mentionne cette puissance d’émouvoir en faisant relire la conversion d’une pécheresse à la vue d’une image de saint racontée par saint Grégoire de Nazianze, Mansi, t. xui, col. 13, et aussi le passage où saint Grégoire de Nysse déclare qu’il n’a jamais vu l’image du sacrifice d’Isaac sans en être touché jusqu’aux larmes. Après cette dernière lecture, Basile, évêque d’Ancyre, fait la réflexion suivante :

« Souvent ce Père avait lu cette histoire, et n’avait

pas pleuré ; mais quand il l’a vue en peinture, il a pleuré. » Et Jean, prêtre et moine, ’icaire des évêques orientaux, d’ajouter : « Si la peinture produit une telle utilité et des larmes chez ce maître, combien serat-elle plus utile aux ignorants et aux simples. » Mansi, t. xrn, col. 9. Nous avons tout le récit évangélique retracé dans les images, dit plus loin le concile, nous rappelant à la pensée de Dieu et nous comblant de joie. Quand elles sont sous nos regards, le cœur de ceux qui craignent Dieu se réjouit, leur visage s’épanouit, leur âme passe de la tristesse à l’allégresse et chante avec David, l’ancêtre du Seigneur (ŒOTràTopoç) : a Je me suis souvenu de Dieu et j’ai été comblé de délices. » Mansi, t. xiii, col. 260-261. Aussi le concile, pénétré de cette puissance qu’a l’image pour exciter la dévotion, la proclame-t-il dans son ôpoç : « Autant ils (Notre-Seigneur et les saints) sont frétjuemment regardés au moyen de la reproduction de l’image, autant ceux qui contemplent ces images sont excités au souvenir et au désir des prototypes. » Mansi, t. xiii, col. 377. Répondant à un iconoclaste qui demandait à quoi bon les images et quel fruit on pensait en retirer, saint Théodore Studite réphque : « Qui donc, mon ami, regardant attentivement une image, à droite et à gauche, se retire sans en garder l’empreinte dans l’esprit, empreinte bonne, si l’image est bonne, honteuse, si l’image est lionteuse, de telle sorte que souvent, même à la maison, l’une excite la componction et l’autre la passion. » P. G., t. xax, col. 1220. On aura plaisir à retrouver sous la plume d’un auteur mystique moderne de la plus haute autorité, sainte Thérèse, ce sentiment de l’utilité de l’image pour exciter la dévotion :

« Savez-vous, dit-elle, en quel temps il est utile

de recourir à un tableau de Notre-Seigneur, et que je le fais moi-même avec le plus grand plaisir ? C’est lorsque le divin Maître s’éloigne de nous, et nous le fait sentir par les sécheresses où il laisse notre âme. C’est alors une bien douce consolation d’avoir devant les yeux l’image du Bien-Aimé de nos cœurs ; je voudraisque notre vue ne pût se porter nulle part sans la rencontrer. Et quel objet plus saint, plus fait pour charmer les regards, que l’image de celui qui a tant d’amour pour nous, qui est le principe et la source de tous les-