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IMAGES (CULTE DES’780

ils font brûler des parfums, leur rendant le même honneur qu’au signe sacré sur lequel le Christ a souffert. Ils chantent des psaumes devant ces images, leur témoignent leur vénération (TTpoaxuveïv, mot à mot adorarc, geste qui consiste à porter la main à sa bouche et à la baiser en signe de vénération), et en attendent du secours. Beaucoup revêtent ces images d’habits de iili et les choisissent pour parrains de leurs enfants. D’autres, voulant prendre l’habit monastique, abandonnent la vieille tradition, d’après laquelle les cheveux qu’on leur coupe étaient reçus par des personnes de marque ; ils préfèrent les laisser tomber sur les images. Des prêtres et des clercs grattent les couleurs des images, mêlent ces couleurs aux hosties et au viii, et distribuent le tout après la messe (comme eulogies). Enfin d’autres placent le corps du Seigneur entre les mains des images, avant de le distribuer aux communiants. Quelques-uns ne célèbrent plus le service divin dans les églises, mais dans les maisons privées et sur des images qui tiennent lieu d’autels. Ces faits et plusieurs autres bien constatés, les hommes savants et sages les regardent comme défendus et inconvenants. » Hefele, op. cit., trad. Leclercq, t. iv, p. 42.

Le concile de 815 avaitcondamné ces abus, et l’empereur partageait lemême sentiment. Pour rétablir dans la sainte Église la paix et l’orthodoxie, il envoyait au pape des ambassadeurs (lesmêmesqui étaient adressés àl’empereur Louis) et priait cet empereur de les faire accompagner avec honneur et à l’abri de tout danger jusque auprès du pape. Mansi, t. xiv, col. 417. Le monarque franc, ému des désordres auxquels aboutissait, lui assurait-on, la dévotion aux images, flatté d’ailleurs qu’on eût recours à sa protection pour clore toutes les difficultés, entra dans les vues de l’empereur byzantin. Il fit à ses envoyés le meilleur accueil, les fit accompagner à Rome comme on l’en priait, et demanda au pape Eugène II l’autorisation d’ouvrir, dans une assemblée d’évêques, une enquête patristique au sujet des images. Le pape y consentit. La réunion eut lieu à Paris en 825. Sans être et sans vouloir être un concile, elle prétendit tracer sa conduite au saint-siège. Quatre pièces nous sont restées de ses délibérations : un mémoire à l’empereur et à son fils Lothaire, et trois projets de lettres officielles ; l’une, que Louis écrirait au pape, une autre, que le pape écrirait aux empereurs grecs, et une troisième, que l’épiscopat français adresserait au pape. De cette dernière nous n’avons que des fragments intercalés dans la précédente. Voir ces documents dans Mansi, t.xiv, col. 422 sq. La première pièce, dissertation détaillée sur les images, commence par juger la lettre du pape Hadrien à Irène : on le loue d’avoir blâmé les briseurs d’images, et on le blâme d’avoir ordonné d’adorer ces mêmes images. Le concile de Nicée, poursuit le mémoire, s’est grossièrement trompé, et ses raisons en faveur du culte des images ne valent rien. La réponse du pape Hadrien aux repreliensiones de Charlemagne apporte, defensionis causa, des témoignages aliqiiando absona, aliquando inconvenieniia, aliquando etiam reprehensionis digna ; le pontife romain avait répondu qnæ voluil, non tamen quæ decuit, et sans l’enseignement de saint Grégoire, il se fourvoyait au point de tomber dans le précipice de la superstition. Aussi priait-on le prince de s’entremettre auprès des grecs et du pape, pour les ramener dans la bonne voie. Et dans ce but, on leur présentait une série de textes bibliques et patristiques, dirigés, les uns contre les iconoclastes, les autres, en nombre beaucoup plus considérable, contre les iconophiles. Les empereurs choisiraient eux-mêmes ceux qui leur paraîtraient les plus propres à établir la vraie doctrine. On voit persister dans ce recueil le malentendu qui prête au 11*^ concile de Nicée l’absurdité même qu’il a expressément rejetée, can. 12. On y voit, par contre, admise l’adonilio de la

croix en l’honneur de la passion du Christ, parce que la vénération rendue à la croix est une institution de l’Église universelle, mais rejeté l’argument qu’on en tire en faveur de l’adoration des images. Et certes, bien à tort, car le mémoire ne parle pas seulement de la vraie croix, mais de toute autre croix destinée à rappeler la passion du Sauveur. Sancta mater Ecclesia… decrevit licitum esse universis catholicis, ob amorem solius passionis Christi, ubicumque cas (cruces) viderinl, indinando si voluerinl venerari, el insuper die sancta quo passio Domini in universo mundo speciuliter celebratur, ciim omni devotione universum ordinem sacerdotalem seu cunrtum populum proslratum adorarc, can. 14. Car, si l’image de la croix est vénérable, pourquoi l’image de celui qui est mort sur elle ne le serait-elle pas ? Le second document contient des considérations vagues sur le bien général et n’a rien de commun avec notre objet. Le troisième et le quatrième documents reproduisent l’enseignement des Livres Carolins au sujet des images. Il se résume en ces quelques mots : les images sont chose indifiérente à la religion, leur usage est permis, mais leur culle illicite. « Ainsi l’assemblée de Paris ne se contentait pas de rejeter la doctrine romaine ; elle prétendait dicter au pape la lettre qu’il écrirait en Orient et les arguments qu’il y alléguerait pour désavouer les décisions de ses prédécesseurs et condamner un concile reçu par eux. On ne pouvait trahir plus de naïveté et de confiance en soi. » Tixeront, op. cit., . t. iii, p. 479.

De tous ces documents qui lui furent remis le 6 décembre 825, l’empereur fit faire un extrait qu’il chargea deux évêques francs, Jérémie de Sens et Jonas d’Orléans, de porter à Rome. Ils devaient aussi remettre au pape une lettre de l’empereur Louis pleine de déférence.

« Nous avons fait demander à Votre Sainteté

qu’il fût permis à nos évêques de recueillir les textes des saints Pères… Nous vous envoyons, par les vénérables évêques Jérémie et Jonas, ce qu’ils ont pu réunir dans le peu de temps qu’ils ont eu. Cependant ce n’est pas pour vous enseigner que nous vous les envoyons avec ce recueil d’autorités : c’est seulement pour vous fournir quelque secours… Si vous avez pour agréable que nos ambassadeurs aillent à Constantinople avec vos légats, faites-le-nous savoir à temps… Nous ne disons ceci que pour vous montrer combien nous sommes disposé à faire tout ce qui sera du service du saint-siège. » Hergenrœther, Histoire de l’Église, trad. Belet, Paris, 1886, t. iii, p. 108 ; P. L., t. civ, col. 1318-1319. Quelle suite fut donnée à ces démarches ? Rien ne nous l’apprend. Aucune, sans doute, et tout dut finir par l’ambassade de politesse que devait le monarque franc. On sait, en effet, par un biographe anonyme de Louis le Débonnaire, que ce prince envoya comme ambassadeurs à Constantinople l’évêque Halitgar et l’abbé Ansfried de Nonantula. Hefele, op. cz7., trad. Leclercq, t.iv, p. 48.

4. Claude de Turin.

Vers ce temps, se place l’éclat de Claude, évêque de Turin. D’origine espagnole, il avait passé quelque temps à la cour de Louis et en partageait l’hostilité contre le culte des images. Homme peu cultivé et d’ailleurs d’un caractère entêté, suivant jusqu’au bout une logique étroite et fruste, il se mit à effacer les images et à briser les croix. Il alla même jusqu’à condamner le culte des reliques et nier l’intercession des saints. Cela causa beaucoup d’émoi dans le peuple fidèle. Le pape Paul I" infligea à cet iconoclaste un blâme qui n’eut aucun résultat. Théodmir, abbé du monastère de Psalmody (diocèse de Nîmes), son ancien ami, le reprit fortement. Claude répondit par un volumineux écrit, Apologeiicum atque rescriptum Claudii episcopi adversus Theudmirum abbatem, P.L., X. cv, col. 459-464, où il exposait et accentuait ses erreurs, traitant d’idolâtrie le culte et l’usage même des images et de la croix, non idola reliquerunt, sed no-