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IMAGES (CULTE DES)


tout ordre ; on en portait sur soi comme amulettes, on les emmenait avec soi en voyage : les images étaient pour le clirétien de Byzance un gage assuré de bénédiction et de salut, une garantie de la protection et du secours d’en haut : sans l’image il ne pouvait pas vivre. » Jbid., p. 320-321.

Passons en Occident. Là aussi, bien qu’on soit plus réservé, on a accepté le culte des images. Fortunat, dans son poème de saint Martin (avant mai 576), dit qu’une lampe brûle devant l’image du saint ; un mal d’yeux dont il souffrait avait cessé par une onction de l’huile de cette lampe.

II ic paries retinet sancti sub imagine (ormam…

Lgchnus adesl, cujus vitrea notai ignis in urna.

P. L., t. Lxxxin, col. 426. Un auteur dont le témoignage est précieux, c’est saint Grégoire le Grand. Il n’y a pas seulement le texte cité par le pape Hadrien aux reprehemsionea de Charlemagne, que trop peu de manuscrits contiennent : Elnos quidem non quasi anle divinitatem anle illam (image de Notre-Seigneur)pros^e7-ni/nur, sed Ulum adoramus quem per imaginem aul naium, aut passum, sed et in Ihrono sedentem recordamur. Epist., ix, 52, P.L., t. Lxx-n, col. 991. Voici un autre texte tout aussi important et sans suspicion. Il se trouve dans une lettre que saint Grégoire écrivait en 599 à Januarius, évêque de Caralis. Un nommé Pierre, juif nouvellement converti et baptisé de la veille, s’était, par un zèle intempestif, emparé de la synagogue avec plusieurs autres chrétiens, et ils y avaient transporté une croix et une image de la Vierge. Le pape ordonne de rendre la synagogue aux juifs, après en avoir retiré avec l’honneur qui convient l’image et la croix : sublata exinde cum ea qua dignum est veneratione imagine atque cruce. Epist., IX, 6, P. L., t. Lxx

i, col. 944. En opposition à

cette lettre, on a voulu citer du même auteur la lettre à Sérénus, le premier des iconoclastes, écrite en l’an 600, où il dit : l’rangi non dehiiit, quod non ad adorandum in ecclesia, sed ad instrucndas solummodo mentes fuit nescientium collocatum. Epist., xi, 13, P. L., t. lxxvii, col. 1128. Mais on comprend que le pape, ayant affaire à un peupie porte à la superstition, ne pouvait s’étendre en des considérations qui eussent été mal comprises. Ce qu’il y a lieu surtout de souligner dans cette lettre, c’est le reproche que saint Grégoire fait à Sérénus d’être en opposition avec la conduite universelle de l’épiscopat : Die, fraler, a quo factum sacerdote aliquundo uuditum est quod fecisli. Si non aliud, vcl illud le non debuit revocare, ut, despectis aliis fndribus, .svlum te sanctum et esse crederes sapienlem ? Ibid. Citons un dernier témoignage. Saint Augustin de Cantorbéry, raconte saint Mcde le Vénérable, se présenta avec ses compagnons devant le roi Édilbert, en portant comme étendard une croix d’argent et l’image du Sauveur peinte sur un tableau, et en chantant des prières, crucem pro uexiHo ferentes argentcam, et imaginem Domini Sah’aloris in tabula depictam, Urlaniasque cantantes. Hist. rccl. gentis Anglorum, I. I, c. xxv, P. L., t. xcv, col. 5.5.

Telle est)a tradition, tel est le développement de l’usage et du culte des images durant les siècles qui précédèrent l’iconoclasme. On l’a vii, c’est surtout en Orient qu’ils fleurissent. C’est la terre classique de la dévotion aux icrtncs et il le sera de plus en plus. Au viii" siècle, où nous arrivons, on multiplie pour elles les témoignages de la vénération la plus profonde, baisers, encensements, inrllnatioiis, prostrations, pieux cantiques, lampes allumées, draperies, couronnes, rubans. Cf. Marin, op. cit., p. 321. " L’extension iirodigicusc cl la vénération profonde, constante, des images telle qu’elle ressort de toutes les histoires que nous connaissons, nous font voir avec une évidente clarté combien leur usage était profondément enraciné dans la vie et

les habitudes du peuple, combien on s’était accoutumé dans toutes les situations et toutes les entreprises d’attendre secours et profit de la présence de ces images. La prière faite devant une image égalait la prière faite à l’endroit le plus vénérable d’une église. L’image était une garantie de bénédictions, l’intermédiaire visible entre le saint et ceux qui imploraient son secours ; mettre en question le culte et l’existence des images, c’était, aux yeux des fidèles, compromettre la prospérité et la sauvegarde des individus et des peuples ; les avantages de toutes sortes… qu’on attribuait auximages sont l’un des arguments les plus graves que l’on puisse faire valoir en leur faveur. » Schwarlose, Der Bilderstreil, p. 173, dans Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, t. iii, p. 613, en note. Dans cet élan de la piété, excité bientôt par la persécution, il ne faut pas s’étonner que des abus se soient glissés, semblables à ceux que Michel le Bègue, dont le témoignage, il est vrai, n’est point d’absolue valeur, indiquera en 824 à Louis le Débonnaire (voir plus loin), et dont on trouve un exemple dans le fait du spathaire Jean, qui donna pour parrain à son fils l’image de saint Démétrius. P. G., t. xcix, col. 962-963. Désormais le culte des images est une partie importante et comme intégrante de la vie religieuse des grecs. Les ateliers de peinture et de miniature se multiplient. Saint Théodore Studite en fonde un au monastère de Studion, dont les règles et les modèles feront autorité.

En Occident, il y a moins de traces de ce culte. On y est, en général, moins prompt dans la vénération, comme on y sera plus calme dans l’hostilité (du moins jusqu’aux violences de la Réforme). Dans toute cette histoire de l’usage et du culte des images, nous n’avons pas mentionné les diverses oppositions qui çà et là se produisirent. Voir Iconoclasme, col. 576-5’77.

3° La querelle des images en Orient. Voir Iconoclasme, col. 577-590.

La querelle des images en Occident.

1. Concile de

GentiUy. — La querelle des images en Orient eut son contre-coup et son pendant en Occident, par le fait surtout de l’intervention de Charlemagne. En dehors de Rome, où les papes et deux conciles (731 et 769) avaient condamné les prétentions des empereurs iconoclastes, il n’y avait eu à s’occuper de l’afiaire que le concile de Gentilly, bourg aux environs de Paris, en 767. Éginhard, AnnaZcs, an. DCCLXV 1 1, /-". L., t. civ, col. 385 : Adon de Vienne, Chronicon, jElas sexla, P. L., t. cxxni, col. 125. Les actes de ce concile sont perdus. Le texte d’Adon de Vienne donne à penser qu’il ne fut point question du culte, mais seulement de l’usage des images, quæstio venlilaia inter græcos et romanes… de sanctorum imaginibus, ulrumne fingendæ aut pingendæ cssent in ecclesiis. Mansi, t. xii, col. 677. Le texte de Migne, loc. cit., reproduisant celui de la Bibliothcc.a maxima Patrum, porte cette variante : utrumne fmgendiv an pingendæ csscnI. Quelle que soit la vraie le^on, s’il faut l’entendre au sens disjonclif qui se présente à première vue, l’usage des images est évidemment supposé permis et le débat n’en vise que les modalités. Si le sens est copulatif, la question porte sur la légitimité même de l’usage. Ce qui peut donner lieu à cette intcrprétation, c’est qu’alors en Orient sévissait la persécution (761775) de Constantin Copronymc, qui s’acharnait contre l’usage même des images. Réduit à ce ]ioint, il n’y a pas de doute quc le concile ne se soit pr()noncé dans le sens de l’orthodoxie, surtout si l’on admet, avec toute probabilité, comme lui étant postérieure, la lettre du pape Paul au roi Pépin, Mansi, t. xii, col. 604 ; P. L., [. xcvni, col. 206, où il le loue de son zèle pour Texaltation de l’Église et la défense de l’orthodoxie. Hefele, op. cit., Irad. Leclercq, t. iii, p. 726.

2. Livres Carolins et concile de Francfort (794). —C’est Charlemagne qui rouvrit la question, selon loulc