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fin, la force de la tradition, l’autorité de maîtres qui paraissent sages, le spectacle et la contagion de la foule prodiguant ses hommages à l’idole, achèvent en lui la persuasion qu’il est bien devant la divinité elle-même quand il est devant son image, et même que la statue s’identifie avec la divinité. On voit tout cela dans le discours de saint Augustin. Nous touchons ici à un point qui nous explique en grande partie la rareté des statues religieuses à l’origine de l’Église, comparativement au nombre des peintures, fait que le savant Petau avait déjà noté. Opéra théologien, Anvers, 1700. t. VI, p. 325. Celles mômes qui nous restent ont pour la plupart un caractère purement symbolique, qui nous explique aussi pourquoi dans l’Église orientale les statues furent dans la suite et sont encore proscrites. Dans la lettre de Germain de Constantinople à Thomas de Claudiopolis, lue au concile de 787, on voit indiqué, à propos de la statue de Panéas, que l’usage de dresser des statues était encore considéré comme propre aux païens. Mansi, Concil., t. xni, col. 125-128 ; cf. Petau, op. cit., t. vi, p. 325. Les statues prodiguées par le paganisme devinrent, quand l’empire se fit chrétien, des ornements pour les places publiques. La statue fut par suite considérée comme un objet profane et civil, et dans la demeure de Dieu ne furent admises que les images peintes, et aussi, quelquefois, les rondes-bosses qui, plus semblables à la peinture, avaient comme elle un caractère d’évocation plutôt que de représentation proprement dite.

3. Aux VI et vii’e siècles. — A cette époque, les images ; c multiplient II nous en reste un grand nombre. La chose du reste est si notoire qu’elle dispense d’une énumération qui serait trop longue. Notons seulement qu’il y a tendance à en couvrir toutes les parties de l’édifice sacré. comme en témoigne l’église Sainte-Marie-l’Antique, découverte en 1899, sur le Forum romain. Cf. Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, t. iii, p. 610, note 2. Ce qui nous occupe désormais et uniquement, c’est le développement du culte. Jusqu’ici, on en a vu peu de traces, et les images paraissent surtout des ornements instructifs. A l’époque où nous sommes, il prend un essor inattendu, favorisé qu’il est par la croyance qui se répand alors aux images miraculeuses (àysipo-KolriToi), celle surtout que Notre-Seigneur aurait envoyée à Abgar, cf. Tixeront, Les origines de l’Église d’Êdesse, Paris, 1888 ; Leclercq, Dictionnaire d’archéologie et de liturgie, art. Abgar, et à l’histoire de la fameuse statue de Panéas, élevée à Jésus-Christ par l’iiémorroïsse de ! ’Évangile. Plusieurs textes nous indiquent ce développement. Une lettre de saint Siméon Stylite le Jeune, mort en 526, citée par le VU" concile général, dans sa V" session, Mansi, t. xni, col. 160-161 ; P. G-, t. Lxxxvi, col. 3216-3220, demande à l’empereur Justin la punition de malfaiteurs qui ont commis l’impiété et l’abomination de profaner dans une église l’image du Fils de Dieu et de sa sainte mère. Le même auteur, cité par saint Jean Damascène, P. G., t. lxxxvi b, col. 3220 ; cf. P. G., t. xciv, col. 1409-1412, repousse l’accusation d’idolâtrie portée contre les chrétiens parce qu’ils honorent, TTpoaxuvoïJVTeç, les images. Un autre Père nous fournit un témoignage précieux par sa netteté et sa précision. C’est Léonce, évêque de Néapolis en Chypre (582-602), dont le IF’concile de Nicée cite un long fragment TTrèp t/jç xpiCTTiaviôv à.no’koY’iy.r xaxà’louSatcov xal TTspi. eîxôvwv tcov àyicov. Voici condensée sa pensée : ^^piaTiavol Tuâvreç slxovoc XpiCTTOÙ, Y] oLTiOGToXou, Y) |j.àpTUpQi ; xpaToGvTSç xal àCTTraî^6[i.£voi T-^ CTapxî, —fi ([ « ^XTl o » JTàv tôv XpiaTÔv vo(xtî^oji, EV 7] Tov (xâpTupa aÙToG xaTé)(£W. Mansi, t. xni, col. 44 ; P. G., t xciii, col. 1600. « Ce ne sont pas les signes extérieurs, c’est l’intention qu’il faut considérer dans tout salut et toute adoration. Et l’auteur poursuit ainsi sa démonstration, empruntant

ses exemples à l’Écriture, { la vie civile, ? » la vie de famille, où l’on voit constamment honorer l’image, le sceau, le vêtement même d’une personne et tout ce qui lui appartient. Et si l’on place dans les églises des croix et des images, continue-t-il, ce n’est pas qu’on reg.irde ces objets comme des dieux : c’est Tipôç àvâji.v/ ; aiv x.al TijxTjV, xal sÙTîpÉTCS’.av sxxÀ/jaiwv. Ainsi, conclut Léonce, celui qui craint Dieu honore conséquemment et vénère et adore comme Fils de Dieu le Christ, notre Dieu, et la représentation de sa croix et les images de ses saints. » Tixeront, op. cit., t. iii, p. 449. Cette vénération pour les images est encore attestée par les Collectunea d’Anastase le Bibliothécaire. On y lit la relation d’une conférence en 650 de saint Maxime le Confesseur, avec Théodore, évêque de Césarée, où il est dit que Théodore, Maxime et tous ceu.x qui se trouvaient là se jetèrent à genoux et baisèrent les Évangiles, la vénérable croix, l’image de Notre-Seigneur et de sa mère. P. G., t. xc, col. 156 ; cf. ibid., col. 164. Jean de Thessalonique, légat du pape au concile de 680, revendique dans un discours cité par le IF concile de Nicée le droit de peindre les images des saints, non qu’on adore les images elles-mêmes, mais parce qu’on glorifie les saints dont la peinture reproduit les traits, toùç Stà YpocçYJç SïjXoufiévouç So5âî^o[j, ev. Il ne croit pas possiljle d’avoir des images de Dieu, en dehors de Jésus-Christ, qui a été visible dans un corps. Mansi, t. xni, col. 164-165. Le concile Quinisexte (in Trullo) de 692 s’occupe aussi des image :  ;, can. 82. Il les déclare cysTCTaç, c’est-à-dire vénérables, augustes, mais prescrit de ne plus représenter Jésus-Christ sous la forme d’un agneau, mais sous la forme humaine, en laquelle il a apparu, Mansi, t. xr, col. 977-980, mesure de précaution destinée à prévenir ou à guérir des abus. Le culte des images, en effet, avait alors pris en Orient < un prodigieux développement ; il s’était enraciné peu à peu dans la vie religieuse du peuple, qui s’était fait une habitude très chère de demander aux images secours et protection dans toutes ses entreprises. On les emportait en voyage ; elles présidaient aux jeux de l’hippodrome ; elles marchaient dans les batailles en tête des armées impériale’s : Héraclius emmenait avec lui dans son expédition contre les Perses l’image « non faite de main d’homme » du Sauveur ; à la veille d’engager une lutte décisive, une image du Christ à la main, il haranguait ses soldats ; les Avares, qui étaient venus, en son absence, mettre le siège devant Constantinople, avaient été obligés, après quarante jours d’efforts inutiles, de se retirer en désordre, repoussés loin de la « ville gardée de Dieu » moins par le courage de ses habitants que par la toute-puissante protection de la mère de Dieu, patronne de la capitale. Comment la très sainte Théotocos aurait-elle pu résister aux supplications de son peuple ? Son image et les images des saints auraient-elles donc en vain été portées en procession, au chant des psaumes et des cantiques, à travers les flots pressés d’une population suppliante ? » Marin, Les moines de Constantinople, Paris, 1897, p. 319. « Le culte des images occupait une place considérable dans les circonstances solennelles et dans les cérémonies officielles de l’empire ; il se trouvait mêlé plus intimement encore’aux habitudes de la vie ordinaire du peuple de Byzance. Partout, dans les églises et les chapelles, dans les maisons particulières, dans les chambres d’habitation et dans les chambres à coucher, devant les boutiques, sur les marchés, sur les livres et les habits, sur les ustensiles de ménage et les joyaux, sur le chaton des bagues, sur les coupes, sur les vases, sur les murailles, à l’entrée des ateliers, en un mot, partout où cela pouvait se faire, on plaçait l’image du Sauveur, de lanière de Dieu, ou d’un saint. On les trouvait sous toutes les formes et toutes les grandeurs ; on peut les voir encore sur les sceaux d une multitude de particuliers et de fonctionnaires de