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IMAGES (CULTE DES]


de plus en plus. Le iv « et le ve siècle nous ont laissé un certain nombre de ces images. Rome et Ravenne en par—’ticulier possèdent plusieurs mosaïques de cette époque représentant Notre-Seigneur, la sainte Vierge et plusieurs saints. A Rome, le mausolée de Sainte-Constance, le plus ancien édifice chrétien du iv<e siècle, nous montre encore quelques-uns de ces précieux documents :

« les mosaïques des absides latérales ont été épargnées

et nous ont conservé la plus ancienne représentation de ces compositions qui vont devenir le thème le plus habituel de l’art chrétien. Dans l’une. Dieu le Père, assis sur le globe du monde, donne à Moïse la loi ; dans l’autre, le Christ, debout sur la montagne d’où s’échappent les fleuves mystiques, proclame la loi nouvelle, dont il confie le texte à saint Pierre et la prédication à saint Paul. 1 Leclercq, Manuel d’archéologie chrétienne, t. ii, p. 212. Remarquables aussi, parmi d’autres, la mosaïque de l’abside de Sainte-Pudentienne (iv « s.), représentant Jésus-Christ, saint Pierre et saint Paul et d’autres personnages ; celle du grand arc de Sainte-Marie-Majeure (f moitié du ve siècle), qui retrace la rencontre de Jésus porté par sa mère avec Siméon et Anne ; celle aussi de Sainte-Sabine (vers 424), dont il reste un fragment. « Ce fragment se compose de deux figures placées aux deux extrémités d’une immense inscription en lettres d’or sur fond bleu lapis… Les deux figures représentent, l’une l’Église des circoncis, ECCLESIA EX CIRCUMCISIONE, l’autre, l’Église des gentils, ECCLESIA EX GENTIBUS.’Leclercq, op. et., t. ii, p. 220. A Ravenne, Sainte-Agathe-Majeure possède une mosaïque représentant Jésus-Christ entre deux anges (fin du IV » s. ou commencement du v « ). Dans les mosaïques du mausolée de l’impératrice Galla Placidia (vers 449), on voit encore représentés le bon Pasteur, saint Laurent et les apôtres.

Des textes nombreux appuient ces documents. Nous ne devons cilcr que pour mémoire le récit contenu dans lE7ttaToXr) guvoSixy) twv àyioxâTwv TiaTptapxwv…, publié par Sakkelion, Athènes, 1874, d’après lequel l’impératrice Hélène, à Bethléem, » éleva le grand temple de la mère de Dieu, et au couchant, dans la partie extérieure, fit représenter en mosaïque la naissance du Christ, la mère de Dieu portant sur sa poitrine l’enfant qui donne la vie, et l’adoration des mages… A leur arrivée à Be’.hléem, les Perses virent avec étonnement les images des mages persans, observateurs des astres, leurs compatriotes, et… ils épargnèrent l’église. » Ce document est trop tardif (ix’s.) pour qu’on en puisse faire état. Leclercq, op. cit., t. ii, p. 232. Cette mosaïque, en elTet, peut fort bien dater de l’époque de Justinien, comme le notent Vincent et Abcl. Bethléem, Paris, 1914, j). 128, note 1. Nous avons mieux et suffisaminent dans les auteurs de l’époque.

C’est, en Orient, saint Grégoire de Nazianze, parlant de l’image du saint homme Polémon, dont la vue convertit une pécheresse, Carm., 1. I. sect. ii, v. 800 sq., P. G., t. xxxvii, col. 737-738 ; saint Basile invitant les peintres à le surpasser par leur art dans la louange de saint Barlaam, P. G., t. xxxi, col. 489 (il y a des raisons de croire que ce discours est de saint Éphrem) ; Astère d’Amasée et saint Grégoire de Nyssc, décrivant, le premier, les peintures religieuses qu’il a vues dans l’oratoire de Sainte-Euphéniie, à Chalcédoine, In lauàem sanctæ Eaphemiip, P. G., t. xl, col. 33.3-337, le second, une mo.saiquc (le pavement et des peintures murales à sujets religieux, Oratio in laudrm S. Thcodori, P. G., t. xlvi, col. 737 : le même saint (jrégoire disant avoir vu souvent, TToXXâxii ;, représenté en peinture le sacrifice d’Isaac ; 6peclacle qui lui arrachait toujours des larmes des yeux, tant le tableau était expressif. P. G, l. xlvi, col. 572. H ne faLsail alors que s’approprier les sentiments et les expressions elles-mêmes du célèbre docteur deSyrie, saint Éphrem. S. Ephremopera, édit. Mcrcali,

DICT. Dl ; THÉOL. CATIIOI, .

1915, 1. 1, p. 7 ; C. Emereau, Saint Éphrem le Syrien, Paris, 1919, p. 97. C’est encore saint Nil, blâmant Olympiodore de vouloir peindre dans une basilique des scènes de chasse et de pêche et l’exhortant à choisir pour sa décoration des sujets bibliques qui auront l’avantage d’instruire les illettrés. P. G., t. lxxix, col. 577.

En Occident, c’est saint Jérôme, In Jon., w, 6, P. L., t. xxv, col. 1148, parlant d’images d’apôtres qu’on a coutume de peindre sur des vases ; saint Augustin, nous indiquant l’habitude qu’on a de son temps, muUis in locis, de représenter saint Pierre et saint Paul auprès de Notre-Seigneur, De cons. ei>ang., . I, c. x, P. L., t. xxxiv, col. 1049, nous parlant de la peinture où l’on voit saint Etienne lapidé et Saul gardant les vêtements ; elle lui paraît dulcissima, Serm., cccx^^, c. v, p. L., t. xxxviii, col. 1434 ; et encore mentionnant une peinture fort répandue {tôt locis pictum) dont le sujet est le sacrifice d’Abraham. Contra Faustum, t. XXII, c. xliii, P. L., t. xLii, col. 446. C’est Prudence qui décrit les peintures retraçant le martyre de saint Cassien, Peristephanon, hymn. ix, v. 7 sq., P. L., t. lx, col. 433-435, et celui de saint Hippolyte, ibid., hymn. xi, col. 544 sq. ; saint Paulin de Noie et Sulpice-Sévère, décorant d’images religieuses les basiliques construites par eux ; les sujets sont assez variés : scènes de l’Ancien Testament, Poema xxii, P. L., t. lxi, col. 660 ; martyrs des deux sexes, Poema xxviii, ibid., col. 663 : saint Martin, baptême de Notre-Seigneur par saint Jean-Baptiste, la sainte Trinité elle-même et les apôtres. Epist., xxxii, P. Z, ., t. Lxi, col. 330 sq.

On a moins de détails sur le culte. On insiste plutôt sur la portée instructive des images. Pourtant, l’image de Polémon, dont nous avons parlé, est appelée cT£paa(Lïa par saint Grégoire de Nazianze, toc. cit., celle de saint Martin est dite vénérable par saint Paulin de Noie : Martinum veneranda viri testatur imago. Epist., xxxii, P. L., t. Lxi, col. 332. Et nous savons par Thcodoret, Hist. rel., xxvi, P. G., t. lxxxii, col. 1473, qu’à Rome, dans le vestibule de tous les ateliers, se voyaient de petites icônes de saint Siméon Stylite placées là comme une protection et un secours, cpuXaxrjv… xal àocpàXeiav. On peut voir là un commencement de culte des images.

Ce culte se développera à mesure que les chrétiens seront moins exposés à la contagion de l’idolâtrie. Olte crainte de ressembler aux païens en honorant les images causait toujours une certaine hésitation. Des païens plus raffinés, au reproche que les chrétiens leur taisaient d’adorer le bois ou la pierre, répondaient que leurs hommages n’allaient en réalité qu’à la divinité invisible dont l’idole matérielle était le signe. Mais saint Augustin leur répliquait que la pente est rapide qui conduit à l’adoration de l’idole elle-même : Diicil enim, et affeclii qiiodam inpnw rapit infirma corda mortalium similitiido et membrorum imitai » compago…, guis uutem adorât vel oral intiiens simulacram, qui non sic afficitur ut ab eo se exaudiri putet, ab co sibi pnrstari quoddesidcratsperct ? Enurrat. in ps. CA’///, serm. il, 1, 5, P. L., t. xxxvii, col. 1481, 1483. On a voulu voir là un argument valable aussi contre le culte des images. Mais, à le considérer de près, le texte de saint Augustin avec tout son contexte ne peut s’appliquer qu’aux Images représentant les fausses divinités. ï’a premier lieu, ces images étaient des statues. Or, les statues ont d’ellesmêmes, par leur imitation complète des formes, une valeur plus strictement représentative. D’où la tendance naturelle à inellrc un lien de similitude parfaite entre elles et les objets représentés. En second lieu, ces idoles représentaient les formes naturelles d’un être vivant, homme ou animal ; d’où autre tendance, pour le païen qui prie devant elles, à croire son idole, qu’il voit immobile, habitée ou animée par un numen invisible. En VII.

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