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IGNACE D’ANTIOCHE (SAINT ;


d’Eusèbe, H. E., i, 13, P. G., t. xx, col. 128 ; l’expression oj XpisTcavo’. àÀÀJe Xp17— : i ; xr : jpoi, Ad TralL, VI, 2, dans Furik, op. cit., t. ii, p. 64, est de saint Basile, Epist., ccxL, P. G., t. XXXII, col. 897. L’auteur connaît semblablement les controverses théologiques de la même époque, l’arianisme, le semi-arianisme, l’apoUinarisme, sans la moindre allusion aux erreurs de Nestorius et d’Eutychès ; mais il n’est pas aisé de découvrir, au point de vue doctrinal, sa propre pensée. Parfois il corrige certaines expressions du vrai Ignace dans un sens nettement orthodoxe ; c’est ainsi, par exemple, qu’à la place de saag de Dieu, Ad Ephes., i, 1, dans Funk, op. cit., t. i, p. 214, il met sang du Christ, Ad Ephes., i, 1, Funk, t. ii, p. 182 ; et là oCi Ignace avait écrit : —< Notre Dieu Jésus-Christ a été porté dans le sein de Marie », Ad Ephes., xviii, 2, Funk, t. I, p. 226, il met : « Le Fils de Dieu qui est né avant tous les siècles. » Ad Ephes., xviii, 2, dans Funk, op. cit., t. ii, p. 202. Parfois aussi il semble pencher en faveur tantôt de l’arianisme, tantôt de l’apoUinarisme. Leclerc, Paires aposl., Amsterdam, 1724, t. II, p. 306 sq., et Grabe, Spicilegium, Oxford, 1698-1692, t. II, p. 225, ont vu en lui un arien ; de même Zahn, qui a proposé de l’ideutifier avec Acace de Césarée. Ignalius von Anliochien, Gotha, 1873, p. 132 sq. Pour Funk, Theol. Qaartalschrifl, t. lxii, p. 355 sq., ce fut plutôt un apollinariste. Mais quelle qu’ait été son erreur doctrinale, il n’en est pas moins l’auteur des six lettres additionnelles et l’interpolateur des sept autres.

3. Les lellres aulhenliques.

Après une controverse qui a duré plus de deux siècles, c’est l’opinion d’Usher, de Voss, de Pearson et de tant d’autres qui doit prévaloir. Pour tout esprit impartial, l’authenticité des sept lettres de la collection moyenne ne saurait être mise en doute. Outre qu’elle a pour elle des témoignages qui remontent au iie siècle, ceux de saint Polycarpe, de saint Irénée, puis, plus tard, ceuxd’Origène, d’Eusèbe et de Théodoret, elle échappe à tous les arguments tirés de l’examen interne qu’on a fait valoir contre elle. Ces arguments sont nombreux, mais aucun ne tient. Il suffira de rappeler les principaux.

a) Ceux qui sont relatifs à la condamnation et à la mirl de saint Ignace. — Il n’est pas vraisemblable, dit-on, que Trajan, l’auteur du rescrit à Pline, ait condamné lui-même l’évêquc d’Antioche à être livré aux botes dans l’amphithéâtre romain. De telles condamnations n’eurent lieu que sous Marc-Aurèle, et on n’envoya jamais les condamnés à Rome. Mais les lettres ne font allusion ni à un jugement ou une condamnation par ïrajan, ni à une persécution générale ; elles laissent plutôt entendre que la sentence a été portée par le légat de Syrie et montrent que la paix régnait en.Vsie, ailleurs qu’à. lioche,

puisque, pendant sou voyage, Ignace a pu conférer librement avec les communautés chrétiennes et leurs chefs. Et s’il est vrai qu ; >. sous Marc-Aurôle, les chrétiens de Lyon ne furent pas envoyés à Rome pour y subir le martyre, on a des exemples qu’au iie siècle Rome reçut, des provinces, quelques condamnés aux bêtes, com : ne en témiigne le Digeste, XLVIII, xix. Cette loi détend seulement un abus : elle interdit d’envoyer à Rome (les condamnés aux bêtes, à moins qu’ils n’en fussent dignci, auquel cas il fallait recourir à l’empsreur : sed si ejus rcboris vel arlificii sinl ut digne populo roniino e.thiberi possint, principem considère débet.

b) Invraisemblance de ce qui est dit dans l’itinéraire.

— Ce transfert d’un prisonnier condamné aux botes ressemble plutôt, dit-on encore, à une m irclie triomphale et suppose en tout cas une bien grande liberté. Mais on oublie qne saint Paul, quelques

années plus tôt, a pu librement prêcher, et que très souvent des chrétiens ont pu, à prix d’argent, s’entretenir avec les martyrs et recevoir de ceux-ri quelques billets. On oublie également le De morte Peregrini de Lucien. Ce satirique, qui vécut au II® siècle, a tenu pour digne de foi ce qu’on racontait du martyre d’Ignace, ou, s’il n’a pas connu les lettres de l’évêque d’Antioche, il a fait un tableau de la vie et de la mort de son héros, qui rappelle singulièrement les divers traits du voyage et de la mort d’Ignace. Voir les rapprochements nombreux, et, semble-t-il, décisifs, relevés par Funk, Opéra Pair, apost., Tubingue, 1881, t. i, p. l-li, et par Lightfoot, St. Ignatius, t. i, p. 137-141.

c) Certaines lettres ne s’expliquent pas. — — Pourquoi écrire à telle Église plutôt qu’à telle autre ? Pourquoi, notamment, à celle d’Éphèse, de Magnésie et de Tralles, dont il a reçu les légats, et auxquels il pouvait si facilement confier de vive voix ce qu’il voulait faire entendre à leurs communautés ? Mais autre chose est d’écrire directement à une Église, autre chose de lui faire parler par des tiers. En remerciant les fidèles d’Éphèse, de Magnésie et de Tralles de la consolation qu’ils lui avaient procurée par l’envoi de leurs représentants, Ignace profita de l’occasion pour les mettre en garde contre les hérétiques qui faisaient alors de la propagande en Asie. Quant aux Smyrniens et aux Philadelphiens, qu’il a vus à son passage, il a un motif de plus de leur écrire, celui de les prier d’envoyer à Antioche un délégué pour lui faire part de la joie qu’il a éprouvée à recevoir le diacre Agathopus et à apprendre l’heureux retour de la paix. Les lettres à saint Polycarpe et aux Romains se justifient sans peine par elles-mêmes. Tandis que Renan, Les Évangiles et la première génération chrétienne, Paris, 1877, p. x-xxxv, ne reconnaissait comme authentique que la seule lettre d’Ignace aux Romains, D. Vôlter, Die Lôsung des Ignalianissiicn Frage, dans Theologisch Tijdschrift, 1886, p. 114-136 ; Ignatius-Peregrinus, ibid., 1887, p. 272-280 ; Die Ignatianischen Brieje auf ihren Ursprung untersucht, Tubingue, 1892, soutint que cette lettre était un faux de la fin du iiie siècle et que les six autres épîtres ignatiennes étaient l’œuvre de Peregrinus, le Protée de Lucien de Samosate ; ce ne fut que plus tard, 160-170, quand leur auteur eut passé à la secte des cyniques, qu’elles furent attribuées à saint Ignace. Edouard Bruston admit l’authenticité des six lettres aux Églises d’Asie Mineure, mais prétendit que celle qui était adressée aux Romains avait été fabriquée par un anonyme à la fin du IIe siècle. Ignace d’Antioche, ses épîtres, sa vie, sa théologie, Montauban, 1893. A. Stall, Ignalianische Untersuchungen, I. Die Authenlie dcr Sicben Ignatiusbriefc, Greisswald, 1899, démontra que cette épître ne différait pas tellement des autres qu’elle dût être attribuée à un autre auteur et qu’elle avait réellement été écrite par saint Ignace. Otto Pfleiderer, Urchristentum, seine Schriften and Lehren, Berlin, 1887, était l’adversaire de l’authenticité des lettres iguatiennes ; mais il changea complètement d’avis dans la 2e édition de cet ouvrage, 1902, t. ii, p. 226-256.

d) Certains traits ne seraient pas dignes d’un Père apostolique. — Tels passages témoigneraient, dit-on, de quelque orgueil, d’autres d’une humilité affectée, d’autres encore d’une ardeur exagérée |iour le martyre. Fussent-ils vrais, ces reproches ne prouveraient rien contre l’authenticité des lettre ?. Or, ils ne sont pas fondés.

Sans doute Ignace avoue qu’il pourrait écrire des choses célestes, mais il s’en abstient dans la crainte que cela ne dépassât la portée d’esprit de ses correspondants. Si c’est là de l’orgueil, la phrase qui suit immédiatement est pour avouer qu’il a beau porte