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IGNACE D’ANTIOCHE (SAINT)


à Héron, diacre d’Antioche. Le texte grec n’en fut publié que plus tard par Valentin Hartung, dit Paceus, DiUingen, 1557. Ce texte comprenait en plus une lettre d’Ignace à Marie de Cassoboles. C’est ce qu’on est convenu d’appeler la recension longue, à raison de l'étendue de ses lettres.

On ne soupçonna pas tout d’abord qu’elle fût apocryphe. En efïet, Ignace avait été cité par.les anciens, et c'était là le seul Ignace connu. Les épîtres citées jadis portaient la même adresse, et les citations, bien que non littérales, se rapprochaient suffisamment du texte publié. Il n’y avait donc, semblait-il, qu'à tenir le tout pour authentique. Et pourtant ce tout était suspect. Les citations faites par les Pères, telles que celles d’Eusèbe et de Théodoret, différaient beaucoup trop du texte. De plus, en dehors des lettres signalées par Eusebe, aucune autre ne se trouvait citée. Enfm la connaissance de plus en plus approfondie de l’ancienne histoire ecclésiastique allait faire découvrir dans cette collection bien des anachronismes choquants.

Mais à côté de ces difficultés et de ces soupçons soulevés par la critique, il y en eut d’autres inspirés par des motifs reUgieux et ecclésiastiques. Tel passage, favorable à la suprématie de l'Éghse romaine, offusquait les protestants ; tels autres, favorables à l'épisoopat, déplaisaient aux presbytériens. Les catholiques, pour la plupart, acceptaient l’authenticité et l’intégrité de la recension. Petau, du moins, soutint qu’elle était interpolée. Parmi les protestants, quelques-uns, tels que Scultet, en 1598, et plus tard Saumaise, la soupçonnèrent aussi d’interpolation. Védel, professeur à Genève, en donna une édition en 162.3, où il eut soin de mettre en tête les lettres qu’il jugeait authentiques, mais interpolées, à savoir les lettres signalées par Eusèbe. et relégua les autres dans un appendice, comme apocryphes. Mais il n’avait pas le moyen de prouver et de souligner les interpolations des premières. C’est la découverte d’Usher, l' archevêque anghcan d’Armagh, en Irlande, qui allait le fournir et préparer ainsi la solution de la question ignatienne, en permettant en outre de condamner définitivement, comme apocryphes, les lettres additionnelles, dont Eusèbe n’avait pas fait mention.

3. La coUeclion moijenne.

Usher avait remarqué que les citations de saint Ignace, faites aux xiii<= et xiv » siècles par des auteurs anglais, différaient du texte de la collection longue et concordaient avec celles qu’on trouve dans les anciens Pères. Il y avait donc interpolation. Son soupçon devint une certitude quand il eut découvert une version latine des lettres de saint Ignace, dont le texte répondait exactement aux citations d’Eusèbe et de Théodoret. Plus de doute, pensa-t-il, cette version donnait le texte authenlique des lettres énuinérées par Eusèbe. Il n’eut qu’un torl, celui d'écarter, parce qu’il la croj’ait apocrj’phc, la lettre à Polycarpe, et il publia sa découverte. Polycarpi et Ignalii episMæ, Oxford, 1644. Son opinion fut bientôt corroborée par le texte grec de cette version latine qu’Isaac Voss avait trouvé et qu’il publia. Epiatolm genuina : sancti Ignatii mariyris, Amsterdam, 1646. Il n’y manquait que l'épîtrc aux Romains, découverte bientôt après par Kuinart dans le Marlijrium Colberlinum, et publiée par lui dans ses Ada marlijnim sinccra, Paris. 1689. C’est ce qu’on est convenu d’appeler la collection moyenne, parce qu’elle est de moindre étendue que la iirécédente et beaucoup plus longue que celle de la version syriaque dont il sera question plus loin. De cette collection moyenne il existe une version arménienne, publiée pour la première fois à Conslantinople, en 178.3, des fragments dans une version syriaque, publiés par Cureton, Corpus Ignalianum, Londres. 18'19. p.197sq..

et un fragment important dans une version copte, publié pour la première fois par Lightfoot. SI. Ignatius, t. II, p. 859-864.

La découverte d’Usher était de nature à trancher le débat sur la question d’authenticité et d’intégrité des lettres de saint Ignace, car les objections soulevées contre la collection longue ne pouvaient plus tenir. Mais comme la collection moyenne contenait encore des passages non moins favorables à l'épiscopat, les protestants irançais et anglais continuèrent à rejeter en bloc toutes les lettres de saint Ignace, tant celles de la collection moyenne que celles de la collection longue. Tels Saumaise, Adparatus ad libros de primalu papæ, Leyde, 1645 ; Blondel, Apologia pro senieniia Hierontjmi de episcopis et prcsbtjteris, Amsterdam, 1646 ; et surtout Daillé, De scriplis qaæ sub Dionysii Areopagitæ et Ignalii Anliocheni nominibas circamferuntur libri duo, Genève, 1666, dont l'œuvre touffue et confuse suscita la magistrale riposte de Pearson, évêque anglican de Chester, Vindicia ; Ignalianse, Cambridge, 1672. Dans son ensemble et comparée à l’attaque de Daillé, c'était de la part de Pearson, dit Lightfoot, St. Ignatius, 1. 1, p. 320, la réplique de la lumière aux ténèbres. Dès lors la discussion pouvait cire considérée comme close. Elle continua pourtant encore, mais avec moins d'àpreté ; Cureton a dressé la liste de ceux qui y prirent part, dans l’appendice de ses Vindicise Ignalianx, Londres, 1846. Un résultat, du moins, passait pour définitivement acquis, celui de la condamnation de toutes les lettres non signalées par Eusèbe.

4. La collection brève.

Celle-ci, ainsi nommée parce qu’elle ne contient que trois lettres beaucoup plus courtes que les lettres correspondantes de la collection moyenne, est uniquement représentée par une version syriaque dans deux manuscrits du désert de Nitrie, apportés à Londres et déposés au British Muséum. Cureton la publia, non sans prétendre qu’elle était la seule authentique. Ancient sijriac version of Ihe epislles of St. Ignatius to St. Polijcarp, Ihe Ephesians and Ihe Romans, Londres, 1845. Ce fut le point de départ d’une nouvelle controverse, où toute la question ignatienne fut de nouveau agitée. Car si Cureton avait raison, il fallait abandonner ce que l’on croyait acquis par la critique et les travaux d’Usher et de Pearson ; il fallait de plus ne retenir, comme anthentiques, que trois lettres sur les sept signalées par Eusèbe, à savoir celles de la version syriaque, à l’exclusion des lettres correspondantes de la collection moyenne. Mais avait-il raison ? Wordsworth ne le crut pas. Dans VEnglish review, n. 8. juillet 1845, p. 348, il soutint que la version syriaque n'était qu’un abrégé, dû à un eutychicn, qui, au lieu de détruire la valeur du texte grec d’Ignace tenu jusqu’alors pour aiithentique, pourrait servir ù le confirmer. Cureton releva le gant dans ses Vindiriw Ignatianrr, Londres, 1846, puis, ayant trouvé un troisième nianuscrit, également au British.Muséum, il publia son Corpus Jgnatianum, Londres, 1849, qui contient la collection complète des épîtres de saint Ignare, authentiques, interpolées et a|)Ocryphes, avec les nombreux passages cités par les écrivains ecclésiastiques, depuis le x » siècle, en syriaque, en grec et en latin. Une traduction anglaise du texte syriaque et beaucoup de notes acconiipagnent le texte.

La mêlée devint aussitôt générale. Du côté de Cureton se rangèrent Bunsen. Die drei achlen und die drei uniicMcn Brieje des Ignatius von Antiochien, Hambourg, 1847 ; Ignatius von Antiochien und seine Zeit, Hambourg, 1847 ; Ritschl, Entstehung dcr altkntholischen Kirche, 1850 ; Weiss. dans le Repertorium de Router. 1852. p. 169 ; Lipsius, Veber die Acchtheit dcr sgrischen Recension dcr ignalinnischen