Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.1.djvu/348

Cette page n’a pas encore été corrigée
681
682
IDOLOTHYTES


de Barcelone, a, comme Terlullien dont il dépend, entendu les interdictions apostoliques comme des règles morales. La leçon : ab idolothi/tis qu’il cite, il l’explique de l’idolâtrie. Il reconnaît, en eflet. dans les trois défenses tria crimina, les capitalia, les morialia : l’idolâtrie, le meurtre et la fornication, et il caractérise le chrétien qui se liTe à l’idolâtrie en mangeant des idolothytes : contemplor Dei. Parœnesis, P. L., t. XIII, col. 1083. Le décret apostolique est, à son jugement, Novi Testamenti conclusio.

Mais dans les Commentarii in Genesim, t. I, sur Gen., IX, 1, qui sont publiés dans VAppendix ad opéra Eucherii, P. L., t. l, col. 933, on lit la leçon : ab immolatis dans une citation du décret apostolique. L’auteur entend cette prohibition comme une observance juive quoiqu’il connaisse l’interprétation de l’interdiction du sang, entendue de l’homicide. Il conclut que ceux qui violeraient ces défenses ne pourraient plus être chrétiens.

2. En Orient.

a) A Alexandrie. — Au début du II « livre du Pédagogue, Clément d’Alexandrie dit que les chrétiens ne doivent pas manger d’idolothytes. Il ne donne pas très clairement la raison de cette interdiction. Il avance plusieurs arguments, dont le premier est que ce serait participer à la table des démons. Il expose ensuite qu’aucune nourriture n’est impure et qu’il ne faut faire aucune distinction d’aliments. Il mentionne les deux cas de conscience de saint Paul : celui de l’invitation à un repas chez un païen et celui de l’achat des viandes au marché. Il cite enfin le décret apostolique qui interdit les idolothjtes. Mais il n’explique pas ce terme ; il l’entend évidemment des viandes immolées aux idoles, qui étaient déjà interdites aux juifs comme impures. Pœdagogus, II, c. I. P. G., t. VIII, col. 392-393, 408 ; O. Stahlin, Clemens Alexar.driniis, Leipzig, 1905, 1. 1, p. 159-160, 160.

Clément cite le décret apostolique dans sa forme orientale à quatre prohibitions, mais il ne donne pas la raison de ces interdictions. Il dit seulement qu’on peut tout acheter au marché, sauf les exceptions faites dans le décret apostolique. Strom., IV, xv, P. G., t. viii, col. 1304 ; O. Stahlin, t. ii, p. 290-291.

Origène cite deux fois littéralement le décret avec ses quatre prohibitions. La première fois, il prouve seulement que la circoncision n’a été imposée qu’à Abraham et à ses descendants et il n’explique pas le décret. Comment, in Epist. ad Eom., iJ, 13, P. G., t. xiv, col. 905. La seconde fois, il réfute Celse, qui accusait d’inconséquence les chrétiens, qui s’abstenaient seulement des idolothytes offerts aux idoles et qui devraient s’abstenir de toutes les viandes, puisque tout appartient aux dieux. Les chrétiens, répond Origène, ne mangent pas de viandes des sacrifices pour éviter le scandale. Ils ne sont pas astreints à la loi mosaïque, qui distingue les aliments purs et impurs, mais ils doivent s’abstenir des idolothytes, parce qu’ils ne doivent pas s’asseoir à la table des démons. D’ellesmêmes les viandes ne sont pas impures ni mauvaises, comme saint Paul l’enseigne. Cont. Celsum, VIII, 24-30, P. G., t. XI, col. 1552-1559 ; Koetschau, Origenis Werke, Leipzig, 1899, t. ii, p. 240-245. Dans son Commentaire sur saint Matthieu, iom. xv, 12, P. G., t. xiii, col. 941, il ne cite que trois interdictions, les seules qui soient alimentaires. Il prouve encore que les lois alimentaires des juifs n’obligent pas les chrétiens. Le Christ a purifié tous les aliments, qui sont bons en eux-mêmes et dont l’usage est indifférent. Or, la conscience seule décide si les choses indifTérentes sont bonnes ou mauvaises. L’abstention des idolothytes dépend donc exclusivement, selon la doctrine de saint Paul, de la conscience des chrétiens.

b) La Didascalie des douze apôtres, c. xxiv, 3-15, qui est du milieu du ine siècle (voir t. iv, col. 746-747),

reproduit textuellement la Didaché. F. Xau, La Didascalie des douze apôtres, traduite du syriaque, 2e édit., Paris, 1912, p. 10-11. La controverse de Jérusalem sur la circoncision et les lois alimentaires des juifs est rapportée tout au long et le décret apostolique est cité avec ses quatre proliibitions, dont la première est celle des idolothytes. Ibid., p. 190-194. M. Nau a traduit : les sacrifices (offerts aux idoles).

c) Un peu postérieurs sont les apocryphes Clémentins, qui dateraient de la fin du m » siècle ou du commencement du ive (voir t. iii, col. 213-214) et qui contiendraient encore des éléments judéo-chrétiens. Saint Pierre dit aux habitants de Tyr qu’ils se sont mis sous la puissance des démons en participant à leur table, mais qu’ils peuvent revenir à Dieu par la pénitence. Dieu a ordonné par une loi de s’abstenir de la table des démons. Homil., vii, 3, 4, P. G., t. ii col. 217, 220. Or, parmi les pratiques qui associent les hommes à la table des démons, l’apôtre nomme aux Sidoniens la manducation des idolothytes. Ibid., 8, col. 221. Le même enseignement est donné à Tripolis, à la suite de l’exposé de l’origine des démons, quoique les idolothytes ne soient pas mentionnés. HomiL, viii, 10, 20, col. 229, 237.

Il est permis aux démons de pénétrer dans les âmes et les corps de ceux qui mangent des mets et qui boivent des breuvages qui leur sont consacrés. Récognitions, IV, 19, P. G., t. i, col. 1322. Les actes qui souillent à la fois l’âme et le corps des chrétiens sont : participare dœmonum menssc, hoc est, immolata deguslare. .. et si quid aliud est quod dœmonibus oblatum est. Ibid., IV, 36, col. 1331.

Les apocryphes Clémentins ajoutent aux idolothytes cinq autres sortes d’aliments qu’ils interdisent comme participations à la table des démons. Ils dépassent donc en sévérité le décret apostolique, et cette plus grande sévérité correspond à leur caractère judéochrétien. Ils ne s’inspirent pas de saint Paul, quoiqu’ils se servent comme lui de l’expression : table des démons. Quelques-unes de leurs interdictions alimentaires pénétrèrent dans la littérature ecclésiastique au cours du ive siècle.

d) Saint Méthode d’Olympe, en Phrygie, a montré qu’aucune distinction entre aliments purs et impurs n’était admise dans le Nouveau Testament, et il a cité principalement la vision de saint Pierre et le concile de Jérusalem. Il reproduit les paroles de saint Jacques et le texte du décret apostolique sans y ajouter un mot d’explication. Sur la distinction des aliments, trad. de N.Bonwetsch, Methodius von Olymp. 1, Schriften, Erlangen, 1891, p. 297. Manifestement, il ne se proposait pas d’interpréter la décision conciliaire et il voulait seulement prouver que les chrétiens n’étaient pas astreints aux lois alimentaires de l’Ancien Testament. 11 ne connaît que trois prohibitions et omet le sang. Bonwetsch traduit : sacrifice des idoles au lieu d’idolothytes. Saint Méthode n’a pas subi l’influence des apocryphes Clémentins.

e) Le 2e canon du concile de Gangres, tenu à une date incertaine vers le milieu du ive siècle, anathématise l’erreur de ceux qui condamnaient les chrétiens pieux, qui mangeaient de la chair, tout en s’abstenant du sang, des idolothytes et des animaux étor.ffés, comme s’ils perdaient pour cela tout espoir de salut. Mansi, Concil., t. ii, col. 1100 ; Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, Paris, 1907, t. i, p. 1033. Ce canon prouve que le décret apostolique avait encore force de loi dans l’Église grecque et qu’il comprenait trois prohibitions alimentaires. (Le canon 9 des canons apostoliques d’Antioclie en comptait trois aussi, mais il nommait la fornication, et non les idolotlivtes. Voir t. ii, col. 1020 ; Hefele, op. cit., t. II, p. 1077.)