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IDOLATRIE, IDOLE — IDOLOTHYTES


faite est le péché de celui qui sait fort bien l’inanité des idoles, et cependant, mù par tin sentiment de haine de Dieu ou par un désir d’obtenir du démon quelque avantage, rend un culte divin à l’idole qu’il sait vaine. L’idolâtrie parfaite, procédant toujours d’une ignorance plus ou moins invincible, est donc, en somme, moins coupable que l’idolâtrie imparfaite, qui procède d’une volonté perverse. L’idolâtrie imparfaite ne comporte que la superstition et non, en soi, l’infidéhté. Cf. S. Alphonse de Liguori, Theologia moralis, t. III, tr. I, c. i, dub. ra, édit. Gaudé, Rome, 1905, t. T, p. 377 ; S. Thomas, loc. cit., a. 2, 3, et ad 1°"" ; S. Augustin, De civitate Dci, t. VI, c. x, P. L., t. XLi, col. 190.

Malice.

L’idolâtrie, soit matérielle, soit formelle,

soit parfaite, soit imparfaite, est, en soi, un très gravepéché. — 1. Elle est sévèrement interdite par le décalogue, et c’est à cause même de cette gravité que Dieu l’a châtiée sévèrement sous l’ancienne loi, voir col. 629, et que la discipline de la primitive Église était à son endroit si dure, voir col. 659 sq. — 2. La malice de ce péché consiste dans une véritable rébellion contre Dieu ; l’idolâtrie dérobe à Dieu le culte qui lui est réservé, pour le transférer à une créature. Rien d’étonnant que l’Écriture l’appelle parfois une » fornication » ou prostitution », Exod., xxxiv, 15 ; Lev., xvii, 7 ; xx, 5, 6 ; Dcut., XXXI, 16 ; Jud., ii. 17 ; viii, 33 ; I Par., v, 25 ; II Par., XXI, 13. La prophétie d’Osée roule sur l’idée de l’idolâtrie d’Israël présentée sous la forme d’une prostitution, 1, 2 ; II, 4-9 ; iii, 1 ; iv, 11-19 ; v, 3-4 ; vi, 10 ; vni, 9 ; IX, 1, 10. CL Jérémie, iii, 1-8 ; xni, 27 ; Ezech., XVI, 15-34 ; xxiiT, 5-43 ; xoii, 7, 8 ; Nahum, iii, 4-6.

« La gravité d’un péché peut se considérer de deux

manières, premièrement par rapport au péché lui-même et en ce sens l’idolâtrie est le plus grand de tous les péchés. Car, comme dans un État la faute la plus grave que puisse commettre un citoyen, c’est de rendre les honneurs royaux à un autre qu’au roi véritable, parce qu’il trouble, autant qu’il est en lui, l’ordre entier du royaume ; de même parmi les péchés que l’on peut commettre contre Dieu, le plus grave consiste à offrir à la créature le culte qui n’est dû qu’au créateur, parce qu’en diminuant par là, autant qu’il est en lui, la puissance divine, l’homme met dans le monde un autre Dieu ; deuxièmement, la gravité du péché peut se considérer par rapport au pécheur. Ainsi on dit plus grave le péché de celui qui pèche sciemment que le péché de celui qui le fait par ignorance. A ce point de vue, rien n’empêche que les hérétiques qui corrompent sciemment la foi qu’ils ont reçue ne pèchent plus grièvement que les idolâtres qui pèchent sans le savoir. De même, il y a aussi d’autres péchés qui peuvent être plus graves, parce qu’il y a dans celui qui les commet plus de mépris. » S. Thomas, [oc. cit., a. 3. — 3. L’idolâtrie même matérielle et simulée est toujours considérée comme un péché grave. En elTet, elle blesse la vertu de religion en accordant extérieurement à une créature un honneur que les autres hommes estiment être réservé â Dieu ; elle est un mensonge complet en matière religieuse, auquel se joint souvent un grave scandale ; enfin, elle constitue un manquement grave contre le précepte de professer sa foi extérieurement. D’où il n’est jamais permis de simuler l’adoration des idoles, même pour sauver sa vie.

.’)" Conséquence relalirc à l’eucharistie. — C’est une idolâtrie matérielle et par conséquent un acte gravement illicite d’exposer sciemment à la vénération des ndèles ou de distribuer n la communion une hostie non consacrée. Prûminer, Mnnuale theologia ; moralis, Fril)0urg-en-I5risgau, 191."), t. ii, p..309-401. Voir les auteurs de théologie morale, aux péchés contre le premier préceple du décalogue.

A. Michel.

    1. IDOLOTHYTES##


IDOLOTHYTES. — I. Nom. IL Dans le

Nouveau Testament. III. Dans la tradition ecclésiastique jusqu’au ve siècle.

I. Nom.

— Le mot idolothytes est la transcription française du mot latin idolothyta, qui est lui-même la transcription du mot grec sJôoiÀoOjte Cet adjectif, employé substantivement, désigne, conformément à son étymologie, les viandes immolées aux idoles, que les païens mangeaient dans les temples des dieux ou à la maison après avoir offert un sacrifice, et qui étaient aussi vendues sur le marché, peut-être pour la nourriture des pauvres. Ce nom composé, comprenant le mot =ïo’.)/, ov, ne pouvait être employé que par des juifs et des chrétiens ; les païens disaient ijpoÔ-jTov, I Cor., x, 28, ou OsoOjtov. Saint Luc, saint Paul et saint Jean ne l’ont pas inventé ; ils ont dû le trouver employé par les juifs hellénistes. La version latine Italique, qui est devenue notre Vulgatc, a conservé le mot grec en trois endroits, I Cor., viii, 7, 10 ; Apoc, ii, 20, que le traducteur ne pouvait rendre par un mot latin équivalent. Ailleurs, elle l’a rendu par des périphrases : immolata simulacrorum, Act., xv, 29 ; idolis immolalum, Act., XXI, 25 ; I Cor., x, 19, 28 ; quæ idolis sacrificantur. I Cor., VIII, 1. Elle ne l’a pas rendu, Apoc, ii, 14. — On lit aussi ce mot, IV Mac, v, 2.

IL Dans le Nouveau Testament. — 1° Dans le décret apostolique, porté à la réunion qu’on est convenu d’appeler le concile de Jérusalem. Act., xv, 1-29. — Ce décret, dont le texte et le sens ont été si àprement discutés en ces derniers temps, surtout en Allemagne, ne présente pour nous aucune difficulté quant au texte original, puisque les deux recensions, orientale et occidentale, du livre des Actes (voir t. i, col. 348) ont ici la même leçon. Nous n’avons donc qu’à élucider le sens du mot i’.’iroAÙIi-j-a. Or, tandis que la plupart des commentateurs l’ont entendu exclusivement des viandes immolées aux idoles et ont considéré le décret comme établissant une règle alimentaire, quelques modernes, s’appuyant sur rinterjirétation de certains écrivains ecclésiastiques de l’Occident, l’entendent de tout le culte idolâtrique et reconnaissent dans les quatre prohibitions du décret une règle morale. Voir Hilgenfeld, dans Zeitsehrift fur wissenscha/llirhe Théologie, 1896, p. 625 sq. ; 1899, p. 138 sq. ; G. Resch, Bas Aposteldecret nach seiner ausserkanonisehen Textgeslalt, dans Texte und Untersuchungen, Leipzig, 1905, t. xxviii, fasc. 3, p. 41-43 ; A. Harnack, Die Apostelgeschichle. Untersuchungen, Leipzig. 1908, p. 194-195 ; Neue Untersuchungen zur Apostclgeschichte und zur Ab/assungszeit der synoptichen Evangelien, Leipzig, 1911, p. 22-24 ; Van Oort, dans Theologische Tijdschri /l, Leyde, 1906, t. xl, p. 97-112 ; K. Lake, The judaistic contronersy and the apostolic council, dans The Church quurterly review, Londres. 1911. t. Lxxi, p. 345-370. Nous parlerons plus loin des Pères occidentaux. Ici, nous n’avons qu’à déterminer le sens du mot iiôtohiih-y. d’ajirès le contexte du livre des Actes.

Quelques chrétiens de Jérusalem venus à Antioche prétendaient que les païens convertis ne pouvaient être sauvés s’ils ne recevaient la circoncision imposée par la loi de Moïse. Paul et Earnabé leur répondirent vivement, et tous convinrent de référer la question à l’Église de.lérusaleni. La question fut nettement posée devant les apôtres et les anciens : Les païens convertis doivent-ils être circoncis et observer la loi de Moïse ? La discussion fut ardente et longue. Saint Pierre trancha le débat : Dieu a communiqué le Saint-Esprit aux gentils qui avaient reçu l’I-Aangile et a purifié leurs cœurs jiar la toi, sans rien exiger davantage. Les judéo-chrétiens leur imiioseront-ils un joug, celui de la loi de Moïse, que leurs pères et eux-mêmes n’ont pu porter ? C’est par la grâce du Seigneur Jésus