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IDOLATRIE, IDOLE


tant qu’ils aient été bons et iionnêtes, de meilleurs qu’eux, Socrate, Thémistocle, Aristide, Alexandre, Polycrate, Démosthène, Caton, Scipion, etc., eussent mérité plus qu’eux les honneurs divins. ApologcL, c. XI, col. 335. Cf. Ad naliones, t. II, n. 8, 12, col. 595, 601. — c. La raison Ihéologique. — Par cette raison, les Pères arrivent à la cause première du péché d’idolâtrie. L’idolâtrie est le résultat de la supercherie intéressée et de la malice des démons qui, par là, attirent les hommes à eux, et se substituent eux-mêmes aux hommes divinisés pour s’identifier avec les idoles et accaparer les honneurs divins à leur profit. Cette explication, loin de contredire l’exphcation évhémériste, la complète heureusement. Voir Athénagore, Legatio, n. 24-27, col. 948-953. L’instrument du règne des démons sur le monde est principalement l’idolâtrie. Justin, Apol., i, n. 5, col. 336 ; cf. n. 9, 25, 34, col. 340, 365, 408-409 ; l’auteur du De monarchia, n. 1, col. 313 ; Athénagore, loc. cit. ; Théophile, Ad Aut., t. I, n. 10, col. 1040. Pour quelques Pères, l’idolâtrie a commencé au paradis terrestre. Tatien, Oraiio, n. 7, col. 829 (voir cependant la note 64 dans l’édition de Migne) ; l’auteur de la Cohortalio, n. 21, col. 277 (même remarque de l’annotateur, note 64) ; Théophile, Ad Aul., t. II, n. 28, col. 1096-1097. C’est pour jeter les hommes dans le péché et les détourner loin de Dieu que les démons cherchent ainsi à les tromper, S. Justin, Apol., i, n. 14, 58, col. 348, 416 ; de là, ils inspirent les fables, n. 54, 64 ; Dial. mm Tryphone, n. 70, col. 408, 425, 640 ; suggèrent le mensonge aux poètes et aux historiens. Théophile, Ad Autolycum, t. II, n. 8, col. 1061 ; cf. Minucius Félix, Odavius, c. xxvi, col. 322. Cf. Apologistes (Les Pérès), t. i, col. 1590-1591. Pour aboutir à leurs fins, ils emploient la magie et sont les auteurs des prodiges qui ont lieu autour des idoles. Cf. Minucius Félix, Odavius, c. xxvii, col. 324 ; Tertullien, Apologet., c. xxii, col. 408 ; Athénagore, Legatio, n. 27, col. 952-953. Tatien rappelle que les démons n’ont inventé l’idolâtrie que pour séduire les hommes, Oraiio, n. 16, 17, 18, col. 840, 844, 848 ; ils « volent » la divinité, n. 12, col. 832 ; l’astrologie est une conséquence de l’idolâtrie, n. 7-12, col. 820-832 ; voir la réfutation de l’astrologie, n. 19, col. 848-849. Les démons peuvent aussi par leur malice provoquer des maladies et des guérisons ; la médecine elle-même est sujette à caution, n. 18, col. 847. Finalement, le culte les idoles, c’est le culte des démons. Justin, Apol., i, n. 5, 21, col. 336,.360. Ces traits de la théologie démoniaque des apologistes, relativement à l’idolàlrie, se trouvent condensés chez Tertullien. Nuire aux hommes est le but de toutes leurs impostures, de tous les prodigesparlesquels ils essaient d’accréditer les faux dieux. Apologet., c. xxi-xxii ; Dcanima, c. lvii, P. L.,

I. ii, col 747. Toutes les formes de divination leur sont bonnes : évocation des morts, sacrifices d’enfants, prestiges, chèvres parlantes, tables parlantes, Apologet.,

II. 23, col. 408 : les démons veulent se faire passer pour des dieux grâce à la divination et par des artifices perfides qui empruntent le masque de la religion. Ibid. ; cf. d’Alès, La théologie de Tertullien, Paris, 1905, p. 158. Sur le spiritisme chez TerluHien, voir Mgr Freppel, Tertullien, Paris, 1871, t. ii, leçon xxxiv, p. 368373.

2. Défense direde du christianisme.

Cette défense, relativement à l’idolâtrie, prit, sous la plume des apologistes, trois formes différentes. — a) Le christianisme n’est pas lui-même une idolâtrie. — Les accusations portaient sur trois chefs principaux : adoration d’une tête dànc, adoration de la croix, adoration du soleil. La première calomnie est réfutée par Minucius Félix, Odauius, c. xxviii, col. 328 ; la méthode d’argumentation de l’apologiste est simple :

personne ne peut être assez sot pour attribuer un pareil culte aux chrétiens, sinon ceux-là mêmes qui sont assez sots pour honorer des animaux. Le même auteur explique, c. xixx, ce qu’est l’adoration de la croix chez les chrétiens : il rappelle que le signe de la croix, par lui-même, est déjà suggéré par la raison naturelle et comme la base même de la religion des païens. C’est en attaquant pareillement la religion païenne, avec une verve et une ironie incomparables, que Tertullien détend le culte de la croix. Apologet., c. XVI, col. 364 ; Ad naliones, t. I, n. 12, col. 601. C’est aussi par le même procédé indirect que.luslin aborde ce même sujet. Apol., i, n. 55, col. 412. Voir Croix (Adoration de la), t. iii, col. 2347-2348. L’accusation relative au culte du soleil se trouve chez Tertullien, Apologet., c. xv, col. 371 : « Si nous fêtons le soleil — c’est d’ailleurs pour une tout autre raison que pour honorer le soleil — nous venons après ceux qui consacrent le jour de Saturne à manger et à ne rien faire, et qui sont eux-mêmes les imitateurs inconscients d’une coutume juive. » — b) Le chrétien, en désertant le culte des idoles nationales, ne commet aucune faute contre la patrie on la société. — La multiplicité des dieux amène fatalement les citoyens à ne pas adorer partout les mêmes divinités : n Chacun a son dieu, en sorte qu’ils (les païens) sont tous impies les uns pour les autres… ; une même chose est regardée ici comme un dieu, ailleurs comme un animal, là comme une victime. » Justin, Apol., i, n. 24 ; cf. Apol., II, n. 14-15, col. 364-365, 468. Les chrétiens ne demandent pour leur culte que la tolérance accordée aux divers cultes nationaux, Athénagore, Legatio, n. 1, col. 889 sq. ; leur soi-disant impiété vis-à-vis des idoles n’égale pas celle des philosophes, qui " détruisent publiquement vos dieux, attaquent vos superstitions, et que cependant vous applaudissez ». Tertullien, Apologet., c. xlvi, col. 500 ; cf. Athénagore, Legatio, n. 7, col. 904 ; Tatien, Oratio, n. 25, col. 860861. Après avoir ainsi réclamé le droit commun et protesté que les chrétiens sont prêts à tout souffrir plutôt que de renier leur foi, Justin, Apol., i, n. 57 ; Tatien, Oratio, n. 4, col. 413, 813 ; Tertullien, Apologet., c. L, col. 530, les apologistes proclament l’entière loyauté des chrétiens envers l’empire, leurs vertus civiques et leur soumission aux lois justes qui, seules, peuvent obliger la conscience. Tertullien, Apologet., c. iv-vii, col. 283-311 ; cf. Tumiel, Tertullien, p. 17-18. Voir 1. 1, col. 1595. Un point particulier devait attirer l’attention des apologistes, celui des honneurs divins que les empereurs voulaient se faire rendre par leurs sujets. La doctrine des apologistes est, sur ce point, d’une fermeté parfaite. Pour TertuUien, l’apothéose impériale est une flatterie honteuse et funeste, une basse adulation, un sacrilège ; ceux qui adorent l’empereur sont ses pires ennemis, Apologet., c. xxxiii-xxxiv, col. 451, 454 ; les chrétiens prient pour l’empereur, " demandant pour lui une longue vie, un empire assuré, une maison tranquille, des armées vaillantes, un sénat fidèle, un peuple vertueux, une paix universelle, en un mot, tout ce qu’il peut désirer comme homme et comme empereur », c. xxx ; cf. c. xxxi-xxxii, col. 441, 446, 447. Mais les chrétiens doivent refuser de rendre un culte divin à l’empereur : on ne doit l’appeler ni Dieu, ni Seigneur, ce serait une usurpation contre la majesté divine, c. xxxm-xxxiv, col. 448 sq. Sur le même sujet, voir Justin, Apol., i, n. 17, col. 353 ; Théophile, Ad Aul., l. l, n. 11, col. 1014 ; Athénagore, Legatio, n. 37, col. 972. — c) En adorant un seul Dieu, les chrétiens, d’accord avec les philosophes les meilleurs, professent une vérité éminemment rationnelle. — Voir .poLOGisTES, t. I, col. 1591 ; Dieu, t. iii, col. 1028 sq. L’attitude des apologistes, à l’égard des philosophes, dans la lutte qu’ils onlrenrennent en faveur du mono