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    1. IDOLATRIE##


IDOLATRIE, IDOLE

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Les Péresopolo’gisics.

1. Critique directe de

r idolâtrie. — La critique de l’idolâtrie n’est pas l’apanage des Pères de l’Église ; les psaumes en contiennent plus d’un exemple : cf. Ps. xxxix (xl), 5 ; cxiii (cxv), 12(4) ; elle avait été l’un des thèmes favoris des apologistes judéo-alexandrins. Le Livre de la Sagesse, en particulier, contient des criliques mordantes de l’idolâtrie ; les traits des plus vifs dont les Pères apologistes accableront le culte des fausses divinités semblent empruntés à ce livre inspiré. Cf. Schiirer, Gcschiehte des jUdischen Volkes, Leipzig, 1898, t. iii, p. 414-416. Souvent donc les Pères apologistes suivent les traces des judéo-alexandrins. Les arguments directs dont ils se servent, nonobstant les variantes de pure forme, peuvent se grouper sous trois chefs : a Mes idoles sont des dieux de bois, de pierre, êtres inanimés, de matière vile et ordinaire, façonnés de main d’homme. S. Justin, Apot., i, n. 9. P. G., t. VI, col..340 ; JDi’aI. cum Tryphunc, n. 55, col. 596 ; Minucius Félix, Oclainus, c. xxni, P.L., t. iii, col. 311 ; Théophile d’Antioche, Ad Aut., t. II, n. 36, P. G., t. VI, col. 1113. Sur cette constatation de fait, les apologistes exercent leur verve ; lire en particulier Tertullien raillant les dieux païens soumis, dans leur fabrication, à des tourments analogues à ceux que les persécuteurs infligent aux chrétiens. Apologct., c. XII, P. L., t. i, col. 337. Ces dieux représentent » des arbres, des fleurs, des rats, des chats, des crocodiles et d’autres animaux. Et ce ne sont pas les mêmes qui sont adorés par tous : chacun a son dieu, en sorte qu’ils sont tous impies les uns pour les autres, parce qu’ils n’ont pas le même culte ». S. Justin, ApoL, I, n. 24, P. G., t. vi, col. 364-365 ; cf. Apol., II, n, 14, 15, col. 468, 469. La multiplicité des dieux rend ridicule l’idolâtrie païenne, qui varie selon les nations et les villes. Athénagore, Legatio pro chris iianis, n. 14, col. 916, 917. Les rites idolâtriques sont par là même ridicules et grotesques, Minucius Félix, Octavius, c. xxiv, col. 312 ; Tertullien, Apologet., c. xii, col. 342 ; Tatien, Oratio adversus græcos, n. 29, P. G., t. VI, col. 865, 868 ; cf. n. 4, col. 813. Les dieux sont ainsi traités par l’homme avec impiété, sacrilège, irrévérence. TertuUien, Apologet., loc. cit. — b) Les légendes relatives à l’origine, à la génération des dieux suffiraient à prouver l’inanité du culte des idoles : ce qui éclate en ces légendes, c’est surtout le caractère profondément immoral de toutes les mythologies disparates dont le paganisme officiel était fait. Aristide, dans son Discours apologétique, montre principalement le ridicule des reUgions païennes ; il critique l’idolâtrie grossière des barbares, le culte des éléments, introduit par les philosophes, la mythologie anthropomorphique des Grecs et particulièrement le culte des Égyptiens, n. 3-14 ; il relève avec soin les conséquences antimorales découlant de tous les méfaits dont les dieux se sont rendus coupables. Voir spécialement, n. 8. 13. Cf. Pitra, Analecta sacra, Paris, 1883, t. iv, p. 282-286 ; P. G., t. xcvi, col. 1108-1124. Saint Justin met en opposition la pureté chrétienne et l’immoralité des mythes païens. Apol., I, n. 25, col. 365.Tatien multiplie les détails sur l’immoraUté de ces mythes et sur l’usage ridicule de l’astrologie, Oratio adversus græcos, n. 8, 9, 10, col. 831838, sur les métamorphoses fabuleuses des dieux, n. 21, col. 855 ; cf. n. 25, col. 861. Athénagore fait une argumentation en règle contre le polythéisme, raillant la multiplicité des dieux, et discutant le principe même de la mythologie, qui accorde aux dieux une origine analogue à la nôtre. Legatio, n. 14, 18-19, col. 916 sq., 925 sq. Cette origine est récente, n. 17, col. 921 sq., et démontre qu’ils ne sont pas Dieu, n. 1 8, r Être divin ne pouvant avoir de commencement. Les détails de cette mythologie absurde sont monstrueux et révoltants, tout comme les dieux eux-mêmes

dans la conduite qu’on leur prête, n. 20-21, col. 929936. A son tour, Théophile marque le caractère absurde, inconvenant, immoral des légendes reUgieuses de la Grèce et de l’Egypte, Ad AuL, l. I, n. 9-10, col. 1037, 1040 ; cf. t. III, n. 3, 8, col. 1125, 1133 ; il ridicuUse les cosmogonies d’Homère et d’Hésiode, t. II, n. 4-8, col. 1052-1064, et montre qu’il est aussi insensé d’accepter de pareilles fables que de se livrer aux pratiques de l’idolâtrie populaire, n. 2, 3, col. 10481049. Cf. Cohortatio ad græcos, n. 2, P. G., t. vi, col. 241-245 ; De monarchia, n. 0, P. G-, t. vi, col. 324325 ; Minucius Félix, Octavius, c. xxii-xxiiii, t. iii, col. 306 sq. Présentée sous cet aspect, l’idolâtrie révolte la raison et offense la divinité. S. Justin, Apol., 1, n. 9, col. 340. — c) En troisième lieu, les Pères apologistes démontrent l’inanité de l’idolâtrie par les explications qu’ils fournissent relativement à l’origine du cvflte des faux dieux. Ces explications démontrent avec évidence que ce culte ne repose que sur l’imagination ou la malice des hommes. Les Pères, en effet, nous placent en face de trois explications possibles de l’idolâtrie : a. l’explication stoïcienne : les dieux ne sont que des personnifications des forces de la nature. Dieu est la personnification du feu, Justin, ApoZ., i, n. 20, col. 358 ; Athénagore, Legatio, n. 6, col. 904 ; ce feu, répandu à travers la matière cosmique, prend différents noms suivant les différentes parties de la matière vivifiées par lui. Ibid. ; cf. n. 22, col. 976. Mais cette explication des dieux est vaine : les stoïciens, en somme, ne reconnaissent qu’c( un Dieu, éternel et inengendré, et tout changement de la matière constitue un corps ». L’esprit de Dieu pénétrant la matière recevrait différents noms selon les changements de la matière elle-même, mais " la divinité est immortelle, immobile, immuable i. Ibid. ; cf. Tatien, Oratio, n. 21, col. 855 ; Tertullien, Ad nationes, t. II, n. 2 sq., P. L., t. i, col. 588. — b. L’évhémérisme. — Les dieux ne sont que des hommes, rois ou autres personnages illustres, que l’on a divinisés. C’est l’explication généralement admise : elle favorise singuUèrement la thèse des apologistes. Minucius Félix, Octavius, c. xx, xxi, xxiii, P. L., t. iii, col. 297, 300, 310 ; Athénagore, Legatio, n. 18, 19, 26, 28, 29, P. G., t. vi, col. 925, 929, 949-950, 953, 957 ; Théophile, Ad Autolycum, t. I, n. 19 ; L II, n. 2, col. 1037, 1048 ; l’auteur de la Cohortatio ad græcos, n. 21, 36, 37, col. 424, sq., 305, 308 ; du De monarchia, n. 6, col. 325 ; Tertullien, Apologet., c. x, xi, col. 328 sq. Athénagore, Legatio, 28, col. 953, démontre par l’histoire que les dieux ont été d’abord des hommes ; il fait appel, sur ce point, n. 29, col. 957, à l’autorité des poètes et recherche, n. 30, col. 960, pour quelles causes la divinité a été attribuée à certains individus. Défendant la même thèse, Minucius Félix, loc. cit., précise le processus de cette divinisation : » A l’égard des dieux, nos pères, dit-il, se sont montrés imprévoyants, crédules et naïfs. Ils honoraient religieusement leurs rois, ils désiraient après leur mort les faire revivre dans des images et avaient plaisir à conserver leur souvenir dans des statues ; ce qui n’était tout d’abord qu’une consolation prit bientôt un caractère reUgieux. Aussi, avant que le monde se fût ouvert parle commerce…, chaque nation adorait son fondateur, un chef remarquable, une reine chaste, plus forte que son sexe, l’auteur de quelque art ou bienfait, comme on honore un citoyen bienfaisant. Ainsi on donnait une récompense aux morts et un exemple aux vivants », c. xx, col. 299. Tertullien, admettant, lui aussi, la thèse de l’évhémérisme, nie avec véhémence que les dieux aient mérité l’honneur qu’on leur a fait en les élevant au ciel. On n’en trouve pas un qui soit exempt de reproche ou de faute, à moins de nier son existence » ; mais, même en admet-