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HYTOSTATIQUE (UNION) — II Y l’OTIIÈQUE

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    1. IDOLATRIE##


IDOLATRIE, IDOLE

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hommes sont toujours empreintes d’immoralité ; les dieux se montrent souvent injustes, orgueilleux, impudiques, cruels. Rien de tout cola dans les relations de Dieu avec les premiers hommes : la divinité apparaît constamment exempte de toute faute, de toute imperfection capable de contredire l’idée de haute sainteté qui s’attache naturellement à Dieu. Le but des apparitions et interventions des dieux du paj^anisme est presque toujours un but d’égoïsme, de satisfaction personnelle, pour le dieu qui s’approche de l’homme. Dans le livre sacré, rien de cela. Si on considère les relations de Dieu à l’éfiard de l’homme, non pas seulement dans le cadre étroit de la Genèse, mais en fonction de toute l’histoire du peuple de Dieu, il apparaît clairement que les multiples manifestations de la divinité sont dirigées par une providence supérieure, vers une manifestation dernière et suprême, celle du Verbe divin, se faisant homme pour racheter l’humanité, dont la chute est inscrite a la première page de la Bible. Voir Incarnation. Il est donc souverainement injuste et antiscientifique de prendre prétexte de quelques ressemblances lointaines et de pure forme, pour en déduire une dépendance substantielle sur le fond même des récits, dépendance qui, si elle était réelle, n’eût pas manqué de se traduire par des vestiges contredisant précisément les hautes leçons de morahté et de sagesse providentielle que nous offre la Bible. Les anthropomorphismes, qui paraissent tant répugner à la critique, s’ejepliquent cependant fort bien, si l’on applique aux premières pages de nos saints Livres les règles d’une critique sage et raisonnable. C’est afin de parler aux races primitives un langage accessible et imagé que les auteurs inspirés se sont servi, en parlant de l’activité divine, de l’anthropomoqihisme. Voir t. i, col. 1369. Ni les auteurs, ni les lecteurs, n’ont jamais supposé qu’il faillit prendre ces expressions à la lettre. « Il ne faut pas juger, écrit à ce sujet le P. Brucker, de ce parler primitif par notre goût moderne, qui facilement le trouvera trop cru. Mais encore, si nous sommes tentés d’en être choqués, rappelons-nous que, sans nous en apercevoir, nous parlons souvent de Dieu d’une manière qui, en soi, n’est guère moins impropre ; par exemple, quand nous disons que Dieu est irrité, ou qu’il se laisse toucher. C’est que nous ne pouvons parler des actes divins que par analogie avec des opérations humaines, partiellement matérielles et sensibles ; de 1 ; ’), dans tout ce que nous disons sur ce sujet, l’anthropomorphisme plus ou moins accentué est inévitable. » Art. cit., col. 297. — c) L’argument tiré de la comparaison du monothéisme d’Israël avec les religions assyro-babyloniennes, sur le point précis de l’antériorité du monothéisme babylonien et sur l’emprunt qu’en auraient fait les Hébreux, demanderait à lui seul une longue étude. On se contentera de résumer ici les conclusions principales. — a. Un des arguments des assyriologues Delitzsch, Saj’ce, Pinches, consiste à affirmer que le nom de Jahvé était connu à Babylone dès l’époque d’Hammourabi, vingt siècles avant Jésus-Christ. On rapproche du nom de Jahvé, certains noms où, peut-être, Jaou ; forme abrégée de Jahvé, entre en composition : la—PI-ilu, la-u-um-ilu. Voir les discussions philologiques dans Dehtzsch, Babel und Bibel, Leipzig, 1902, p. 47 ; Zweiter Vortrag ûber Babel und Bibel, Stuttgart, 1903, p. 20 ; Sayce et Hommel, The expository times, Edimbourg, t. IX, p. 522 ; t. X, p. 42 ; t. xi, p. 270 ; t. xvii, p. 26 ; t. xviii, p. 332 ; t. xix, passirn ; cf. également, Delitzsch, Assyrische Lesestûcke, 3e édit., 1885, p. 42, syllab. a, col. 1, 13-16 ; Pinches, dans Proceedings of the Society of liie bibl. archxologia, 1885, t. viii, p. 27-28 ; 1892, t. xv, p. 13-15 ; Hommel, Die altisrælitische Veberlieferung in inschri/tlischer Be leuchtunrj, Munich, 1897, p. 144, 225. M. Robert William Rogers estime que le nom de Jaou ou Jahvé était en usage chez les Babyloniens de 1500 à 2000 avant Jésus-Christ, et que, par conséquent, le nom de Jahvé n’est pas la propriété des Hébreux. (Il s’agit d’ailleurs du nom seulement, la transcendance de l’idée de Dieu chez les Hébreux n’étant pas mise en cause par cet auteur.) The religion oj Babylonia and Assyria, especially in its relations to Israël, Londres, 1908, p. 94, 95, 97. Mais cette existence même du nom de Jahvé chez les Assyriens est considérée comme problématique par d’autres assyriologues distingués, Lehinann, Zimmern, Bezold, Hilprecht, Ranke, Daiches. Voir Zeitschrijt jûr Assyriologie und verwaiidte Gebiete, Strasbourg, t. xvi, p. 403, 415 ; t. xvir, p. 271 ; t. xxii, p. 125 ; Zimmern, Die Keilinschriften und dus Aile Testament, de E. Schrader, Berlin, 1904, p. 468 ; Ranke, Early Babylonian personal names [Hammuraby rf(//î « s/i/], Londres, 1905, p. 234, note 5. Cf. Bezold, Die orientalischen Rsligioncn, Berlin, 1906 ; Sellin, Die alttestamentliche Religion in Rahmen der andern altorientalischen, Leipzig, 1908, p. 01. On consultera aussi le P. Lagrange, Revue biblique, 1903, p. 376 ; 1907, p. 383-386 ; et le P. Condainin, art. Babylone et la Bible, dans le Dictionnaire apologétique de la foi catholique, t. i. Incertitude : telle est la meilleure conclusion à tirer de comparaisons où souvent la méthode procède a priori et trouve ce qu’elle veut trouver. « On n’a pas jusqu’ici de raison suÇfisante, écrit le P. Prat, pour refuser aux juifs la propriété exclusive du nom de Jéhovali. Mais on peut admettre sans inconvénient qu’avant la révélation de l’Horeb, Dieu était désigné dans la famille des patriarches sous un nom à peu près semblable, qu’il suffisait de modifier légèrement pour lui donner le sens profond et absolu qui le rend incommunicable… Rien n’oblige absolument à reconnaître avant Moïsel’existence d’un nom divin identique ou analogue à Jéhovah, mais cette hypothèse est probable. La seule chose certaine, c’est que Dieu a révélé à Moïse quel est son nom incommunicable et lui en a expliqué le sens incompris jusqu’alors. » Jéhovah, dans le Dictionnaire de la Bible de M. Vigouroux, t. iii, col. 1230. Cette hypothèse probable devient scientifiquement un indice de la connaissance primitive d’un Dieu unique dans l’humanité. — — b. L’étude du terme’El, employé dans les religions sémitiques pour désigner la divinité, cf. Lagrange, El et lahvé, dans la Revue biblique, 1903, p. 362, nous amène à formuler une conclusion identique. Le terme chaldéen ilii, dieu, que l’on peut facilement rapprocher de’êl, exprimerait-il la divinité suprême ? Dehtzsch l’insinue, en rapportant plusieurs noms propres de l’époque de Hammourabi, composés de ilu. Mais cette prétention a toujours paru exagérée. Voir Condamin, dans Les Études religieuses, t. xciii, p. 754. Ilu est bien plutôt l’expression qui désigne le dieu local, ainsi que l’affirmait au congrès des religions, à Oxford, M. Flinders Pétris, Transactions of the third international congress for the history of religions, 1908, t. i, p. 188. Une remarque du P. Lagrange suffit à détruire l’argumentation de Delitzsch : « Lorsque l’âme se trouve en présence de son dieu, ce dieu fût-il innommé ou quand bien même on indiquerait sa généalogie, elle lui prodigue toutes les épithètes qui conviennent à la divinité et le met sans hésiter au-dessus de tous les autres. » Études sur les religions sémitiques, Paris, 1905, p. 21. A cause de cela, un dieu simplement local peut être salué et honoré comme le dieu suprême. Et la raison dernière de l’observation du P. Lagrange témoignera en faveur de la priorité du monothéisme sur l’idolâtrie. Voir plus loin.

— c. Les documents qu’on apporte en faveur de-