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HYTOSTATIQUE (UNION) — II Y l’OTIIÈQUE

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    1. IDOLATRIE##


IDOLATRIE, IDOLE

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col. G51-C53. La théologio du moyen âge reconnaît expressément les deux formes de l’idolâtrie, celle qui correspond au concept plus relevé des philosophes, celle qui traduit le sentiment populaire. Cf. S. Thomas, Sum. IheoL, II" 11^, q. xciv, a. 1.

II. L’idolâtrie et tA religion primitive. — La thèse rationaliste et évolutionniste suppose que l’idolâtrie représente, dans l’histoire des religions, une étape antérieure au monothéisme. La religion primitive et plus particulièrement le monothéisme des patriarches seraient donc une transposition d’idées et de culte relativement récents dans le récit d’événements appartenant à des époques bien antérieures. Le problème d’ailleurs déborde de beaucoup le cadre étroit de la question de l’idolâtrie ; c’est en réalité toute la question de l’authenticité des premiers livres de la Bible qui est mise en jeu. On assure donc que les patriarches hébreux étaient païens comme les autres peuplades de la Chaldée. A l’instar des nations avoisinantes, ils avaient un dieu national, dont le culte n’était nullement exclusif. Ce n’est que plus tard, vers le vine siècle, que le Code de l’alliance proscrivit les dieux étrangers. Les prophètes accentuèrent la réprobation de l’idolâtrie et peu à peu le culte des dieux fit place au monothéisme. La thèse générale de l’évolutionnisme religieux, mise en avant par les partisans de l’animisme, du préanimisme, du mânisme, du totémisme, et de toutes les autres formes du naturisme, trouve ainsi, dans l’histoire des origines du peuple de Dieu, une simple application particuhère. La religion d’Israël est une religion comme une autre, suivant les mêmes lois de développement et de perfectionnement qui ont présidé à l’évolution des autres cultes. Cf. Kuenen, De Godsdienst van Israël, Haarlem, 1869-1870, t. i, p. 5-13 ; Tiele, Manuel de l’histoire des religions, Paris, 1880, p. 84 ; Wellhausen, Reste arabischen Heidentums, Berlin, 1897, p. 141 ; R. Smith, Lectures on the religion of Ihe Sémites, Londres, 1894, p. 3. Depuis ces premières affirmations, basées sur l’interprétation étroite et la générahsation injustifiée de quelques faits particuliers, d’autres auteurs ont voulu trouver une preuve décisive de la théorie évolutionniste appliquée aux Hébreux dans les emprunts que la Bible aurait faits aux religions assj’ro-babyloniennes. Le monothéisme serait d’importation babylonienne, et la Chaldée aurait corrigé l’idolàlrie des Hébreux pour la perfectionner dans le sens monothéiste. Telle est la thèse : thèse, empressons-nous d’ajwuter, cjui n’est rien moins que prouvée et dont la faiblesse évidente laisse intactes les affirmations catholiques touchant l’antériorité du monothéisme dans la religion primitive sur l’idolâtrie. Il n’entre pas dans le cadre de cet article de reprendre et de discuter une à une les affirmations rationalistes et évolutionnistes. Nous rappellerons’simplement les conclusions qui importent à l’affirmation théologique d’une religion’primitive monothéiste et que Dieu conserva plus spécialement dans les familles patriarcales du peuple qu’il s’était choisi.

1° Affirmations catholiques relatives à l’antériorité du monothéisme sur l’idolâtrie. — 1. L’ordre surna-’turel primitif : la révélation. — Il est de foi que le premier homme fut élevé à l’état de grâce, voir t. i, col. 372, et plus probablement dès l’instant de sa création, col. 373. La conséquence de cette élévation fut qu’Adam posséda « les vertus infuses, théologales et morales, qui forment le noble et inséparable cortège de la grâce sanctifiante. En particulier, la foi s’implanta dans cette âme… », col. 374. Rom., v, 14, 15 ; I Cor., XII, 22 ; Eph., iv, 23-24 ; Col., iii, 9, 10. L’élévation à l’état surnaturel est supposée par le concile d’Orange, can. 1, Denzinger-Bannwart, n. 174, et clairement enseignée par le concile de Trente, sess. V, Decr. de

peccaio originali, can. 1, 2, ibid., n. 788, 789. La tradition reconnaît expressément cette vérité de foi. Voir les textes dans Palmieri, Tractatus de ordine supernaturali, Pralo, 1910, th. xix. L’élévation à l’état surnaturel, qui comporte la foi, suppose nécessairement la connaissance des vérités primordiales, dont parle l’Épître aux Hébreux, xi, 6. Mais ce n’est pas seulement a priori qu’on peut déterminer le contenu de la révélation primitive faite à Adam, dans le paradis terrestre. Les trois premiers chapitres de la Genèse contiennent à ce sujet de précieuses indications. Dieu s’y révèle à l’égard d’Adam et d’Eve comme « le maître tout-puissant et le créateur de toutes choses et en particulier de l’homme. Il est élevé au-dessus de toute caducité ; il connaît le bien et le mal, et cependant sa sainteté demeure immuable. Il est le législateur de l’ordre moral, son juge et son vengeur… Dieu lui-même veut être la fin de la vie humaine, fin située bien au delà de ce que peuvent atteindre les forces naturelles. Il entend élever la nature humaine jusqu’à sa propre ressemblance, pourvu que l’homme consente à ne tenir que de lui, dans l’humiÛté et l’amour, cet inestimable don. Et après la chute, en sa miséricorde, il ajoute cette vérité consolante, qui surpassait tout ce que l’homme pouvait concevoir et espérer : Dieu ne renonce pas à être la fin surnaturelle de l’humanité. Il se fait bien plutôt la voie elle-même qui la doit conduire au but. Dieu va venir en personne et comme rédempteur. » G. Schmidt, La révéledion primitive et les données actuelles de la science, trad. franc., Paris, 1914, p. 63, 65. La connaissance de ces vérités dut être d’autant plus claire chez le premier homme, que son intelligence n’était pas encore obscurcie par les conséquences du péché ; et même, après la chute, lorsque cet obscurcissement se produisit, il ne fut pas tel que ces vérités en aient subi, dans l’esprit de l’homme primitif, une éclipse complète. La lumière qu’elles projetaient était encore assez forte pour éclairer la route de l’humanité pendant de longues années. Les vestiges de cette révélation primitive se retrouvent chez tous les peuples, si on veut bien considérer sans isarti pris les croyances religieuses par eux professées.

2. L’ordre naturel primitif : la raison. — Dans l’ordre naturel (préternaturel quant au mode), il est théologiquement certain qu’Adam fut créé avec la science correspondant à l’état parfait dans lequel il fut appelé à la vie. Voir Adam, t. i, col. 370-371. L’existence de cette science, infuse per accidens, est attestée par Eccli., xvii, 1 sq., et suggérée par Gen., II, 19, 23. Elle est affirmée dans la tradition, principalement dans l’interprétation de Gen., i, 26, 27. En commentant le verset : Faciamus hominem ad imagincm et similitudinem nostram, les Pères l’interprètent parfois de la ressemblance par la grâce ; mais cette interprétation, familière à saint Augustin, De Trinilale, t. XIV, c. xix, P. L., t. xlii, col. 1055 ; De Gen. ad litkram, t. III, c. xx, P. L., t. xxxiv, col. 292, ne peut être, malgré l’opinion de Corluy, Spicilegium dogmatico-biblicum, Gand, 1884, t. i, p. 207 sq., considérée comme l’opinion commune des Pères. Cette opinion commune est que l’homme a été créé par Dieu à son image et ressemblance en raison principalement de l’âme spirituelle et intelligente. Petau, De opifice sex dierum, t. II, c. iii, n. 4 sq. ; c. iv. Cf. de Hummelauer, In Genesim, Paris, 1895, p. 107 sq. Cette ressemblance avec Dieu, en raison de l’intelligence dont il est doué, suppose dans l’homme primitif le moyen d’acquérir rapidement la science nécessaire, si toutefois cette science n’était déjà pas communiquée par Dieu dans la création même : le passage d’Eccli., xvii, 1 sq., que l’on invoque en faveur d’une science infuse per accidens chez le premier homme