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IDOLATRIE, IDOLE


32, 34, 38 ; iii, 1, 2, 3, 5, 7, 10, 12, 14, 15, 18, 19 (dans la partie araméenne du texte).

Poivr des détails plus complets, voir F. Prat, art. Idole, dans le Dictionnaire de la Bible, de M. Vigoureux, t. iii, col. 816-825 ; Hagen, Lexicon biblicum, Paris, 1907, au mot Idololatria, t. ii, col. 623-630.

3. De ces textes, il apparaît bien que le mot idole, dans l’Écriture, n’a pas un sens aussi exclusif que l’affirme Bellarmin, Controversiee, De Ecclesia triumphante, c. v. Tandis que le grand controversiste assure que l’Écriture « n’attribue jamais le nom d’idole à la représentation d’un objet réel, mais seulement aux images païennes des faux dieux qui n’existaient pas », il semble plus exact de reconnaître que le mot idole se dit, dans l’Écriture, « des êtres réels ou imaginaires qui reçoivent les honneurs divins, même sans aucune représentation matérielle ». F. Prat, art. cit., col. 816. Sans doute, aucun texte de la Bible n’accorde aux idoles une nature divine et « les dieux des nations ne sont pas des dieux, mais de la pierre et du bois, l’œuTe de la main des hommes ». Is., xxxvii, 19 ; cf. IV Reg., xix, 18. Mais les écrivains sacrés reconnaissent parfois que, sous les emblèmes des idoles, les hommes adorent les démons, désignés ordinairement par le mot sèdtm. Deut, xxxii, 17 ; cf. I Cor., x, 20 ; Ps. cvi (cv), 37 ; Baruch, iv, 7 ; Ps. xcvi (xcv), 5. Toutefois, l’usage a donné, au terme idole, une signification plus précise et plus stricte : l’idole est « l’image, la statue ou le symbole d’une fausse divinité ». Dans cette définition, les mots : image, statue, symbole, sont l’élément générique du concept d’idole ; la fausse divinité, en insistant sur l’épithète « fausse », en forme l’élément spécifique. Conséquemment, le mot sVo’jjXov est assez fréquemment employé avec la seule signification générique d’image ou de symbole : il est alors synonyme d’î’fy.oV/, de oaoifi) ; j.a, de (jT| ; j.s(ov. On le rencontre avec ce sens sous la plume des Pères de l’Église : sïofoÀov toCi y.iXrrj, imago, effigies, specics boni. Voir quelques exemples dans Suicer, op. cit., t. I, au mot sVo’oÀov. Spécifiquement, l’idole implique la représentation d’une divinité fausse à laquelle on rend le culte réservé au vrai Dieu : on a vu ce sens, dans la sainte Écriture, attaché aux mots maskit, massebdb, massekâh, nésék, sémél, pésél, rapprochés des mots qui signifient directement l’inanité, le mensonge, la vanité des idoles, âoén, ’clîl, hébél, sélém, kezâbtm, lô’-ijô’ilû, etc. On retrouve ce sens chez les Pères, qui considèrent l’idolâtrie comme le transfert, l’attribution aux fausses divinités du culte du vrai Dieu. Clément d’Alexandrie définit ainsi l’idolâtrie : ’K ; 0’oXo/, a— :  ;  ; ’! a h. toj svoç v.ç toS ; roXÀouç îzv/iir, ’j :  ; ti : ’. Osoû, Strorti., III, c. xii, P. G., t. viii, col. 1189 ; saint Grégoire de Nazianze n’hésite pas à proclamer que l’idolâtrie est le plus grand de tous les maux, parce qu’elle est « le transfert à la créature de l’honneur dû au créateur ». Ora(., xxxviu, n. 13, P. G., t. xxxvi, col. 325. On trouve également v.Li’h, employé avec cette signification spécinquement réservée à l’image du faux dieu. Voir Suicer, op. cit., aux mots sVo’iÀov, cL’.’)v. Origène, voulant apporter plus de précision aux concepts d’idole et d’idolâtrie, dislingue soigneusement entre l’image, tW.’-’y/, représentation véridique d’une chose existante, de l’idole, eVomaov, représentation fausse de ce qui n’existe pas. In Exod., hom). viii, P. G., t. iix col. 353. Cette distinction vraie et féconde permettra l)lus tard de poser le principe de la légitimité du culte des images en regard de l’idolâtrie interdite aussi bien par la loi chrétienne que par la loi mosaïque. Nous n’acceptons donc pas la définition qu’Henri Estienne, dans son Thesaurus linguie græar, au mot îPi’.ùo’/, donne de l’idole : < Dans le langage ecclésiastique,

écrit-il, l’idole est une représentation de la divinité à laquelle on accorde culte et honneur. » Cette définition, en effet, est de nature à favoriser l’erreur protestante et iconoclaste. Voir Iconoclasme.

Réelle.

Il faut donc définir l’idolâtrie ; « Le

culte suprême et absolu rendu à tout autre qu’au seul et vrai Dieu. » F. Prat, art. cit., col. 809. Mais cette définition appelle elle-même une remarque importante. Au début de son livre Des origines de l’idolâtrie, Paris, 1885, M. Goblet d’Ahiella affirme que les idoles ne sont que » les images représentant un être surhumain, vénérées à ce titre et tenues pour conscientes et animées ». Sans approuver cette définition de l’idole, il faut cependant reconnaître deux manières réelles d’envisager l’idole et, partant, de définir l’idolâtrie. Le concept populaire ne distingue pas le dieu de l’idole ; les théologiens du paganisme se gardent bien de commettre une erreur aussi grossière : pour eux, l’idole n’est que l’image, la représentation de la divinité. Le culte, les honneurs ne vont pas à l’idole, mais à la divinité dont l’idole est l’image. Toutefois, ils admettent que les dieux habitent les idoles de leur esprit et que cet élément proprement divin, le —nZ’xii., réside dans les idoles, les rendant, par cette inhabitation, vénérables et bienfaisantes. Cette défense de l’idolâtrie se trouve, dès les débuts de l’ère chrétienne, chez les philosophes païens, Dion de Pruse, Oral., iix n. 60, édit. von Arnim, Berlin, 1893 ; Plotin, Ennéides, IVe, t. III, c. XI ; voir Zeller, Philosophie der Griechen, Leipzig, 3e édit., 1881, p. 625 sq. ; Jambhque, Ilspi à-’îtÀiJ.i-r’.iv, réfuté par Jean Philopon, dans Pho Vius, ’Biblioth., cod. 215, P. G., t. ciii, col. 708. Cf. J. Lebreton. Les origines du dogme de la Trinité, Paris, 1910, p. 2-3. Cette conception plus élevée du culte des fausses divinités se retrouve, dans les religions les plus anciennes, malgré les déformations que lui font subir l’ignorance du peuple et même parfois l’enseignement des prêtres. En Chaldée, les statues des temples ne font que matérialiser les dieux du ciel et de la terre. Cf. Dhorme, La religion assijro-babylonienne, Paris, 1910, n « et III » leçons. En Egypte, « le polythéisme n’était certainement pas l’idolâtrie grossière qui s’arrête aux statues de bois et de pierre ». A. Mallon, art. Egypte, dans le Dictionnaire apologétique de la foi catholique de M. d’.’Mès, t. i, col. 1329. Ce polythéisme, bien que vérifiant la définition habituelle de l’idolâtrie, n’est pas encore, en toute rigueur, l’idolâtrie proprement dite. Il faudrait réserver ce mot pour désigner le culte rendu aux images, aux statues elles-mêmes, considérées comme étant la divinité à laquelle est adressé le culte. C’est bien là d’ailleurs le concept populaire aux temps du paganisme. Élevé daiv— les légendes d’un anthropomorphisme grossier, le peuple païen se figure les dieux « comme enchaînés à leurs statues, transférés avec elles d’une ville ou d’un sanctuaire à l’autre et pratiquement identifiés avec elles dans le culte et la piété »..1. Lebrelon, op. cit., p. 3. Sur ce sentiment populaire, on trouvera des détails piquants dans Gruppe, Gricchische Mythologie und Religionsgeschichte, Munich, 1906, p. 980 sq. Pausanias ne nous apprend-il pas que, pour retenir les dieux, on enchaîne leurs statues ; pour les punir, on maltraite leurs statues ? C’est en vertu de ce concept grossier de la divinilé liabilanl limage que les dieux de la religion assyro-babylonienne, aussi bien que les divinités grecques et romaines, sont conduits à la guerre, sont vainqueurs o.i vaincus en partageant le sort de l’armée qui les amenés au combat. Cf. Dhorme, op. cit., p. 134. Dans ce paganisme grossier, qui est à I)roprement parler l’idolâtrie, les l’èrek de l’Église trouveront les arguments les plus accessibles à l’esprit du peuple, pour démontrer rinanité d’une telle religion et la vérité du monothéisme chrétien. Cf.