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HYTOSTATIQUE (UNION) — II Y l’OTIIÈQUE

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ICONOCLASME

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La justification patrislique du culte des images est ébauchée par saint Germain, dans sa Lettre à Thomas de Claudiopolis. Mansi, t. xiii, col. 108. On sait que les deux lettres du pape Grégoire II à l’empereur, Mansi, t. xii, col. 959 et 975, ne sont pas authentiques, mais elles n’en possèdent pas moins une réelle valeur documentaire. Elles révèlent l’état d’esprit de ces Orientaux, si peu soucieux d’ordinaire de mêler les papes de Rome à leurs affaires, et, dans la circonstance, faisant de Grégoire, qu’il le voulût ou non, le champion des orthodoxes et le chef de l’opposition. Cf. H. Hubert, Étude sur la formation des États de l’Église ; les papes Grégoire II, Grégoire III, Zacharie et Etienne II, et leurs relations avec les empereurs iconoclastes, dans la Revue historique, 1899, t. lxix, p. 1-40, 241-272.

Le véritable théologien de la résistance orthodoxe fut saint Jean Damascène († 749). Ses discours apologétiques lui attirèrent l’animosité de Léon l’Isaurien. L’épisode de la main coupée, qui se rapporte à la période de 717 à 741, et qui survint à la suite d’un odieux guet-apens, montre, avec la piété de Jean envers la sainte Vierge, la haine dont le poursuivirent les membres de la dynastie isaurienne.

C’est dans les trois discours sur les images IIoo ; toù ; otaSâXÀovTa ; Ta ; âyîa ; siV.ovaç, P. G., t. XCIV, col. 12321420 ; cf. aussi De p.de orthodoxa, iv, 16 — le premier date probablement de 726, le deuxième de 730 environ, le troisième d’un peu plus tard — qu’il faut chercher la position doctrinale prise par le saint docteur.

Tixeront, Hist. des dogmes, t. iii, p. 459, 460, la définit avec netteté. Rien ne s’oppose à la confection des images religieuses : Dieu lui-même, invisible, illimité, incorporel, parce qu’il s’est fait homme, peut être représenté ; où tï, v àopaTov îrLovCÇ’» Dio-rixa. àÀX’î’.y.ovîÇ’i ) Gioj Tr|V ôpa8îî>jav cjâpy.a, 1, 4, 16 ; III, 6. Les anges, les démons, les âmes humaines sont des êtres immatériels sans doute, mais qui ne sont pas simples ; ils sont finis, et c’est sous des images ou figures qu’ils nous ont été révélés, iii, 25.

Quant à l’usage de ces images, Jean de Damas en établit la légitimité par l’abolition, sous la loi de grâce, de certaines prohibitions de l’Ancien Testament, I, 6-8 ; II, 7, 8 ; iii, 8 ; par l’exemple de Dieu lui-même, du Père dont le Fils est l’image, i, 9 ; iii, 18 ; du créateur en qui se trouve l’image de tout le créé, i, 10 ; m, 19 ; par l’histoire et ses monuments, image du passé, I, 13 ; iii, 23.

La légitimité du culte lui-même est enfin fortement démontrée. Sans doute, les images sont de la matière, elles sont créées. Mais n’allons pas médire de la matière : elle n’est pas sans valeur, ar, /AL’.'Ç^ -r^^PjXtjv oj yàp aTc ; j.oç, 1, 16 ; 11, 13, 14. « D’ailleurs, il faut distinguer plusieurs sortes de culte. Le culte rendu aux images n’est pas un culte absolu, mais relatif, qui se rapporte, en définitive, à l’original. C’est le grand principe proclamé par saint Basile : /| yàp tvj ; sîzo’vo ; T[[j.r| -po ; Tov -poiTOT-j-ov StagaîvsL, I, 21. Ensuite autre chose est l’adoration de latrie (rj -cfj ; XatpEÎaç r.poay.ùvYiai ; ), autre chose l’adoration de respect (r| èy. ntxriç -prjaayci|j.£vr|), qui a pour objet les personnes ou les choses en qui se trouve quelque excellence ou quelque dignité spéciale, i, 8, 14: car le mot -poaxjvïiJ ! ? signifie bien des sentiments : le respect, l’amour, la crainte révérentielle, la sujétion, l’humiliation, iii, 40. Or, l’adoration de latrie ne se rend qu’à Dieu ; malheur à qui adorerait ainsi les images ! i, 16 ; ii, 11 ; iii, 9, 40 ; mais la vénération, l’hommage, la -poaxjvyiatç xiar, -Ti Lr) peut et doit se rendre à tout ce qui est revêtu de quelque dignité, iii, 40 : hommage religieux, s’il s’agit de choses ou de personnes ayant une excellence religieuse, tels les saints, les reliques, les objets du

culte, la Bible, et c’est dans cette catégorie que rentrent les images de Notre-Seigneur et des saints, iii 33-36 ; hommage civil, s’il s’agit de personnages ayant une prééminence dans l’ordre social, tels que nos maîtres, les princes, etc., iii, 37-39. » Tixeront, op. cit., p. 461.

Loin qu’il le condamne, Jean de Damas préconise le culte des images, en en montrant l’utilité et les avantages spirituels. Ne dit-il pas que les images sont des canaux de la grâce, qu’une vertu sanctificatrice leur est attachée comme à des sacrements, en considération des personnages qu’elles représentent : y âo-. ; oîooTai 03 ; a Tai’; iXat ; 5’.à t/, ; î’.Lo’/i’lo’j.i-P<)’/ "po^T^yop^aç, i, 16 ; ii, 14 ? Attribuer aux images une vertu mystique (ajiTrjpiov), une puissance quasi sacramentelle, voilà bien un des traits de la théologie byzantine.

La réflexion finale de M. Tixeront est d’un à-propos parfait, n D’ailleurs, et pour tout conclure, il (Jean) déclarait énergiquement — et cette déclaration lui était plus facile qu’à d’autres, puisqu’il vivait hors des limites de l’empire — qu’il n’appartenait point à l’empereur de trancher cette question de la légitimité des images, ’: " que le prince n’avait, pour le faire, ni autorité, ni compétence : Suvôoojv -ch^-cl oj [iaa’.ÀÉùjv, I, col. 1281. (Jù jia^LÀi’.ov èîTÎ voaoOîTStv Tî)’ExxXrii’a… [îa^j’.ÀÉwv èaTiv fj -oÀitlLt] E’j~paçt’a f, oï ây.y.), r, a’.a-j- : i-Lï| /aTajTatï !  ; t : oi[asv(ov y.al oioaTP.âÀwv, i, 12. Plût à Dieu que les grecs se fussent souvenus plus souvent de ces principes ! » Op. cit., p. 462.

X. Importance msTORiQUE et théologique de l’iconoclasme. — ^ A la différence des précédentes hérésies, l’iconoclasme exerça une influence beaucoup moins doctrinale que pratique. Il doit au césaropapisme et à la manie dogmatisante des basileis de s’être si rapidement propagé et d’avoir si longtemps troublé les affaires religieuses et sociales de l’empire. Il représente surtout un de ces grands événements de l’histoire universelle dont les conséquences sont incalculables.

On ne peut mettre en doute que les persécutions sanglantes, déchaînées par toute une série de règnes iconoclastes, aient achevé de convaincre les papes qu’il n’y avait plus rien à espérer, pour le bien de la religion, de ces empereurs d’Orient, à la fois hérétiques et persécuteurs, et qu’il leur fallait désormais tourner les yeux vers la puissance politique de l’Occident. Toute cette triste histoire est intimement liée à l’origine du pouvoir temporel des papes, d’une part, et à la formation du nouvel empire romain, de l’autre. C’est ce que montre fort bien H. Hubert, op. cit., surtout dans le portrait qu’il a tracé du grand pontife Grégoire II, zélé défenseur des traditions ecclésiastiques et habile diplomate. De même, à propos des lettres apocryphes, mais pleines de considérations historiques, du pape Grégoire II à l’empereur Léon III, on a pu écrire que, grâce à elles, on touche peut-être

« aux origines de la légende d’après laquelle Grégoire II

aurait secoué le joug de l’autorité impériale, même au point de vue politique et, dans ce but, aurait conclu une alliance formelle avec les Francs. Le clerc byzantin qui a probablement fabriqué ces lettres a compris que quelque chose de nouveau se préparait en Italie : de l’extrémité du monde connu, des peuples nouveaux demandaient le baptême au pape de l’ancienne Rome

« placé comme un arbitre entre l’Orient etl’Occident » ;

quels que fussent ses ennemis, les défenseurs ne manqueraient pas à saint Pierre : ov ai r.àicL’. [iaiivzla. : Tfjç ojasfoç (o ; Ûhov JÂiy^tov i/ouaiv. » Louis Guérard, Les lettres de Grégoire II à Léon l’Isaurien, dans les Mélanges d’archéologie et d’histoire, 1890, t. x, p. 60. Et M. L. Bréhier, op. cit., p. 3, a pleinement raison de dire que le développement politique de l’Occident a subi le contre-coup de la querelle des