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HYrOSÏATIQUE (UNION ;

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liypostatiqiie est en elle-même riinité absolue, l’unitc subsislaate, l’acte pur, l’iiifinie perfection ; elle est intimement unie à chacune des deux natures : à la nature divine, d’abord, puisqu’elle s’identifie entièrement avec elle ; à la nature humaine, ensuite, puisqu’elle lui communique sa propre subsistance, sa propre existence, par un embrassement indissoluble. » Hugon, op. cit., p. 181. Elle est donc bien plus intime, à ce seul point de vue ontologique, que l’union de l’accident et de la substance, de la forme et de la matière, de l’âme et du corps. Ces deux dernières unions, parce que faites dans l’essence et non dans la personne, paraissent plus fortes que l’union hypostatique à Durand de Saint-Pourçain, In IV Sent., t. III, dist. V, dont l’opinion singulière est rejetée par tous les théologiens. En voir la discussion dans Suarez, op. cit., disp. IX, sect. r, n. 1, 4 : cf. Salniauticenses, djsp. IV, dub. II, § 3, n. 65 sq.

Tous les auteurs, commentant un beau texte de saint Bernard, De consideratione, t. V, c. ntu, n. 19. P. L., t. cLXXxii, col. 799-800, font remarquer que l’union des trois personnes de la Trinité est plus étroite encore que l’union hj^jostatique. Toutefois, observe saint Thomas, à propos d’un texte en sens contraire de saint Augustin, De Trinitate, l. I, c. x, P. L., t. XLH, col. 834, « l’homme lui-même est, sous un rapport, dans le Fils plus que le Fils dans le Père, en ce sens qu’on désigne la même personne en disant du Christ l’homme et en le nommant aussi Fils de Dieu. au lieu que la personne du Père n’est pas la personne du Fils ". I.oc. cit.

Mais le point de vue ontologique n’absorbe pas tous les aspects du problème. Frassen, loc. cit., c[. iv, énumère trois autres motifs pour lesquels les théologiens proclament l’union hjT^ostatique supérieure à toute autre union : raisons de dignité, d’inscparabilité, de singularité. La dignité suréminente de l’union hypostatique éclate dans la démonstration de la divinité du Verbe incarné, et dans la perfection de la nature humaine prise par le Christ, perfection d’ordre naturel et surtout d’ordre surnaturel. Voir Jésus-Christ. Sur l’inséparabilité, voir plus loin, col. 536. Que l’union liypostatique soit singulière entre toutes, les théologiens le démontrent par là qu’elle est le don le plus excellent que Dieu puisse faire à la créature. Suarez, op. ci’L, disp. IX, sect. ii. Cette vérité « est le corollaire de la doctrine exi)()sée. Les autres dons, même la grâce consommée, même la gloire inamissible, rentrent dans le rayon des unions accidentelles et restent toujours des participations limitées de la vertu, do l’opération ou de la nature de Dieu. Si l’habitaHon de la sainte Trinité dans les justes est une présence substantielle, elle n’est pas une union substantielle, c’est-à-dire si Dieu est présent en nous par sa substance même et non point seulement par ses dons, sa substance, pourtant, ne s’unit ]ias à la nôtre au point de former un seul tout substantiellement un : c’est encore l’union accidentelle, qui se réalise entre l’hôte et sa demeure, entre le souverain Seigneur et le temjjle oii il prend ses délices. Subsister par la subsistance de Dieu, exister par son existence, voilà le don unique, le plus grand des bienfaits, de même qu’il est impossible d’avoir un terme plus noble que Di « u ! « Hugon, op. cit., ). 188-189.

Certains auteurs, comme Durand de Saint-Pourçain, /n 7 V Sen<., t. III, dist. II, q.i ; Richard de Middle tOwn, (’6(’rf..a.2, q. ult. ; Gabriel Hiel, ibid., dist. I, q. ii, a. 2, ad 2’"", considèrent que la ision béatifiquc est un don plus excellent que l’union hypostatique, parcc que celle-ci, prise séparément de la vision béatifiquc, ne rend pas l’homme heureux, tandis que c’est l’effet formel et propre de la vision intuitive. Cette assertion repose sur une conception trop étroite, car l’union hypostaliqup ne peut, en réalité, se concevoir séparée

de la vision béatilique, qui en est le couronnement et le complément nécessaire, l’union hypostatique exigeant l’union de la grâce sanctifiante et de la gloire. Cf. S. Thomas, Sum. theoL, III », q. vii, a. 13 ; q. x, a. 1. C’est également s’égarer en une distinction trop subtile, que d’affirmer avec Scot, In IV Sent., t. III, dist, II, q. i, que l’union hypostatique est plus parfaiti’que la vision intuitive, si on la considère comme acte premier, et qu’au contraire, la vision est plus parfaite. si on envisage l’acte second.

d) C’est une union naturelle à l’humanité du Christ.

— Cette assertion ne contredit pas le caractère éminemment surnaturel de l’union hypostatique. Elle signifie simplement, dans la pensée des docteurs catholiques, que l’humanité de Jésus n’a jamais existé séparée du Verbe de Dieu, mais que l’union hypostatique a commencé dès le premier instant de la conception du Verbe incarné dans le sein de la Vierge Marie. « La grâce de l’union n’est donc pas naturelle dans le sens qu’elle résulte des principes de la nature humaine, mais on peut l’appeler naturelle : a. parce qu’elle résulte dans la nature humaine de l’action même de la divinité ; b. parce que, dès le commencement de sa conception, la nature humaine a été unie à la personne divine. » S. Thomas. Sum. theol., III", q. ii, a. 12. Cette vérité fut niée autrefois par tous les partisans de radoptiaihsme des premiers siècles, qui n’admettent en Jésus une filiation divine que postérieurement à sa naissance temporelle, voir col. 465 ; puis, par Paul de Samosate, Diodore <le Tarse, et Théodore de Mopsueste. Bien qu’on rencontre des hésitations chez ce dernier auteur, il semble difïicilo de concilier le dogme de l’union hypostatique existant dès la conception du Christ avec l’union purement morale qui suppose en Jésus l’usage de ses facultés pour répondre aux grâces de la divinité. Cf. Jugie, op. cit., p. 147-148. Nestorius est plus ferme sur ce point et admet l’union dès l’instant de la conception. Cette assertion contraire à la plupart des affirmations répandues en Occident grâce à Cassien et à Marius Mercator, est rigoureusement exacte, Jugie, op. cit.. p. 198 sq. ; il n’est même plus permis de douter sur ce point, cf. Fraiizelin, De Verbo incarnato, p. "222 sq.. de la pensée de Nestorius. La simultanéité de l’union et de la conception est une vérité intimement reliée au dogme de l’incarnation : le Verbe de Dieu est dit avoir été conçu du Saint-Esprit ; au moment même où la Vierge a conçu, c’est le Verbe cpii s’est lait chair. Il faut donc, pour que ces affirmations du dogme catholiques gardent toute leur vérité, que, dès le premier instant oCi la Vierge mère a conçu, le Verbe se soit uni iiypostatiquement la chair c|u’elle portait dans son sein. Telle est la doctrine professée dans l’Église catholique depuis les controverses christologiques. On peut en glaner au hasard les témoignages chez les Pères grecs et chez les Pères latins : S. Athanasc, Oratio, iii, contra arianos, n. 30, P. G., t. xxvi, col. 387 ; Contra.Apollinarem, t. I, n. 4, col. 1097 ; S. Basile. Homit.. XXV, n. 4, P. G., t. xxxf, col. 1466 ; S. Grégoire de Nazianze, Epist.. ci, P. G., t. xxxvii, col. 177 ; S. Épiphane, Adt>ersus hareses, ha ?r. lxxvii. P. G.. t. XLii, col. 686 ; pseudo-Athanase, Dial. de Trinitatr. IV, n. 5, P. G., t. xxviii, col. 1255 ; Proclus de Constantinople, Epist., ii, ad Armenos, n.5, P.G., . lv, col. 859 ; Jean Maxence, .d epist. Hnrmisdse rcsponsio, P. G.. t. Lxxxvirt, col.90 ; Dial. contra nestorianos. I, n. 10, col. 127 ; la confession de.Iustinien, P. G., t. lxxxvi, col.998 ; cf. col. 1012 ; Léonce de Byzance, Contra nestorianos et culychianos, t. II, P. G., t. i.xxxvi a, col. 1351 et col. 1579 ; Th.’odore de Rayihu. De inrarnniionc. P. G., t. xa, col. 1191 ; S. Jean Damascène, Dr fid< orfh., t. III, c. II, xxii, P. G., t. xciv, col. 986, 1088 ; Théodore Alnicara, Opusc, IV, P.G..I. xrvii.col. 1515 ;