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HYPOSTASE

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deux natures en une personne. Au point de vue philosoDhique, ces auteurs se contentent généralement d’affirmer que la séparation, la distinction, la totalité qu inclut l’hypostase. reposent sur la négation de dépendance. La discussion du système a donc sa place marquée à l’art. Hypostatiquk (Union). Cependant quelques remarques s’imposent. Il est difficile d’admettre que la négation de dépendance actuelle et aptitudinelle, au sens où Scot entend ces termes, suffise à faire d’une nature concrète une liypostase. De l’aveu de tous, l’hypostase est une substance individuelle et incommunicable. Or, la négation de dépendance actuelle ne rend pas la substance incommunicable, mais simplement incommuniquée. Quant à la négation de dépendance aptitudinelle (celle de l'ànie vis-à-vis du corps), de cette dépendance qui suppose, dans la réalité qu’elle affecte, une tendance innée à s’unir à une autre réalité pour former un être complet, elle ne peut exister qu'à la condition que cet être constitue par lui-même un véritable tout substantiel. Et la réciproque est vraie : une réalité ne possède de véritable dépendance aptitudinelle vis-à-vis d’une autre réalité, qu'à la condition d'être incomplète dans l’ordre substantiel ; autrement, un tout substantiel complet serait en même temps un être incomplet, ce qui est contradictoire. D’ailleurs, cette contradiction est manifeste dans la théorie scotiste : sans discuter présentement son explication de l’union hypostati(]ne, on peut constater que Scot admet la seule dé] endance actuelle de la nature humaine vis-à-vis du Verbe comme raison de sa non-personnalité dans le Christ. Il résulterait donc de cette conception que la nature humaine, en Jésus-Christ, serait à la fois complète et incomplète : complète, par le fait que l’hypostase n’ajoute rien de réel à la nature ; incomplète, par le fait que cette nature humaine est assumée par la personne du Fils de Dieu.

De plus, qu’est-ce que cette négation de dépendance par rapport à la constitution intime de l'être qu’elle affecte'.' Si cette négation doit atteindre la constitution intime de l'être — et il doit en être ainsi pour faire de la nature une hypostase — il faut qu’elle repose sur un élément positij, lequel affecte hii-même essentiellement l’hypostase ou la personne, .utrement, elle n’est qu’un simple mot ne répondant à rien d’objectif. Scot a bien remarqué ce point faible de sa théorie, lorsqu'à l’objection qui vient d'être faite, il répond que l'élément jiositif nécessaire n’est autre que la nature elle-même, en tant qu’elle est celle nature, iiidividuée. subsistant en soi et par soi. Plusieurs scotistes, Lychettus, de Hada, Centinus, 1 ferrera, cités par Mastrius, loc. cit., inclinent, pour ce motif, vers le concept positif de la subsistence. On explique la pensée de Scot en ce sens que le docteur subtil veut simplement affirmer que la personnalité n’est pas constituée par un élément iiositif sunijoiUé A la nature concrpte, et ainsi la doctrine scotiste reioint celle de la seconde école, celle que Tiphaine a mise en relief. Stentrnp, op. cit., th. xxv ; Pesch, De Vcrhn incarnnln, tr. I, n. 97.

Deuxii^me école : la subaistencc est conçue comme ne se distinguant pets rfellemrnt de la nature concnte : elle est cette nature même, cnnsidf.rfie dans sa totalité substantielle et intéffralr, existant en soi. — 1. Exposé. — Cette thèse, à lafjnclle se ré<luit facilement l’opinion précédente, prétend résumer en i& formule simple les explications des Pères. Suarez, Mctaph., disp. XXXI’V, scct. ii, n. 4. place cette opinion sous le patronage de Durand de Saint-Poufain, In IV Sent., I. I, dfst. XXX rV, q. i. et de Henri de Oand. Qundiibft fV, q. iv..Mais c’est surtout le jésuite Tlphainc qui lui a donné, au xviie siècle (1634), son relief et sa vogue. La thèse philosophique de Tiphaine

est exposée dans son De h.jposiasi et persona, réédité à Paris, 1880, avec préface du P. Jovene, c. x-xxiii. Examinant diverses définitions de 1 hypostase : subslantiu prima iota : subslanlia singularis et indiuidua, inLcfjra et pcijccla ; nature terminus ultimus seu ultinuim complementum ; cns, subslanlia per se subsislens vel exislens ; subslanlia discrela aut separata, iwl per se ac seorsim posila, Tiphaine remarque que toutes ces définitions sont équivalentes et traduisent, avec des expressions différentes, le même concept fondamental de l’hypostase : un tout substantiel existant en soi. C’est ce concept de totalité qui traduit le mieux l’idée de la perfection, la tiLîiÔTT.ç, attribuée par les Pères à l’hypostase. Tiphaine en fait le point central de toute sa thèse et pense par lui solutionner les dilficultés soulevées contre le dogme de l’incarnation. La totafité dont il s’agit est : l" une totalité subsiantielle, de telle façon que les parties essentielles (par exemple, l'ànie et le corps dans la nature humaine) ne peuvent constituer séparément une hypostase : 2° une totalité intégrale, ce qui empêche les parties intégrales d’un individu de constituer par elles-mêmes des hypostases. Cf. c. xii, n. 11, 12. A rencontre de Scot, Tiphaine soutient qu’aucune négation n’entre dans le concept de l’hypostase, c. xviii, n. 5 ; dans aucune des définitions proposées, il n’y a place pour une négation : pas de négation dans le concept de substance ; pas de négation dans le concept d’intégralité et de totalité ; pas de négation dans le concept de dernier complément, de perfection dernière, d'être par soi, de substance distincte et individuée. Si la personnalité ou la supposante comportaient une négation de déi)cndance, parce que l’hypostase et la personne existent en soi, il faudrait également dire qu’elles comportent la négation d’existence accidentelle et partielle, parce quelles ne peuvent être ni accident ni partie, n. S. Toutefois, bien qu’aucune négation n’entre dans le concept formel de l’hypostase, il est cei)cndant plus facile de définir l’hypostase négativement que positivement, cf. c. xvi, n. 15, et, parmi toutes les négations qui peuvent accompauner ce concept, il en est une qui lui appartient plus spécialement et comme en propre, c’est Vin-cnmmiinicabililé, i-. xviii, n. 13. Cette remarque est amenée par la nécessité d’expliquer comment la subsistencc (entendue au sens abstrait), qui, dans la théorie de Tiphaine, ne se distingue pas réellement de la nature concrète et n’en diffère que par le concept, peut cesser d’appartenir à une nature, par le fait de l’assomplion de cette nature à une hypostase supérieure, sans que ladite nature, privée de sa subsistencc propre, soit diminuée ou changée en quoi que ce soit, l^t Tiphaine résout la difficulté en exposant les différcnls modes par lescpiels disparaît la totalité substantielle, raison formelle de la subsistencc, addilione, accessione, pnsilione alicujus allerius. c. xxiii. Donc, par le fait de son union avec une hypostase plus parfaite, une nature concrète perd sa supposante, sa iiersonnalité, ibid., n. 8. lit c’est par là que, finalement, la théorie de Tiphaine. à son tour, rejoint celle de l'école scotistc. dont elle ne diffère, en somme, que par les mots. Franzdin, op. cit., th. x.xix, corol. ^ ; Urraburù. op. cit., n. 202. p. 855, font euxmêmes cette constatation. Les partisans de ce système sont légion : citons les principaux : Thomassin, Ue incarnatione, t. III, c. -xvi-xxi : Petau, De incarnatione, t. V, c. vii, n. 6-10 ; EranLclin. De Verbo incarnato, th. xxvii-xxxiv : Stentru]), /Je Verbo incarnato, H). xxiii-xxvi ; Hurler. Compendium llieologite dogmnticiv, th. ci, n.."SOS ; De Uégiion, np. cit., pnssim ; Pcsch, /)' Vrrbo incarnnln, prop. vii-ix, et. parmi les philosophes, Tongiorgl. P.nlmicri, Lahonsse. Fritk, Piccirelli. etc. 2. Critiqiir. Il est juste de reconnaître que c(jsys-