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aux indulgences. C'était une reprise des pratiques wiclifistes. Opus cvanrj., t. II, c. xxxvii. « On doit, criait le peuple, plutôt obéir au maître sincère Hus, qu'à la bande d’imposteurs, d’adultères et de simoniaques. » Le roi Wenceslas dut sévir. Accusé par le parti adverse de condescendance trop grande vis-àvis de ce mouvement, il fit punir par les magistrats toute injure publique au pape, et toute résistance contre ses bulles. Trois jeunes gens qui, pendant le sermon, avaient contredit l’ecclésiastique et appelé l’indulgence une imposture, furent décapités, malgré la demande en grâce de Hus. Ce turent les premiers martyrs de l'Église hussite. Beilrâge fur huss. Bewegurtg, t., p. 354-358. Les adversaires nommèrent la chapelle de Bethléem « l'église aux trois saints ».

Toutes les tactiques furent alors essayées. La faculté de théologie commença tl’abord par exiger que Hus présentât ses discours et ses enseignements au doyen pour leur examen. La mesure n’aboutit finalement qu'à la justification par Hus des article. 13, 16, 18 dans les 45 propositions reprochées à Wiclil par l’université dès 1403. Dejensio quonimdain arliculorum Joannis Wiclif. Cf. Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 581-G25. Les théologiens répondirent : Probaiio et fundalio dodoruin probans indulgenlias papales. L’archevêque Albik, successeur de Sbinko von Hasenbourg, les légats pontificaux clierchèrent ensuite à amener Hu'. à l’acceptation des bulles papales, pendant ciue le roi Wenceslas lui-même tentait de rapprocher les uns des autres les fidèles des deux camps et que Palecz composait contre son adversaire son Trartalns qloriosus, dans l’espèce une amplification de la Probaiio et jandalio.

Rien n’aboutissait. Le clergé paroissial de Prague, entraîné par Michel de Causis, se tournait sur ces entrefaites vers le pape. Jean XXIII chargea le cardinal de Saint-Ange d’agir. Il fulmina la grande excommunication contre Hus, qui devait être saisi et livré à l’archevêque de Prague, ou à l'évêque de Leitomischl : la chapelle de Bethléem devait être complètement rasée.

Contre ces nouvelles mesures, Hus se contenta d'élever un appel au Christ lui-même ; malgré l’assaul donné à sa chapelle de Bethléem, le 2 octobre 1412, il continua ses prédications. De nombreux personnages de la cour, la reine Sophie à leur tête, y prirent part. La seule chance qui restait désormais de rétablir la paix était d'éloigner Hus. Le roi lui-même l’engagea à partir.

Le lutteur séjourna la plupart du temps dans le sud du pays, dans les châteaux des seigneurs, ses protecteurs, et particulièrement à Kozi-hradek. Il y écrivit, il y polémiqua, il y composa des ouvrages. Dans ses lettres, il exhortait ses partisans, plus agités que jamais, à écouter avec application le verbe de Dieu, à s’en tenir à la vérité connue, à ne pas permettre la destruction de sa chapelle, et à ne pas craindre les provocations de leurs ennemis. Il consolait ses amis de son excommunication ; il discutait avec un vocabulaire wicli liste les raisons de son exil de Prague.

11 polémiquait. Dans les deux conférences de Prague (Noël M12-février 1413), provoquées par Wenceslas, à qui SCS tribulations polit iques avaient montré la nécessité de valoriser, quel qu’il fût, l'élément tchèque, Hus montra, dans la première, la situation besogneuse du pays et le remède qu’elle exigeait ; il affirma sa bonne volonté d.se justifier, mais aussi l’impossibilité où il était de quitter son prône et de vivre à Prague. Dans la seconde, convoquée pour le 2 février à Bôhmlsh Brod, et tenue au palais archiépiscopal de la capitale bohémienne, le fi.seulement. Hus écrit : « La Bohême, sous le rapport ecclésiastique, doit avoir les

mêmes libertés que les autres pays ; les condamuations ne doivent y être pubUées qu’avec la permission du pouvoir de l'État. » C'était du Wiclif tout court. Sermoncs, t. ii, p. 519. « Et quand je me tiendrais devant le bûcher qui m’est préparé, écrit Hus, en ces jours, je ne reconnaîtrais jamais l’assemblée de la faculté de théologie. » Et pourtant le roi ne perdait pas tout espoir. Une commission permanente, dite Commission d’union, fut instituée pour travailler à une composition. Le nœud de la discussion était^tout entier dans la discussion de l’essence même de l’Eglise catholique. Les docteurs exigeaient de Hus et de ses partisans la reconnaissance de leur sommaire : Le pape et les cardinaux sont, le premier, la tête, les seconds, le corps de l'Église. On doit obéir à tous ses ordres. Hus continuait à s'élever vivement contre ces points de vue.

Toute la polémique donna lieu à une série d'écrits. Les deux partis cherchaient à étayer explicitement leurs propositions ; leurs joutes ont trouvé un écho dans les mémoires d’André de Brod, de Stanislas de Znaïm. et d’Etienne de Palecz. Cf. Beilriiqe jur huss. jBeu’ef/un^.t. iv, p.315 sq. Jean Hus y avait répondu par son ouvrage capital : De Ecdesia, dont les dix premiers chapitres ne sont qu’un plagiat de l'œuvre de même nom de Wichf ; son livre non encore imprinnVon der Gewalt des Papsles n’eut pas plus de personnalité. Wichf avait soutenu contre l’opinion de son temps que l'Église n’est point seulement composée du pape, des évêques et des prêtres. Pour Jean Hus. il n'était pas d’autre conclusion.

Il avait écrit son De Errlesia à Kozi-hradek, où plus tard, en souvenir de son activité pastorale pour les siens, devait s'élever la ville de Tabor, la capitale de ses disciples. Il envoya son ouvrage à Prague, oii il fut lu publiquement le 8 juillet 1413, dans la chapelle de Bethléem. Ce fut alors une wiclifolâtrie. Les ouvrages anglais du maître d’Oxford furent lus dans le temple et, sur ses murs, on inscrivit les principales propositions de Hus. En ville et à la campagne, tout lui cédait désormais. Hus disait la vérité au concile de Con.stance, quand il lui lançait cette apostrophe : a Je.suis venu ici libre : ne l’aurais-je pas voulu, le roi (Sigismond) pas plus que (Wenceslas) n’auraient pu m’empêcher, car les seigneurs de Bohême qui m’aiment sont nombreux et puissants. J’aurais pu me protéger dans leurs châteaux. » Hus était devenu le chef de la Bohême, et Wenceslas portait encore un dernier coup à ses adversaires, en enlevant aux Allemands dans le conseil de la cité la direction unique des affaires et en plaçant, à côté d’eux, une délégation égale de Tchèques. D’ailleurs, le wiclilisme bohémien pénétrait déjà en Pologne, en Hongrie, en Croatie, en.Xutrichc. Pour Hus, le concile général de Rome (janvier 1413) n’avait rien signifié. Hus n’y avait vu qu’une « assemblée de contrebande », fréquentée par « des moines et des simoniaques ».

Il fallait donc sévir dans une grande assemblée catholique, pour extirper l’héré-sie. En mai 1414, le chancelier de l’université de Paris. Cerson, écrivait à l’archevêque de Prague et lui représentait la néccssitédecombattrelesenseignemenlsdangeriux de Wiclif à l’aide du bras séculier. Un concile général venait d'être convoqué à Constance pour le 1° novembre. .Sigismond, frère de Wenceslas. futur héritier du roi de Bohême, Wenceslas, et déjà empereur du SaintEmpirc romain germanique depuis 1410, prit la chose en main. Sans grandes diiricullés, il persuada à Hus de se rendre au concile pour se justifier. Le maître, ses discours iirononcés à Constance le prouvent, espérait bien jouer à l’cITet et convertir les Pères au wicUnsnip. L’cmpcTPur Sigismond lui promit un saufconduit. Daté (le Spire (18 octobre 1414). il était