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égard. I/arcliev<}quc Sbiiiko refusa de se séparer de Grégoire XJI. A l’uiiiversilé. seule la nation bohème se prononça pour la neutralité. Son ctief était Jean Hus. Sur les sollicitai ions de ce dernier et des autres maîtres tclièqucs, Venceslas irrité fil paraître le décret du 19 janvier 1409. Dans toutes les alïaires de l’université, la nation bohème devait désormais avoir trois voix, tandis que les trois nations étrangères se voyaient réduites à une voix. C'était un renversement d’influence. Le sang parla chez Hus ; du haut de la chaire, il célébra l’amour du roi pour son peuple. Les Allemands répliquèrent. Ils ne parvinrent pas à faire rétracter le décret. Ce fut, dans le cours de l'été, l’exode en masse de milliers de docteurs et d'étudiants, qui s’en allèrent fonder l’université de Leipzig. Celle de Prague n'était plus par le fait qu’une école supérieure nationale tchèque, pour le moment la citadelle du wiclifisme. L’archevêque Sbinko restait isolé ; Hus, au comble de l’influence, devenait le premier recleur de l’université nouvelle (octobre 1409). Les faveurs de la cour, celles de la reine Sophie, qui avait pour lui une profonde inclination, lui étaient acquises. Mais, dès septembre 1409, l’esprit avisé de Sbinko von Hasenbourg aj’ant très bien vu qu’une situation portée au paroxysme ne iirofitait qu’aux wiclifistes, qui s’en faisaient gorge chaude, il se décidait, pour le bien de la paix, à se rallier à l'élu de Pise, au pape -Mexandre V. Les théories wiclifistes submergeaient ville et campagne. L’archevêque gagna l’oreille de la curie, en affirmant que tout le chancre était là. Le clergé était devenu ingouvernable ; les censures de l'Église élaient méprisées. Et c'étaient bien, disaitil. les wiclifistes qui avalent convaincu les barons qu’il appartenait aux laïques de diriger le clergé, et que le roi avait la puissance de mettre la main sur les biens de l'Église. Sur ces représentations, le 20 décembre 1409, Alexandre V lança sa bulle contre les wicHfistes. Elle fut publiée le 9 mars 1410. Elle ordonnait la livraison de tous les écrits wiclifistes, la rétractation de toutes les doctrines qu’ils contenaient, et interdisait toute prédication hors des églises cathédrales, collégiales, paroissiales ou claustrales. Le synode de Prague quin 1410) prit les dispositions pour exécution conforme. Hus, atteint comme prédicateur d’une chapelle privée par la défense de prêcher, déclara que la défense contrevenait aux ordres du Christ ; il adressa au nouveau pape Jean XXIII, au nom de l’université, de la noblesse et du peuple, un appel contre l’interdiction de prêcher et contre l’incendie des écrits de Wiclif. Sbinko passa outre. Le 16 juillet, sur le Hradschin, en pré.sence du chapitre et de nombreux prêtres, il faisait brûler les livres livrés, parmi eux 200 manuscrits, dont quelques-uns précieusement reliés. Sans dou’e une faible partie, seulement, des livres répandus dans Prague avait été liTée. Et pourtant la mesure excita dans la ville un soulèvement indescriptible, d’autant plus, que deux jours plus tard, l’archevêque prononçait l’excommunication contre Hus et ses partisans. Les scènes tumultueuses se renouvelèrent dans les faubourgs. Sbinko fut conspué dans des chansons, et le service divin interrompu. Le gouvernement lui-même condamna l’archevêque à indemniser les propriétaires des manuscrits brûlés, tout en faisant taire pourtant les moqueries contre lui. L’orgueil de Hus n’avait pas cédé. Il n’avait plus seulement la Bohême, mais toute r. gleterre des lollards derrière lui. Il continuait à défendre les ouvrages de Wiclif dans des discussions publiques :

« Le peuple de Bohème, tout entier, écrit-il alors,

est altéré de vérité, il ne veut rien connaître que l'Évangile et les Épîtres, et partout où quelque part dans une ville, dans un village, dans un château.

un prédicateur de la sainte vérité apparaît, c’est un neuve de i euple qui y accourt en tas. Notre roi, loutt' sa cour, les barons et le peuple ordinaire sont pour la parole du Christ. » Il maintint ses prédications à la chapelle de Bethléem ; son ton devint de plus en plus audacieux. Dans un discours public, il se tournait de la chaire vers ses auditeurs : « Voulezvous m’appartenir 7° et le peuple répondait : « Oui. nous voulons t’appartenir. »

A la suite de son appel, Hus avait d’ailleurs été assigné devant la curie romaine. Sur de faux-fuyants, il n’avait pas paru. Au mois de février 1411, il était frappé d’excommunication par le pa))e. Le 15 mars suivant, Sbinko le fit annoncer dans la plupart des églises de Prague. C'était pom' l’archevêque, de la part du roi Wenceslas, l’explosion d’une colère qu’il ne devait plus apaiser. La mort privait bientôt l'Éghse de Prague de son chef (28 septembre 1411) au moment où celui-ci essayait encore les dernières tentatives de conciliation.

Hus, séparé de Rome par ses entêtements wiclifistes. allait maintenant se séjjarer de son université, en combattant âprement la doctrine cathoUque des indulgences.

Hus et les indulgences.

La querelle coimnença

dès 1412. L’excommunication n’avait produit dans Jean Hus aucun changement de points de vue ; à beaucoup d’autres, elle avait ouvert les yeux. Tant qu’il s'était agi, du moins apparemment, d’une dispute d’opinion, les plus anciens wiclifistes n’avaient fait qu’un avec les plus jeunes. La rupture avec l'Église devenue ouverte, beaucoup balancèrent. En automne de 1411, Jean XXIII ordonnait une croisade publique contre Ladislas de Naples, protecteur de Grégoire XII. son rival entêté, d’ailleurs déposé à Pise (1409). A Prague, elle fut prèchée en mai 1412. Le peuple fut conduit dans les églises au son du tambour ; l’indulgence était négociée par entremetteur pour les cures et les diaconés. S’il est une mesure dans les choses, la méthode, sans aucun doute, avait évidemment manqué. Les esprits prévenus jiouvaient se servir de : cette maladresse pour crier à la simonie. Jean Hus. rééditant Wiclif et sa fameuse protestation contre les indulgences de la croisade des Flandres, 1383, essaya d’entraîner l’université dans une attaque.à fond. La faculté de théologie, Etienne de Palecz à sa tête, se refusant à le suivre, se prononça franchement pour le pape. Le 7 juin 1412, une discussion eut lieu dans la grande salle du Carolinuni. L’exposition de Hus est intitulée : Qua’slio magistri Johannis Hus.. de indulgenHis.La question qu’il posait était ainsi conçue : « Est-il permis, d’après la Bible, pour le bien du peuple, pour l’honneur de Dieu, pour l’utilité des royaumes et des croyants, d’appuyer les bulles de la croisade"? » La série de ses objections était prise mot à mot du dernier chapitre du livre de Wiclif Sur l'Église et de son traité De absolulione a pana et culpa. « Aucun pape, aucun évêque, disait Hus, n’est autorisé, au nom de l'Église, à saisir l'épée ; il doit prier pour ses ennemis, et bénir ceux qui le maudissent. L’homme doit obtenir le pardon de ses péchés par un repentir et une pénitence sincères, et non pas pour de l’argent. Si quelqu’un n’est pas prédestiné, l’indulgence ne peut l’aider, et si quelqu’un est prédestiné, le pape ne peut pas le savoir. On doit résister aux bulles du pape, si elles sont contraires à la sainte Ecriture. « 

De l’université, l’agitation passa dans la rue. Jérôme de Prague avait gi’oupé les partisans de Hus.. Quelques jours après la présentation du mémoire du chef, Wok von 'aldstein, connu aussi dans les milieux wiclifistes anglais, formait un rassemblement populaire, et l’on brûlait les bulles papales relatives