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HUGUES DE SA INI -VICTOR


c’esl la connaissance trouvée dans le nioiivenient de la raison, luinc cognilioiiem in ratiunali motu invenimua : cette connaisSiincc est confirmée par celle des mouvtments qui cxislent en dehors del'àme, huic autem agnilionicivlcriquoijue moins alteslantur : hoc ailaiiiinaUs, naturalis, localis. Erudilio diihisculicd, t. VII, c. xviii, col. 82(1. Sur ces trois arjzunienls tirés ile la satisfaclion des tendances naturelles de l’animal, du mouvement naturel de tout être vers la croissance et le dévelo|)pement, de l’ordre (v l’univers, cf. U. IJaltus, dans la Revue bénédicline. Maredsous, 1898, t. xv, p. 115-117. Ce n’est pas tout. Kenioulant de la créa-" ture au ciéateur, Hugues discerne en elle, avec la contingence qui, par voie de négation, mène à l’clre nécessaire, la dépendance et les perfections qui conduisent, celles-ci, par voie d’aflinnation, à la perfection absolue de la cause pren ière, celle-là, par voie de suréminence, à l’excellence de Dieu au regard de tout ce qui n’est pas lui. Cette terminologie ne se rencontre pas telle quelle dans les écrits de Hugues ; l’idée qu’elle exprime y apparaît. Cf. De arca Noe niorali, t. II, c. iv, P. L., t. CI. XXVI. col. 637-638. En démontrant l’existence de Dieu, la raison découvre quelque chose de sa nature. Celui de qui tout a reçu l'être n’a reçu l'être de personne, quod inde liquida comprobatur quia. si quidquid est creaturnm esse crediinus. nallum in rébus finem invenimus - - c’est le Non est procédera in infinitum de saint Thomas, Sum.//ieoL, I », q. ii, a.3.— Il est l'être a semetipso, et voilà l’aséité divine. 11 est l'être en qui l’essence et l’existence ne font qu’un, quidquid enim a semetipso est huic idem est esse et id quodest. Ilestl'ètreun, vraiment et souverainement un, essentiellement et invariablement un, et voilà la simplicité, l'éternité, l’immensité, l’immutabilité divines, sans distinction réelle d’essence et d’attributs, vere cutem unum est quod esseniialitcr unum est, oui totum est unum esse et simplex esse quod est. Erudilio didascalica, t. VII, c. XVII, XIX, col. 825, 827 ; cf. De sacrumentis, t. I, part. III, c. xi-xviii, col. 220-224. "Voir t. IV, col. 1159-1164. Ce que Hugues dit de l’omniprésence de Dieu est particulièrement digne d’attention : « personne, au xiie siècle, remarque A. Mignon, Les origines de la scolastique, t. i, p. 132-13, >, n’a traité ce grave sujet d’une manière plus heureuse. «  La raison, qui prouve Dieu un, prouve-t-elle également Dieu triue ? Tout d’abord, on croirait que telle est la pensée de Hugues. Cf. De sacramentis, t. I, part. III, c. XI. xix-xxxi, col. 220, 221-234 ; Erudilio didascalica. t. VII, c. xxi-xxiv, col. 831-834, et, parmi les écrits non authentiques, le Spéculum Ecclesiæ, c. ix, P. L., t. clxxvii, col. 377-380, écho fidèle de sa doctrine, les Quæstiones in Epistolam ad Romanos, q. xl-xlii, P. L., t. clxxv, col. 441, œuvre d’un disciple qui ne s’attache pas scrupuleusement à la doctrine t.u maître ; le Sermo xoiv in die sancio Paschæ, P. L., t. clxxvii, col. 1191. En y regardant de près, on recule devant une affirmation catégorique. Remarquons d’abord, avec U. Baltus, Revue bénédictine, t. XV, p. 204-209, que Hugues n’a pas voulu fournir une preuve de pure raison, indépendante des données de la foi. Lui qui affirme, en général. De sacramentis, t. I, nîirt. III, c. xxi, col. 234, que, « à moins d'être illuminée par la parole de Dieu, la i aison humaine ne peut trouver le chemin de la vérité », et cela avec tant de force, tant d’msistance, qu’on l’a qualifié, à tort du reste, de mystique outré, d’ennemi de la raison, précise, dans le cas présent, que, pour que l'âme découvre en elle-même quelque vestige de la Trinité, il faut qu’elle se sache créée à l’image de Dieu et qu’elle parte de cette connaissance : en namque prrfcclius auctorem suum manifestant quæ ill.us simililudini vicinias appropinquan/ ; hoc autem est ipsa rolionalis creatura, qna' rxccllentcr et proprie ad

illius simililudinem facta est, quie tune citius creatorem suum qiiem non videt agnoscil cum seipsam ad iUius imnginem /actam intelligil, c. xxi, col. 225. Cette preuve rationnelle, qui présuppose la foi, est-elle, dans l’idée de son auteur, apodi(ti<[ue et strictement concluante".' Oui, semble-t-il, puisque Hugues parle, c. XXI, XI, col. 225, 220, d’une démonslraiion claire, cluram demonstrutionem, qui prouverait, comprobaret, la Trinité. Mais, d’autre part, il dit que tout <e que l'âme découvre en elle n’est qu’un vestige de la "Trinité, une sorte d’avertissement et de souvenir, quasi udmonitio et recordatio prima trinum esse Deum, c. XIII, col. 211, et il ajoute, c. xxviii, col. 230 : Voilà ce que nous avons montré : un vestige quelconque, vesligium aliquod, de la 'frinité ; c’est tout ce que la raison jieut en saisir, et c’est peu de chose, et, coniparé à la perfection du mystère, ce tout n’est presque rien, quantum valet ratio humana de modico quod suum est, et datum est illi et est in illa, et modicum e.'t ad per/eclum /o/i/m. » Sous cette annonce emphatique d’une démonstration claire il y aurait donc tout simplement un argument de convenance, une simple comparaiî^on par voie d’analogie. Supposant divinement ré%élées l’existence de la Trinité et la formation de l’homme à l’image de la Trinité, les trois éléments : substance, intelligence et volonté-, que l'âme trouve formant une trinité dans l’Unité de son être, lui sont une image de la Trinité divine. Elle a là, dit U. Baltus, p. 209, « comme une preuve a posteriori, résultant de deux vérités de foi, lui montrant en elles un accord merveilleux, et l’amenant presque invinciblement à croire l’une, inaccessible, incompréhensible, absolument mystérieuse, par l’incontestable vérité de l’autre, plus saisissable, plus pénétrable, plus facilement soumise à son contrôle. Telle est, croyons-nou.s, l’expression fidèle de la pensée de Hugues. » Objectera-t-on que Hugues met sur le même plan la démonstration de l’unité et de la Trinité divines, venit ratio quee non solum esse Deum sed unum esse et trinum comprobaret, et, que puisque la preuve de l’existence et celle de l’unité de Dieu sont purement rationnelles, la preuve de la Trinité est de même nature '.' Nous répondrons que, dans sa démonstration de la Trinité, Hugues a pour point de départ une donnée de la foi, à savoir la création de l'âme à l’image de Dieu, ce qui n’a pas lieu dans sa démonstration de l’existence de Dieu et de l’unité divine. De là peut-être, c. xix, col. 224, la différence d’expressions : nunc diximus quomodo ratio vera probat quodDeus unuscst…, deinde etiam arguit et commendat quod non solum unus sed et trinus est Deus. Probat, c’est la preuve rationnelle proprement dite ; arguit et commendat, c’est l’argument de convenance. Ces derniers mots nuanceraient ce que les mots comprobaret et claram demonstrationem ont d’excessif. De là encore le recours explicite à l’autorité de la foi pour suppléer à l’infirmité de l’esprit humain dans la connaissance du dogme Irinitaire. De sacramentis, 1. H, part. I, c. iv, col. 376 ; cf. t. I, part. H, c. vu ; t. III, part. I, c. xxiii, col. 209, 226. De la cette formule habituelle : fides Trinitatis.De sacramentis, t. II, part. V, c. iii, col. 442 ; Erudilio didascalica, t. VI, c. iv, col. 803 (remarquer aussi la formule : sacramentum Trinitatis) ; De arca Noe morali, t. I, c. IV, col. 631, G34. D’ailleurs, Hugues n’est pas le seul dont le langage, en cette matière, ait besoin d'être sagement compris. « Dans nos docteurs scolastiques, comme dans les saints Pères, on rencontre souvent la théorie des processions [divines] présentée sous une forme syllogistique », alors que Pères et théologiens visent cependant non pas à établir apodictiquemeht un dogme inaccessible, mais à montrer » que, loin d’impliquer contradiction, le mystère se reflète dans les plus belles créatures ».