Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.1.djvu/14

Cette page n’a pas encore été corrigée
13
14
HOCHSTRATEN


universités et chancelleries épiscopales pour recueillir leur avis et donner ainsi à sa réponse une plus haute autorité. De fait, il trouva des approbateurs non seulement chez les théologiens de l’université de Cologne, mais encore chez ceux de Louvain, et auprès des évêques de Liège et d’Utrecht. Cependant, en apprenant la mort de Tomasi, Hochstraten ne voulut pas que sa réponse continuât de circuler ; il n’entendait pas, disait-il, combattre contre un mort. Néanmoins, cet écrit parut revêtu de l’approbation de plus de trente savants. Il était intitulé : Proledorium principum Alemanie de maleficis non sepeliendis contra Ravennalem, Cologne, 1511. Au début de cet opuscule, en date du 19 octobre 1508, se trouve une lettre adressée à Hochstraten par Adrien d’Utrecht, le futur Adrien VI, qui était alors chancelier et recteur de l’université de Louvain. Voir Guido Pasolini, Adriano VI. Rome, 1913, p. 20-21 ; N. Paulus, op. cit., p. 92, n. 2. Adrien prenait ouvertement parti contre Tomasi.

Le prieur de Cologne, Servatius Banckel, étant mort à Bâie, le 17 mai 1508, Hochstraten fut élu prieur. En cette qualité, il devenait de droit inquisiteur pour les provinces ecclésiastiques de Cologne, Mayence et Trêves. Il figure déjà comme inquisiteur dans un écrit de l’empereur Maximilien, du 10 novembre 1509. Bôcking, Hutleni operumsupplementum, Leipzig, 1864, t. I, p. 89 ; voir aussi Paulus, op. cit., p. 93. Ses débuts comme inquisiteur furent pour sévir contre l’opinion régnante alors, qu’il était permis d’avoir recours aux sorciers et aux magiciens pour lutter contre d’autres sortilèges. Il fit paraître sur ce sujet, en 1510 : Tractatus magistralis déclarons quam graviter peccent querentes auxilium a maleficis compilatus, Cologne, 1510. Hochstraten ne craint pas de déclarer hérétique cette pratique ; ceux qui s’y adonnent, s’ils persistent dans leur opinion, pourront être poursuivis et seront passibles de la peine du feu. Il montra qu’il prenait au sérieux ses fonctions d’inquisiteur, car surla fin de 1512, il iiTa au bras séculier pour être exécuté le médecin hollandais Hermann de Ryswick. P. Fredericq, Corpus documenlorum inquisitionis hæreticæ pravitaiis Necrlandicae, Gand, 1889, t. i, p. 498-502.

Hochstraten et le procès de Reuchlin.

Un juif

converti de Cologne, l’fefferkorn, pour hâter le retour de ses anciens coreligionnaires, pensa que le meilleur moyen serait de leur enlever les livres talmudiques. A cet effet, il obtint de l’empereur un preniicr mandat, le 19 août 1509, l’autorisant à rechercher et à détruire, en présence du curé du lieu et de deux représentants, tous les livres qu’il pourrait trouver opposés à la foi rhrétienne ou à la foi juive. Par un autre décret impérial, du 10 novembre 1509, la conduite de toute cette affaire était confiée à l’archevêque de Mayence, Uriel. Il devait s’assurer du concours des savants des universités de Mayence, Cologne, lùfurt et Heidclberg, ainsi que de l’inquisiteur Hochstraten, du juif converti Victor Carben et du savant hébraïsant Jean Reuchlin ; d’après un troisième rescrit impérial, du 16 juillet 1510, il devait recueillir l’opinion des uns et des autres. Reuchlin fut d’avis que seuls les pamphlets des juifs, ouvertement dirigés contre la foi chrétienne. devaient être reclierchés et détruits ; quant aux autres livres. on pouvait les conserver. Les autres consulteurs furent d’un avis beaucoup plus rigoureux ; Hochstraten et les docteurs de l’université de Cologne furent pour qu’on ne laissât aux juifs que la Bible ; les livres talmudiques

« levaient être confisqués, ainsi que plusieurs papes

l’avaient déjà maintes fois ordonné. Voir le vote de Hochstraten, en date du 9 octobre 1510. dans liôcking, Hutleni opcrum snppirmentiim, t. i, p. 99 sq. L’empereur appela l’affaire à lui et elle n’eut pas d’autre suite, sous cette forme du moins, car la question des livres juifs allait entrer dans une nouvelle phase. — Reuchlin

avait vivement pris à partie Pfefferkorn dans son avis motivé ; celui-ci répondit sur un ton très violent dans son Handspicgel (Miroir à la main), paru en 1511 ; Reuchlin répondit sur le même ton par son Augenspiegel (Miroir des yeux), qui parut à Francfort, dans le courant de l’automne 1511. Le curé de cette ville, Petrus Meyer. crut découvrir dans ce livre de Reuchlin des propositions erronées et l’envoya à Hochstraten, inquisiteur pour la province de Mayence, dans laquelle le livre avait paru et se vendait. Hochstraten ne voulut rien précipiter dans une question aussi délicate et envoya le livre à l’université de Cologne pour qu’il fût examiné, en vertu des privilèges de censure accordés à cette université par le pape Sixte IV. Voir N. Paulus, op. cit., p. 95. L’examen du livre fut confié par l’inquisiteur et la faculté de théologie à Arnold de Tungern et à Conrad Kollin. Un échange de lettres entre Reuchlin et Cologne vint encore envenimer le débat. Dans un nouvel écrit paru en 1512, Reuchlin soutenait plus que jamais sa façon de voir. Conrad de Tungern y répondit dans un factuni en latin, où il demandait que VAugenspiegel de Reuchlin fût condamné, comme favorisant les doctrines juives contre la vérité chrétienne. II reprenait également l’humaniste d’avoir cherché à intimider la faculté de Cologne. De son côté, Pfefferkorn publiait contre son adversaire son Brandspiegel ; il reprochait très vivement à Reuchlin de l’avoir traité de menteur et ne lui épargnait pas non plus de son côté les épithètes les plus malsonnantes. L’empereur MaximiUen, le 7 octobre 1512, fit condamner VAugenspiegel. Reuchhn néanmoins fit paraître une apologie contre les théologiens de Cologne, où il les traite de « moutons, de boucs, de pourceaux », etc. Il demandait à l’empereur que les deux partis gardassent désormais le silence ; les théologiens, de leur côté, intervenaient auprès de l’empereur pour que Reuchlin mît un terme à ses injures. Pendant ce temps, les universités de Cologne, Louvain, Mayence, Erfurt et Paris, mises par Hochstraten au courant de la question, se prononçaient toutes contre Reuchlin ; la faculté de Paris porta son jugement le 2 août 1514. Voir Du Boulay, llist. uniu. JParis., t. vi, p. 47-69, 107 ; d’Argentré, Collectio judiciorum, t. i, p. 350-351. L’année suivante, le 2 mai 1515, elle intervint de nouveau pour hâter la condamnation du livre de Reuchlin. Voir L. Delisle, Notice sur un Registre des procès-verbaux de la faculté de théologie de Paris, 1899, p. 39.

Fort de cet appui, Hochstraten entra en scène comme inquisiteur. Au mois de septembre 1513, il citait Reuchlin à comparaître à Mayence, devant son tribunal ; mais celui-ci en appela au pape. Léon X remit alors la chose à l’archevêque de Spirc, le comte palatin, Georges, qui de son côté chargea le prévôt Thomas Truchsetz, un disciple de Reuchlin, de trancher le différend. La sentence fut portée le 29 mars 1514 ; il était déclaré que le livre de Reuchlin, Augenspiegel, ne contenait aucune hérésie, ni ne favorisait les juifs ; par conséquent sa lecture était non seulement permise, mais même à recommander..u contraire, Hochstraten était condamné à payer les frais du procès qui se montaient à 1 100 florins d’or, et de plus à s’abstenir désormai— ; de se mêler de ces questions. Comme on pouvait s’y attendre, Hochstraten ne voulut point se rendre à une sentence aussi blessante pour lui et, par l’intermédiaire de son procureur à Spire, Fr. Jean Host de Romberg, il interjeta aussitôt appel au pape de la sentence du tribunal de Spire. Le pape nomma le cardinal (Irimmi juge de l’affaire. Le H juin 1514, le cardinal ap]>cla les partis à Rome ; seul Hochstraten s’y rendit ; son grand âge empêcha Reuchlin de s’y présenter, mais il s’y fit défendre par un procureur. Les choses traînèrent en longueur. Sur ces entrefaites, les partisans de Heurhlin et tous ceux que l’on désignait