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VII, c. i, P. G., t. ix, col. 481 ; S. Cyrille d’Alexandrie, In Joa., 1. IV, c. iv, P. a., t. lxxiii, col. 027 ; S. Anselme, CurDeus homo, 1. I, ç. ii, P. /.., t. clviii, col. 302. Cf. Scheeben, Dogmatique, trad. franc., 1877, t. i, n. 852 sq., p. 552 sq.

De même dans la controverse protestante, la voie efficace et relativement courte consistera à poser d’abord la question capitale de méthode, la question de la règle de foi, autant qu’on pourra l’obtenir d’eux ; car, en supposant leur méthode sans la discuter, ils préfèrent se jeter sur des dogmes particuliers et des questions de détail, à trancher par la seule Écriture ou les anciens monuments de la tradition. Déjà Tertullien avait noté la marche à suivre dans la polémique. De præscripl., c. xvii, P. L., t. il, col. 30 ; cf. c.xv, xix. Voir Freppel, Tciiullien, t. ii, p. 212 ; d’Alès, La théologie de Terlullien, p. 205. Que dire de ces modernistes, véritables protestants par la méthode, qui des enseignements de Jésus ou de Paul ne retiennent comme certain que ce qu’ils ont pu tirer d’une exégèse purement philologique et historique ? ou de ces catholiques qui, dans leur controverse avec l’hérésie, acceptent sur le terrain soit de la seule Écriture, soit des plus anciens Pères, la discussion d’un dogme particulier quelconque' ! N’y a-t-il pas des vérités révélées, appartenant, par exemple, aux sacrements ou liées logiquement avec eux, cpii ont pu se conserver implicitement mais suffisamment dans la seule pratique de l’administration des sacrements, pratique oralement transmise par les ministres entre eux ? Bien des détails de cette pratique n’ont laissé que peu ou point de traces dans les plus anciens écrits ; mais l’autorité ecclésiastique en avait conscience, et plus tard par des définitions elle nous a garanti et ces détails et les vérités dogmatiques qui s’y rattachent. La méthode historique ne peut donc suffire à nous fournir tout le donné révélé, ni à prouver que tous nos dogmes rejoignent l’ancienne révélation.

Pour achever de décrire le grand rôle de l'Église dans la foi, il faudrait montrer comment elle peut servir de motif de crédibilité : mais ce point sera traité ailleurs.

II. JUSTES LIMITES D<7 RÔLE HE L'ÉGLISE HA.S l 1

foi. — Après ce que nous venons de dire, une contre-partie s’impose, soit par souci de la précision, soit à cause des exagérations de quelques catholiques ou protestants. Avec les théologiens et pour éviter une longue périphrase, nous appellerons « proposition d’une vérité par l'Église » l’acte par lequel l'Église infaillible, entrant en communication avec le croyant et lui faisant connaître son autorité et sa mission, lui présente cette vérité comme révélée de Dieu, en lui notifiant l’obligation de la croire. D’après la doctrine commune, nous poserons les principes suivants :

1° La proposition par l'Église n’est pas une condition essentielle de l’acte de foi divine et salutaire. — En voici quelques preuves :

1. Dans saint Paul, Abraham nous est présenté comme le modèle achevé de la foi qui doit nous conduire à la justification et au salut. Rom., iv, 4 sq. Et cependant, puisque l’autorité doctrinale de l'Église n’existait pas de son temps, le patriarche n’a pu y appuyer sa foi : ce n’est donc pas une de ces conditions essentielles, qui ne peuvent en aucun cas faire défaut.

2. Même dans le Nouveau Testament, Act., ni, iv, nous voyons saint Pierre, après avoir prouvé par un miracle la divine mission du Christ « et sans faire aucune mention de l’autorité de l'Église ou de la sienne, convertir cinq mille hommes qui, sans doute, sont arrivés prudemment à faire un acte de foi (avant le baptême), bien qu’ils n’eussent pas encore l’idée de l’autorité de l'Église. » Lugo, De fide, dist. I, n. 252, Opéra, Paris, 1891, p. 122.

Et pareillement de nos jours l’infaillibilité de l'Église

n’est pas présentée nécessairement la première à notre foi. « L’expérience montre cpie les enfants ou les adultes qui commencent à être instruits dans la foi ne conçoivent pas toujours cette autorité infaillible de l'Église, cette assistance de l’Esprit-Saint, avant (le croire tout autre article. Ils croient les articles de foi dans l’ordre où on les leur donne ; et il arrive ainsi qu’ils croient cette vérité après plusieurs autres. » Lugo, loc. cit., n. 247, p. 120. Ni le symbole des apôtres, ni les catéchismes ne parlent en premier lieu de l’autorité infaillible de l'Église : or ils devraient le faire, si la foi aux autres articles n'était possible qu'à la condition de passer par ce dogme. Il y a donc quelque exagération dans la polémique de Bossuet contre le ministre Claude et dans sa célèbre conférence. Œuvres, édit. Lâchât, t. xiii, p. 544, 558, 583.

3. S’il arrive qu’une vérité révélée, comme l’immaculée conception avant sa définition, se trouve obscurcie par la controverse, voir col. 161, et qu’en conI séquence le magistère ecclésiastique ne la propose pas aux fidèles comme un objet de foi obligatoire, mais tolère qu’on ne la croie pas, elle n’est cependant pas perdue alors pour la foi de l'Église entière ; un certain nombre de fidèles la croient toujours très fermement comme révélée, et elle est ainsi conservée, quoique imparfaitement, dans la foi de l'Église, qui avec l’assistance divine ne peut perdre complètement une partie de son objet, de son patrimoine de vérité. Or, ceux qui croient alors ce point de révélation ne peuvent s’appuyer sur le magistère vivant et infaillible, puisqu’il se retire et se tait, pour le moment, en attendant une définition s’il y a lieu : voilà donc encore un cas où la foi ne s’appuie pas sur sa règle prochaine, l'Église infaillible, mais seulement sur ses règles éloignées. C'était donc une mauvaise théologie que Dôllinger, en 1870, opposait à la définition de l’infaillibilité pontificale, en tâchant de prouver ainsi que VÉglise n’avait jamais cru ce qui allait être imposé sous peine d’anathème à la foi des catholiques : « Elle ne l’a pas cru. Car ceux-là même qui ont regardé jusqu’ici comme certaine cette infaillibilité du pape ne pouvaient la croire dans le sens chrétien du mot… Le catholique ne peut et ne doit croire que ce qui est enseigné et proposé par l'Église comme vérité révélée par Dieu, appartenant à la substance de la doctrine du salut, élevée au-dessus de toute espèce de doute. Il ne peut et ne doit croire que les vérités dont la confession est nécessaire pour appartenir à l'Église, dont la négation est absolument prohibée par l'Église et rejetée comme erreur manifeste. Donc personne, depuis les commencements de l'Église jusqu'à nos jours, n’a cru réellement à l’infaillibilité du pape… Beaucoup ont simplement supposé, admis comme probable, ou tout au plus comme humainement certain, fide humana, cette prérogative. Par suite (la définition) serait un événement unique dans l’histoire de l'Église…, une révolution dans l'Église. » Dans Granderath, Histoire du concile du Vatican, trad. franc., Bruxelles, 1911, t. n b, p. 286. Cf. le texte allemand de Dôllinger dans les Acla du concile, Colleclio lacensis, t. vii, col. 1473. Un pareil sophisme aurait pu être opposé à toute définition des anciens conciles rétablissant l’unité parmi les catholiques sur un point de foi, et rendant ce point désormais obligatoire. D’ailleurs Dôllinger ne tient pas compte de la période de foi unanime qui a précédé l'époque d’obscurcissement et de controverse : car tous ont d’abord cru, au moins pratiquement et implicitement, à l’infaillibilité du pape, avant l’origine de la controverse, qui a eu pour occasion le grand schisme d’Occident et le désir d’y mettre fin..Mais de plus, comme lui répondit alors la Civiltà, « le chrétien peut croire tout ce qu’il reconnaît comme révélé de