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influence ; mais ils ne se sont pas même donnés comme envoyés de Dieu, parlant en son nom ; la « révélation » qu’ils ont fournie ne pouvait donc être un témoignage de Dieu, ni l’adhésion à leur enseignement ne pouvait être la foi divine que nous cherchons. Les autres, comme Moïse ou Mahomet, ont affirmé une mission surnaturelle et prophétique : mais ce n’est pas tout d’affirmer ce fait mystérieux, il faut le prouver, autrement nous serions à la merci du premier venu, illusionné ou trompeur, et, sous couleur d’obéir à Dieu qui parle, nous ferions même injure à Dieu, en nous exposant à confondre avec une parole purement humaine sa parole sacrée, à dégrader la majesté infinie de son témoignage, et à lui faire patronner l’erreur comme un faux témoin. Or le rationalisme, en rejetant tout miracle, supprime la seule preuve qui pourrait nous garantir la mission surnaturelle prétendue. En effet, le miracle supprimé, que reste-t-il ? Et par quel signe Dieu fera-t-il voir qu’il se porte garant de ce que ces grands hommes enseignent ? Leur génie, leur éloquence, leur science, leur utilité relative, leur succès ? Mais Dieu n’est pas tenu de réserver ces dons à ceux-là seuls qui sont ses envoyés infaillibles, et avec l’enseignement desquels il se solidarise. Ces dons sont choses qu’il distribue à ses ennemis aussi bien qu'à ses amis ; et on peut les rencontrer dans une aventure déplorable, aussi bien que dans une œuvre surnaturelle et divine. Enfermer Dieu dans le cours naturel des choses, comme l’ont fait les déistes et les rationalistes, c’est donc lui refuser toute possibilité de se servir des hommes comme ses envoyés, pour témoigner par eux et faire appel à notre foi. — Et en voici la raison profonde. Quand les causes secondes agissent suivant le cours ordinaire de la nature, Dieu n’est pas obligé d’intervenir surnaturellement à tout instant pour empêcher les défauts naturels de leur action, par exemple, les erreurs de l’homme, même de science et de génie, ou les succès de l’erreur. Il convient même crue Dieu tolère ces défauts de la nature, soit pour laisser aux choses un cours régulier qui ne déroute pas à chaque instant les prévisions de l’homme, soit pour laisser à la liberté humaine ordinairement tout son jeu ; et la tolérance n’est pas l’approbation. Sans doute, la providence surveille tout, et rien ne se fait sans son laisser-passcr : mais Dieu ne veut pas de la même manière tout ce qui se fait ; s’il est des choses qu’il veut positivement, et qui correspondent à son plan, à ses lois, il en est beaucoup d’autres, par exemple, le péché, la ruine des âmes, le succès d’une fausse religion, où simplement il laisse faire, sans prendre la responsabilité de ce qui se dit et se fait. Concile de Trente, sess. VI, can. 6, Denzinger, n. 810. Calvin seul a nié la distinction « hces deux manières de vouloir en Dieu ; du reste, ailleurs, sous la pression du bon sens, il est revenu sur cette négation. "Voir Calvinisme, t. ii, col. 1408, 1419. Si donc l’on veut plus qu’un simple laisser-passer, si l’on veut que Dieu, à travers l’intei médiaire humain, ait l’intention positive de nous parler, et nous la manifeste — sans quoi il n’y aurait de sa part ni parole ni témoignage faisant appel à notre foi — il faudra qu’il recoure à un signe dépassant l’action naturelle de foutes les causes secondes,

à un signe qu’il s’est réservé comme une propriété de sa puissance suprême, le miracle. Tombant sur l’enseignement d’un homme, le miracle nous y fait reconnaître une parole que Dieu a inspirée et dont il prend pon abilité En dehors du miracle)r ' s M s, , " s impie qui comprend la prophétie, le miracle interne. ! miracles moraux), il ne reste que le cours naturel, |es événements, où Dieu, à un moment donné, peut simplement laisser faire, et qui, par conséquent, ne peut ervii à marquer sou approbation. Admettre un Dieu personnel <t rejeter le miracle, comme l’ont

fait les rationalistes, c’est donc rendre impossible le témoignage de Dieu, seul motif de la foi chrétienne ; c’est faire de Dieu un roi muet enfermé dans son palais, qui ne peut ni parler à son peuple ni même lui écrire, qui ne peut faire savoir, par exemple, s’il veut pardonner et à quelles conditions, ni communiquer un secret, ni déterminer par une loi positive le culte qu’il désire et les prescriptions souvent si vagues de la loi naturelle. Une telle conception de Dieu contredit absolument celle que nous donnent les Évangiles et les Épîtres de saint Paul ; les « rationalistes chrétiens » , ou de quelque autre nom qu’ils se parent, font preuve de rationalisme, mais non de christianisme. Voir Crédibilité, col. 2216-2219 ; S. Thomas, '] Cont. gentes, 1. III, c. cliv.

En passant, on peut voir à quoi sert le miracle dans la révélation et dans la foi. Certains catholiques, mécontents de l’apologétique traditionnelle, ne le voient pas, ou bien s’imaginent que le miracle sert uniquement à abattre l’homme devant la puissance de Dieu, ou à étonner, à attirer les regards distraits, à la manière d’un prédicateur qui a le tort de frapper du poing sur la chaire pour forcer l’attention. Une comparaison meilleure, et traditionnelle celle-là, c’est que le miracle est comme la signature ou le cachet divin au bas de la page inspirée. S. Thomas, Sum. IheoL, III » , q. xliii, a. 1. Dieu dirige la pensée et la parole d’un homme qui nous donne de sa part un enseignement, soit oral, soit écrit : voilà le témoignage spécial de Dieu, avec tout son détail d’affirmations et d'énoncés. Mais pour que cet enseignement soit connu de nous non comme humain, mais comme divin, et que nous puissions arriver ainsi à l’acte de foi, Dieu ajoute un complément nécessaire, le miracle confirmant la mission de cet envoyé : voilà un témoignage général de Dieu, tombant sur tout ce détail d'énoncés pour nous en montrer la provenance et par conséquent le véritable caractère. Les miracles, dit le P. Janvier. « c’est comme une seconde parole de Dieu qui rend témoignage à la première, c’est le doigt de Dieu apparaissant pour indiquer le livre et la tradition qui contiennent l’enseignement infaillible descendu d’en haut, ce sont les phares destinés à éclairer dans les profondeurs de la nuit ceux qui cherchent où la voix du Verbe s’est fait entendre, c’est le geste de la Puissance et de la Sagesse suprême, conduisant l’homme au sanctuaire où la Vérité suprême a rendu ses oracles. » La foi, carême 1911, 2e édit., n c confér., p. 76, Le miracle fait donc nécessairement partie de l’ensemble de signes par lesquels le témoignage divin et la foi nous sont donnés. Les simplistes auraient toit de reprocher à cet ensemble sa complication : la télégraphie, elle aussi, n’est-elle pas compliquée dans son mécanisme, et cela l’empêche -t-U d'être exacte et pratique ?

Suffisance de la révélation médiate.

Notre foi

peut s’appuyer sur des révélations très anciennes, reçues à l’oriRine par d’autres que nous : car la révélation, base de notre foi chrétienne, est un témoignage de Dieu, et un témoignage peut se transmettre par la parole ou l'écriture à plusieurs siècles de distance, autrement les sciences historiques n’existeraient pas. Voir col. 129. Cette révélation ancienne qui, grâce à un premier intermédiaire Inspiré, puis a des intermédiaires historiques, vient aujourd’hui faire appel à notre foi, c’est ce que les théologiens appellent la

révélation médiate » . L- : t Us enseignent communément

qu’eue nous suffit a faire l’acte de foi, sans révélation

Immédiate lurnatureDement produite en nous, l’uis qu'à la foi chrétienne répond comme motif l' autorité du témoignage de Dieu, il suffit que i ' igc ROi ! présenté a M foi lune manière on d’une autre,

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