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GARET — GARNIER


prêtre, il remplit pendant quelque temps les fonctions de sous-prieur de sa communauté. Il devint ensuite directeur du couvent des religieuses de Mishagen, à Feckeren, près d’Anvers.. Il s’adonnait dès lors avec une sorte de prédilection aux matières de controverse religieuse, y consacrant tous les loisirs que lui laissaient les devoirs de sa charge. Plus tard, l’évêque Corneille Jansénius de Gand, qui l’avait connu à Louvain et qui le tenait en haute estime, l’appela auprès de lui et lui confia la direction d’un couvent de « Pénitentes » ou « Filles de Dieu » . Contemporain des premiers écarts doctrinaux et des premières commotions sociales qui se couvraient du beau nom de réforme, il s’y montra toujours très opposé. Il les combattit par la parole et par la plume. Les divers écrits qu’il publia dans ce but témoignent d’une grande sûreté de jugement, d’une vaste information et d’un attachement éclairé aux sources traditionnelles. Il eut la joie d’en voir quelques-uns se répandre au point d’être réimprimés plusieurs fois en peu d’années. Bellarmin, Suarez et d’autres controversistes fameux l’ont mis à contribution et le citent avec éloge. D’une santé débile, Garet l’affaiblit encore, si nous en croyons les contemporains, par trop d’acharnement au labeur studieux. Il était d’ailleurs atteint d’une claudication assez prononcée, qui contribuait à lui donner une apparence plutôt chétive. Ces circonstances l’amenèrent à refuser le siège épiscopal d’Ypres, qui lui fut offert lorsque Philippe II dota la Belgique de quatorze nouveaux évêchés. Dans ses dernières années, il souffrit cruellement de la pierre. C’est cette maladie qui l’emporta, le 21 janvier 1571.

Voici les ouvrages qui nous restent de lui : 1° De vera prœscnlia corporis Christi in sacramento eucharisliæ classes IX, conlra sacramentariam pestem ex omnibus ferc ecclesiasticis aucloribus summo studio collectée. Adjecta est ad calcem décima classis, Christum suæ Ecclesiæ perpeluo adesse, eamque in fide nec errasse nec errarc posse ostendens, in-8°, Anvers, 1561. C’est l’œuvre principale de Garet ; elle consiste en un recueil très exact et très compréhensif des passages patristiques qui établissent le dogme de la présence réelle. Les « neuf classes » , mentionnées en tête du volume, sont autant de sections assez singulièrement réparties : la I rc en effet, qui est de beaucoup la plus longue, embrasse la plupart des textes depuis les origines de l’Église jusqu’au temps de l’auteur ; la IIe est consacrée aux témoignages des poètes ; la IIIe à ceux des femmes ; la IVe à ceux qui sont anonymes ; la Ve à ceux des conciles tant universels que particuliers ; la VIe aux miracles de signification parallèle ; la VIIe aux visions ; la VIIIe aux aveux des juifs et des hérétiques jusqu’à Luther et aux luthériens inclusivement ; la IXe à ceux des juifs et des païens. C’est en substance le même recueil qui reparut un peu plus tard sous ce titre : Universalis et catholicæ Ecclesiæ de veritale corporis Christi in eucharisliæ sacramento pressentis consensus. Sacrificii missæ et aeremoniarum asserlio, ex sanctis Palribus et ex omnibus omnium œlalum scriptoribus summo labore collecta, in-8°, Anvers, 1563. Seulement, ici, la partie relative au saint sacrifice est nouvelle, et l’ancien fonds, ramené à l’ordre chronologique pur et simple, se trouve distribué en seize siècles. Sous une troisième étiquette, le livre devint : Omnium œlalum, nalionum ac provinciarum in verilalem corporis Christi in cucharistia consensus, per X VI annorum cenlenarios collcclus. Editio terlia. Sacrificii missæ, preeum, eœremoniarumque, neenon epilhelurum cjus ex sanctis Palribus et universa anliquitale collecta asserlio, in-8°, Anvers, 1569. Cette fois, la IIe partie est plus que doublée et se présente avec une pagination spéciale.. Il y eut encore d’autres éditions, publiées à Paris, à Lyon et à Venise. Au

siècle suivant, le janséniste Antoine Arnaukl et son docile collaborateur Pierre Nicole puisèrent à pleines mains dans ce volume, pour leur grand ouvrage sur la Perpétuité de la foi louchant l’eucharistie ; et l’on a pu dire justement que c’est à Garet que les deux sectaires sont, pour une bonne part, redevables de leur renom de solide et saine érudition. 2° De morluis vivorum precibus juvandis, in-12, Anvers, 1564 ; une 2e édition, à Anvers, 1570, s’annonce plus explicitement comme Mortuos vivorum precibus adjuvari ex sanctis Palribus asserlio ; 3° De invocatione sanctorum, in-8°, Gand, 1570.

Sander, Brabantia sucra, t. ii, p. 227 ; Foppens, Bibliollwca belgica, t. ii, p. 645 ; Pennoti, De sancti aposlolieique ordinis canonicornm regularium origine et »rogressu, 1. II, c. lxv ; Biograi>liie nationale de Belgique, Bruxelles, 1880-1883, t. vu. „ t

J. FoRGET.

    1. GARNIER Jean##


1. GARNIER Jean, jésuite français, l’un des savants du xviie siècle les plus versés dans la critique des textes et l’un des théologiens qui ont le mieux mérité de la patrologie et de l’histoire des dogmes. Né à Paris le. Il novembre 1612, Jean Garnier achevait ses humanités avec un éclatant succès quand il entra, n’ayant pas encore seize ans, au noviciat de la Compagnie de Jésus à Rouen, le 15 octobre 1628. Sucessivement professeur d’humanités, de rhétorique et de philosophie, il se voua bientôt tout entier à l’étude de la théologie qu’il enseigna pendant vingt-six ans au collège de Clermont, à Paris. Il mourut à Bologne, le 26 octobre 1681, en se rendant à une congrégation générale de la Compagnie de Jésus, comme député de sa province. Son enseignement lui avait acquis une extraordinaire réputation que ses savants ouvrages ont pleinement justifiée et maintenue. Tous témoignent qu’il possédait au plus éminent degré les lettres grecques et latines, l’histoire ecclésiastique des premiers siècles, la philosophie et la théologie. Il excellait même dans la casuistique, science tenue alors en grand honneur et qui aurait suffi à lui attirer l’estime universelle. « Sa capacité et son expérience dans les cas de conscience, dit le Journal des savants, 15 mai 1684, le faisaient regarder comme un oracle que tout le monde venait consulter avec la dernière confiance, et l’estime universelle que l’on avait conçue de sa probité et que la solidité même de ses réponses inspirait assez à ceux qui prenaient son avis, faisait respecter toutes ses décisions. » Cf. Nicéron, Mémoires pour servir à l’histoire, t. xl, p. 167.

Le P. Garnier enseignait encore les humanités quand ses érudites recherches l’amenèrent à examiner un manuscrit inédit découvert à Vérone par le P. Sirmond et contenant notamment le Libellus fulci envoyé par l’évêque Julien d’Eclanum au pape Zosime en faveur des pélagiens, l’an 418. Ce fut le premier contact direct avec l’antiquité chrétienne. Le P. Garnier donna de cet écrit une édition critique, enrichie de notes et de commentaires fort érudits, sous ce titre : Juliani Eclanensis episcopi Libellus fidei missus ad Sedem aposlolicam in causa pclagianorum, nunc primum ex codicc Veroncnsi editus, Paris, 1648. L’ouvrage a été inséré ensuite dans les Opéra de Marius Mercator, part. I, n. 6, p. 320 sq. Il reste douteux, toutefois, que Julien d’Eclanum soit l’auteur de cet écrit. A. Bruckner a repris récemment la discussion des arguments émis par le P. Garnier en faveur de l’authenticité, sans arriver toutefois à leur enlever leur forte probabilité. Julian von Eclanum, sein Lcben und seine Lehre, Leipzig, 1897, p. 31 sq., dans Texte und Unlcrsuchungen, t. xv, fasc. 3 a. Bruckner commet lui-même une erreur sur la date de l’édition première qu’il reporte à 1673. Cette édition avait mis en relief le haut savoir du P. Garnier et la sûreté de sa méthode. Quand mourut, en 1667, le