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GALLICANISME


anciens canonistes (ils n’ont pas encore été assez étudiés à ce point de vue) des doctrines et surtout des formules qui semblaient soumettre le pape à l’Église : le canon sur le pape hérétique par exemple ; 3. que le renouveau de l’aristotélisme dans l’École avait créé dans les esprits un concept démocratique de la société qui ne convient qu’analogiquement à la société théocratique et monarchique qu’est l’Église : on voulait, à tort, ramener au type de la société politique, alors conçue comme essentiellement constituée par l’accord de volontés égales, une société surnaturelle qui est plutôt du type de la société familiale, constituée qu’elle est par la transmission d’une vie (la grâce) passant d’un auteur (le Christ) aux fidèles par le ministère de ses vicaires ; 4. qu’il fallut enfin, au début du xve siècle, remédier au schisme pontifical par des mesures violentes, légitimées seulement aux yeux de beaucoup par les théories gallicanes canonisées, disait-on, au concile de Constance.

1. On ne trouve pas d’exposé de doctrine qu’on puisse proprement qualifier de gallican avant l’avènement de la dynastie capétienne : ni saint Irénée, ni les évêques gaulois réunis au concile de Turin au début du ve siècle, ni même saint Ililaire d’Arles en querelle avec saint Léon le Grand, ni les prélats francs de l’époque mérovingienne, ni les Pères du concile de Francfort (794), ni les évêques partisans de Louis le Pieux, qui reçurent si mal le pape Grégoire IV en 833, ni Hincmar de Reims, quoi qu’en ail dit son dernier et très méritant historien, H. Schroers, Iliiikmar von Reims, Fribourg-en-Brisgau, 1884, ne sont à proprement parler des gallicans. Les l’aiisses décrélales, dont on fait à tort l’une des sources principales de la doctrine ultramontaine, n’auraient pu s’imposer à la crédulité générale, avec l’invraisemblable facilité que l’histoire constate, si les théories sur la constitution ecclésiastique qu’elles supposent n’avaient pas été les théories mêmes de notre ancienne Église.

La première exposition un peu nette d’une conception gallicane de la constitution ecclésiastique se trouve et dans le discours au concile de Saint-Basle-de Verzy (près Reims) que Gerbert place dans la bouche de l’évêque Arnoul d’Orléans (17 et 18 juin 991) et dans les lettres même de Gerbert relatives à cette affaire. Les rois Hugues Capet et Robert, et les évoques auteurs de leur exaltation avaient i défendre contre un pape, qu’on supposaitdévoué aux Carolingiens et aux empereurs germains, la monarchie nouvelle, trahie par l’archevêque de Reims ; Gerbert, mis aux lieu cl place du traître, soutenait sa propre cause et. pour’nier toute intervention pontificale, écrivait à lin de Sens : Lex commuais Ecclesix callwlicæ Evangelium, apostoli, prophétie, canones Spirilu Dei ronsiiiuli ri lotius mundi reverentla consecrad, décréta Sedis apostoliese <il> his non discordanlia, formule qu’on dirai) tombée de la plume du rédacteur des I articles de 1682, etàWilderod de Strasbourg il disait : Orbis major est Urbe. Episl., ccxvii, édit. Havet. On sait, de reste, que Gerbert ne resta pas Cul.

sez révolutionnaires : pour les abandonner il n’attendit même pas d’être devenu le pape Sylvestre IL

2 C’est seulement au temps de Philippe le Bel qu’on voit apparaître avec éclat des théories spécifiquement

gallicanes, encore n’est ce point dans les actes des prélats qui adhérèrent M I juin 1303) < l’appel au concile de Nogarel et de Plasian i et appel était Justine* > yeux, non pas par mu— théorie de la supériorité du concile sur le pape, mais par la nullité de la demi rion de Célestln V, el partant de l’élection de Boni i i< VIII, pai i.i icance du li e, el lubsldlairemenl (au cas où ce moyen de droll lerail u la noto riété de l’hérésie de Boniface VIII : c’était le cas d’appliquer la loi sur le pape hérétique, ipso jaito exclu de l’Église. A cette date, la doctrine gallicane se rencontre chez le dominicain Jean de Paris qui a dit nettement : Concilium majus est papa solo, et surtout, quelques années plus tard, dans le fameux De modo concilii generali celebrandi adressé à Clément V par Guillaume Durand II, évêque de Mende, neveu et successeur du Spéculateur. Les thèses de cet évêque surla constitution de l’Église, plus exagérées que celles de Tournély, se rapprochent singulièrement d’un épiscopalisme outrancier, les évêques sont successeurs des apôtres, qui parcm cum Petro honorem et potesiatem acceperunt a Deo, part. III, c. xxxvii ; ils doivent avoir la pleine cura pecuniarum comme la pleine cura animarum et gouverner l’Église par des conciles périodiques réunis par provinces tous les deux ans et, pour toute la chrétienté, tous les dix ans : ces conciles nommeront des exécuteurs de leurs décrets. Durand a voulu réformer l’Église in capite et in membris ; l’abus déjà grand des réserves et des annates avait motivé ses plans révolutionnaires. On sait que réserves et impôts s’accrurent et se régularisèrent sous les papes d’Avignon et préparèrent ainsi les révoltes du siècle suivant.

3. Les philosophes de l’époque fournissaient les éléments d’une construction philosophique d’un traité de l’Église. Marsile de Padoue, en 1324, portait de Paris à Louis de Bavière un traité, le Defensor pacis, où il enseignait que, dans l’Fglise comme dans l’État, l’autorité réside dans le peuple qui, par le vote de sa majorité, la délègue, la retire, la modifie à son gré. Au concile, le peuple fidèle est juge de la foi et il règle la discipline par ses représentants ; le chef élu n’a jamais qu’un pouvoir instrumental ; le sacerdoce est égal en tous les prêtres ; Pierre, qui n’est jamais venu à Rome, n’a jamais eu de juridiction coactive sur ses confrères, etc., etc.

L’Inceplor venerabilis du nominalisme, le franciscain spirituel Guillaume Occam, semble bien (sa pensée exprimée dans un dialogue n’est pas facile à démêler) avoir reconnu au pape une vraie primauté de juridiction sur l’Église, le Christ lui a donné pour le salut des fidèles tout le pouvoir qu’on peut confier à un homme seul sans danger pour le bien commun ; au cas où ce pouvoir devient dangereux il n’est pas interdit de changer la constitution de l’Église, le concile en tous cas est supérieur au pape.

4. Aux principes philosophiques de Marsile de Padoue et à cette conception d’Occam sur l’autorité pontificale dont les prérogatives, au lieu d’être établies d’une manière définitive par la volonté du Christ, son créateur, sont mesurées strictement et à chaque époque parles exigences du but à atteindre, recourront bientôt tous ceux qui voudront porter remède au mal extrême du grand schisme.

Dès les premières années du schisme i 1 37’. » 1380), Conrad de Gelnhausen. un maître de Paris qui fonda l’université de Cologne, dans les deux éditions successives de son Epistola concordiee, déclarera « pic le pape est soumis au concile, et déliant des évêques, définira ce concile a la mode de Marsile : Miitlanim

personarum rite convocatewum gerentium vieem dioersorum êtatuum totius ehrisitanitatis.

Les di-erses Assemblées du clergé de France, OÙ

les universitaires prennent chaque fois une place plus grande, marchent dans le même sens ; de l’une a l’autre

on saisit le progrès des idées democrat iqucs et de la

conception qu’on pourrait dire finaliste de l’autorité ecclésiasl Ique,

i a 1 106, l’université de Paris, répondant au manifeste de l’université de Toulouse, qui avait affirmé qu’en aucun <e. Il n’était permis d’en appeler d’une sentence