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GALILEE


Simplicio, dans la bouche duquel se trouvaient divers arguments qu’il avait jadis opposés à Galilée au cours il’un entretien familier ? Cela n’est pas invraisemblable. Cf., sur ce point, H. de l'Épinois, dans la Revue des questions historiques, 1867, t. ii, p. 119 sq. ; Favaro, Le opère, t. xvi, p. 455. Des raisons plus graves étaient, du reste, de nature à le mécontenter ; Galilée avait manifestement enfreint l’engagement pris en 1616 de ne plus enseigner la doctrine copernicienne. Cela suffisait pour le perdre dans l’estime et dans la confiance du souverain pontife.

Aussi voyons-nous, dès la première quinzaine d’août (1632), Urbain VIII déférer le Dialogo à l’examen d’une commission extraordinaire. Par égard pour l’auteur et peut-être surtout pour son protecteur, le grand-duc de Toscane, le Saint-Office n’en fut pas d’abord saisi. La commission n’eut en quelque sorte qu’un caractère officieux. Dépêche de Niccolini, 18 septembre 1632, Alberi, Le opère, t. îx, p. 427.

Urbain VIII était pourtant très irrité. Le 5 septembre, apercevant Niccolini, ambassadeur de Toscane, il éclata en violents reproches : « Galilée, dit-il, a, lui aussi, la hardiesse d’entrer où il ne doit pas entrer, et d’aborder les matières les plus graves et les plus dangereuses que l’on puisse agiter en ce moment-ci. » « Mais il a imprimé son livre avec autorisation, » fit observer l’ambassadeur. « Oui, reprit le pape avec animation, Ciampoli et le maître du sacré palais ont été circonvenus : Ciampoli, sans avoir jamais vu et lu l’ouvrage, m’a affirmé que Galilée voulait se conformer en tout aux ordres du pape et que tout était bien. » Et L T rbain VIII se plaignit de Ciampoli et du maître du sacré palais. « On donnera du moins à Galilée le temps de se justifier ? » demanda Niccolini.

En ces matières du Saint-Office, on ne fait que censurer, reprit le pape, puis on demande une rétractation. » < Galilée ne pourrait-il pas savoir auparavant ce qu’on lui reproche ? » objecta Niccolini. « Je vous le dis, répliqua vivement le pape, le Saint-Office ne procède pas ainsi ; jamais on ne prévient personne auparavant, d’autant plus que Galilée sait très bien, s’il veut le savoir, en quoi consistent les difficultés, car nous en avons causé ensemble et le lui avons dit nous-même… Dépêche de Niccolini, 5 septembre, Alberi, Le opère, t. ix, p. 420.

Le rapport de la commission ne se fit pas attendre : en voici les conclusions : 1° Galilée a transgressé les ordres qu’on lui avait donnés, en abandonnant l’hypothèse pour affirmer absolument la mobilité de la terre ri hi stabilité du soleil ; 2° il a mal rattaché l’existence du flux et du reflux de la mer à la stabilité du soleil et à la mobilité de la terre, qui n’existent pas : 3° il a frauduleusement passé sous silence l’ordre, que le Saint -Office lui avait intimé en 1616, d’abandonner entièrement, de ne plus enseigner ni défendre, de quelque manière que ce fût, par la parole ou par les écrits, l’opinion d’après laquelle le soleil est le centre du monde et la terre se meut. » Von Gebler, Die Actrn, p. 53 ; ms. du procès, fol. 387 v°.

A côté de ce document, le recueil manuscrit des > du procès contient un rapport du même genre où se retrouvent les mêmes conclusions, un peu plus détaillées, sous huit chefs différents. Von Gebler, /" ieten, p. 56 ; ms. du procès, fol. 389. En fait, usation se ramené a ces deux chefs : Galilée a i aux ordres du Saint -Office et violé son engagement de 1* ; 16 ; Galilée, bien qu’il déchue vouloir traiter la question du mouvement de la terre bypothétiquement, procède pai voie d’affirmation et ne sa théorie de façon absolue. Ce sont les reproches qu’Urbain VIII formula expressément dans

un nouvel entretien qu’il eut avec Niccolini. Alberi, / ODere, t. ix. p. 435.

Le rapport de la commission concluait qu’il y avait lieu de délibérer sur la procédure à suivre « tant contre Galilée que contre son ouvrage. » Von Gebler, Die Acten, p. 53 ; ms. du procès, fol. 387 v°.

V. Le procès de 1633. — Le 23 septembre 1632, l’inquisiteur de Florence reçut l’ordre de signifier a Galilée qu’il eût à se présenter devant la commission du Saint-Office dans le courant d’octobre, afin d’expliquer sa conduite. Cet ordre émanait du pape. Von Gebler, Die Acten, p. 93 ; ms. du procès, fol. 394.

Galilée comprit alors en quels périls il s'était engagé. Il fit d’abord la sourde oreille et chercha à gagner du temps. Il offrit même de s’expliquer devant l’inquisiteur de Florence, prétextant son grand âge (près de soixante-dix ans), son état maladif et la fatigue d’un voyage à Rome. Von Gebler, Die Acten, p. 65-71 ; ms. du procès, fol. 397-407 ; cf. H. de l'Épinois, dans la Revue des questions historiques, 1867, t. ii, p. 120 sq. Ces atermoiements étaient inutiles. Ses amis ne doutèrent bientôt plus que le meilleur parti était d’obéir et de se soumettre : « Croyez bien, lui écrivait Niccolini, qu’il serait nécessaire de ne pas essayer de défendre ce que la Congrégation n’approuve pas, mais qu’il faudra s’en rapporter à ce que voudront les cardinaux : autrement vous soulèverez de très grandes difficultés. » Favaro, Le opère, t. xiv, p. 418.

Trois mois s'écoulèrent ainsi en vains pourparlers. Le pape à la fin s’impatienta. On eut beau lui présenter le certificat de trois médecins (le certificat est du 17 décembre 1632, von Gebler, Die Acten, p. 71 ; ms. du procès, fol. 307) attestant que Galilée était retenu au lit par la maladie. Se défiant du témoignage, il fit écrire le 20 décembre à l’inquisiteur de Florence que ni lui ni la Congrégation ne pouvaient et ne devaient supporter de tels subterfuges ; qu’il fallait vérifier si vraiment Galilée pouvait sans péril se rendre à Rome, en faisant constater par un commissaire, assisté d’un médecin, l'état réel du malade ; s’il pouvait venir, on ramènerait prisonnier et lié avec des fers ; si, au contraire, sa santé l’exigeait, on surseoirait au déplacement ; mais une fois le danger passé, on l’amènerait prisonnier, enchaîné et lié avec des fers. Dans tous les cas, le commissaire et les médecins devaient procéder aux frais de Galilée, parce que celui-ci s'était mis dans cette situation par sa faute et qu’il avait refusé d’obéir en temps opportun. Favaro, Le opère, t. xiv, p. 281.

De tels ordres paraîtront rigoureux. Mais Galilée les avait en quelque sorte provoqués. Rome ne faisait en somme que suivre la procédure ordinaire usitée dans les tribunaux, où il y avait contrainte par corps contre tout accusé qui refusait de se présenter librement.

La menace ne fut d’ailleurs pas mise à exécution, Le 20 janvier, Galilée se décida à prendre le chemin de la Ville éternelle. Von Gebler, Die Acten, p. 73 ; ms. du procès, fol. 411. I ne litière du grand-duc de Toscane lui servit de véhicule. Il arriva à Rome en un état de santé très satisfaisant, le 13 février 1633.

Comme tous les accusés, fussent-ils prélats ou évêques, il devait s’attendre a être interné dans une des cellules du Saint-Office. Par une gracieuse exception faite en sa faveur, la résidence de l’ambassadeur Niccolini, « le palais de Florence (sur la place de C6 nom, et non la villa Médlcis, comme on l’a cru), lui fut assigné pour domicile. Cf. Favaro. Quale il domtcilio

di Gallleo in Roma durante il seconda pmrcsso, dans Archivio sloriro (lallano, 1906, fasc. 2. Il y trouva non seulement le logement et la table, mais des menti de toute SOlte, au sein d’une famille rirl déVOUée. Plus tard, pour éviter les interruptions dans la procédure, on lui fd quitta cette retraite, mais alors encore il eut pour demeure, au lieu d’une piison, l’ap