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FUENTELAPENA - FUITE PENDANT LA PERSÉCUTION


Mémoires de Trévoux, janvier 1702, p. (i()0 ; Bernard de Bologne, BiblioUieca scriptorum ordinis /r. min. capuccinorum, Venise, 1747 ; Bichard et Giraud, Dizionario délie scienze ccclesiasticlie, Naples, 1845, t. iv.

P. Edouard d’Alençon.

    1. FUITE DES OCCASIONS DE PÉCHÉ##


1. FUITE DES OCCASIONS DE PÉCHÉ. L’attrition et la contrition, consistant essentiellement dans le regret et la détestation du péché commis, impliquent nécessairement le ferme propos de ne plus le commettre à l’avenir. Cf. concile de Trente, sess. xiv, c. iv, De conlrilione. Or, nous enseigne l’Esprit-Saint : Qui aime le danger, y périt. Eccli., iii, 27. Le pénitent serait donc bien téméraire, et, pour sa persévérance, il ne pourrait compter sur les grâces de Dieu, s’il ne fuyait avec soin les occasions, quelles qu’elles soient : personnes, compagnies, réunions, objets, endroits, etc., qu’une expérience personnelle, ou les lois générales de la prudence lui démontrent être pour lui un véritable danger de pécher.

Fuir les occasions de ce genre n’est pas un simple conseil : c’est un précepte rigoureux. Si votre œil vous scandalise, dit le Sauveur, arrachez-le ; et si votre main ou votre pied vous scandalisent, coupez-les, car il vaut mieux perdre un membre du corps que d'être jeté tout entier dans l’abîme du feu éternel, Matth., v, 28-30 ; xviii, 8-9 ; Marc, ix, 49 ; c’est-à-dire éloignez-vous, même au prix des plus durs sacrifices, de tout ce qui vous porte au péché. Le grand remède au mal, c’est la fuite de l’occasion, dit saint Grégoire deNazianze : Méya y.a/.t’a ; cpâp(j.ay.ov çui-ï) tûû 7rrat<T|J.aro ;. Oral., xvi, in patrem tacentem, c. xvii, P. G., t. xxxv, col. 958.

De ce devoir austère on ne saurait être dispensé, en principe. Parmi les propositions condamnées par le pape Innocent XI, se trouve, en effet, celle-ci qui est la 62e de la liste : Proxima occasio peccandi non est fugienda, quando causa aliqua utilis vel honesla non fugiendi, occurril. Et celle-ci encore, qui est la 63e : Licilum est quærere directe occasionem proximam peccandi, pro bono spirituali, aut temporali nosiro, vel proximi.

Sans l’accomplissement de cette condition, le ferme propos ne pourrait être considéré comme sérieux. Par suite, il serait insuffisant pour la réception de l’absolution. Comment le pénitent se flatterait-il de détester réellement le péché, s’il s’exposait si imprudemment à le commettre de nouveau ? Qui veut atteindre un but doit vouloir prendre les moyens qui y conduisent. Qui tenetur ad finem, tenetur et ad média.

L’obligation de fuir les occasions de péché est plus ou moins stricte selon que le péché est plus ou moins grave, et que l’occasion influe plus ou moins efficacement sur la volonté, c’est-à-dire est plus ou moins prochaine, soit d’une façon absolue pour tous, en général, soit d’une façon relative pour tel ou tel individu. Il nous suffira, ici, d'établir le principe. L’application aux divers cas particuliers qui peuvent se présenter nécessiterait de nombreux développements de détails qui trouveront mieux leur place ailleurs. Voir Occasions de péché.

Salmanticemes, Cursus theologiæ moralis, tr. De sacramentel pœnilentiæ, c. v, p. iv, n. 57, 6 in-fol., Venise, 1728, 1. 1, p. 151 sq. ; Palmieri, Opus llieologicum morale in Buscmbaum medullam, 7 in-8°. Prato, 1889-1893, t. i, p. 576 sq. : t. ii, p. 193 sq. ; t. v, p. 99-109 ; Lehmkuhl, Theologia moralis, part. II, 1. I, tr. V, De sacramento pœnilentia', c. ii, § 1, 2 in-8°, Fribourg-en-Brisgau, 1902, t. ii, p. 317 sq.-, The eatholic encyclopedia, au mot Occasions o/ sin, 15 in-4°, New Vork, 1907-1913. t. xi, p. 196 sq.

T. Ortolan.

2. FUITE PENDANT LA PERSÉCUTION.

I. De la part des chrétiens en général. II. De la part de ceux qui ont charge d'âmes.

I. De la part des chrétiens en général. Quand on vous persécutera dans une ville, fuyez dans une autre, recommandait Xotre-Seigneur à ses disciples, en leur prédisant qu’on les traînerait de tribunal en tribunal, qu’on les Ilagellerait dans les synagogues, et qu’un très grand nombre les poursuivraient d’une haine inflexible à cause de lui : Mais, ajoutait-il, je vous le dis en vérité, vous n’achèverez pas toutes les villes d’Israël, que le Fils de l’homme ne vienne. Matth., x, 17-23.

Erreurs.

1. Précepte ou conseil, ces paroles sont extrêmement claires. Il a fallu toute la

malice des hérétiques et la perversion des impies, pour les détourner de leur sens naturel. On regrette de voir à la tête de ceux qui s’adonnèrent à ce travail ingrat celui qui fut l’un des plus grands apologistes de la religion chrétienne, Tertullien. Tombé dans les erreurs des montanistes, il déploya une incomparable ardeur à répandre les doctrines de cette secte qui, ne concevant pas la vertu sans un rigorisme exagéré, prétendait que fuir, pendant la persécution, pour se dérober aux supplices et se priver de la couronne du martyre, était un véritable crime, que nulle raison ne pouvait excuser.

Le génie de Tertullien, dans le traité De fuga in persecutione, écrit en 202, P. L., t. ii, col. 103-120, accumule sophismes sur sophismes pour rendre sa thèse acceptable en apparence, malgré les paroles si nettes de Notre-Seigneur qui la contredisent si formellement, et la condamnent à l’avance. Il établit, d’abord, comme un principe d’où découlera tout son raisonnement, que non seulement la persécution est permise par Dieu, mais qu’il la veut directement afin de sanctifier son Église, d'éprouver -, es élus, de multiplier le nombre de ses saints et de leur donner l’occasion, par de plus rudes combats, de mériter une récompense plus éclatante. C’est le crible dont il se sert pour purifier son aire, l'Église, agitant cet amas confus de fidèles pour séparer le froment des martyrs de la paille des apostats. Or, ce que Dieu non seulement permet, mais veut directement, est bon et très bon. Dès qu’un homme n’accepte pas ce que Dieu veut, il s’insurge contre Dieu et commet une faute grave : c’est le cas de ceux qui fuient durant la persécution. Ils opposent leur volonté à celle de Dieu. Ils ne disent pas comme Jésus au jardin des Olives : Non mea volunlas, sed tua fiât ; ils lui disent : Non tua volunlas, sed mea fiai !

Et qu’on ne prétende pas que la persécution est voulue par le démon et ses suppôts pour la perte des âmes, et que Dieu la permet seulement afin de tirer le bien du mal. Non ! Totum quod agitur in persecutione, gloria Dei est probanlis et reprobantis, imponenlis et deponeniis. Quod autem ad gloriam Dei est, ulique ex voluntate illius venit… Donc, en aucune façon, on ne peut attribuer la persécution à Satan et à ceux qu’il inspire : ex hoc ipso ostenditur nobis non posse diabolo depulari eam (persecutionem), quæ meliores efficit Dei servos. De fuga in persecutione, c. i, P. L., t. ii, col. 104.

Sous sa plume se pressent les textes d'Écriture cités avec abondance à l’appui de son assertion si hasardée : Ego perculiam et sanabo, dit le Seigneur ; e<70 vivificabo et morlificabo, Deut., xxxii, 39 ; Ego sum qui facio pacem et condo mala, Is., xlv, 7 ; Uram illos sicut uritur argentum, et probabo illos sicut probatur aurum. Zach., xiii, 9. Tertullien est tellement convaincu par sa propre argumentation qu’il ne lui semble pas possible qu’on puisse penser autrement, à moins qu’on ne soit d’une foi faible et frivole : De isto quis dubitare possil ignoro, nisi plane frivola cl frigida fides. Ibid., c. iii, col. 106. Son erreur cependant est manifeste. Assurément, rien n’arrive sans la