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917 FRÈRES PRÊCHEURS [LA THÉOLOGIE DANS L’ORDRE DES ;

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matisation que saint Thomas avait apportées à la doctrine de l’évêque d’Hippone. L’Auguslinus souleva une opposition très vive dans la Compagnie de Jésus dont les théologiens étaient pris à parti. Au premier moment, les prêcheurs purent croire que Jansénius était un allié puisqu’il combattait leurs adversaires. .Mais une fois au clair sur le contenu de l’Auguslinus, ils n’hésitèrent pas à écarter un dangereux concours. Pendant les polémiques jansénistes et les phases successives par lesquelles passa le problème, les prêcheurs gardèrent leur attitude traditionnelle et se maintinrent sur le terrain de la doctrine de saint Thomas. Placés entre les deux adversaires, ils eurent à subir parfois les coups des uns et des autres et furent tour à tour accusés de pactiser avec les jansénistes ou les molinistes. Mais ces arguments de polémistes qui font flèche de tout bois n’ébranlèrent pas la résolution de l’école. L’autorité de l’ordre, en particulier, icsta toujours ferme au côté de l’Église romaine, qui déclara constamment dans ses condamnations ne pas vouloir porter atteinte aux doctrines de saint Augustin et de saint Thomas.

L’agitation janséniste ayant, dès l’origine, pour centres principaux Louvain et Paris, deux théologiens dominicains dans ces deux villes écrivirent contre la doctrine de Jansénius. Alexandre Sébille, régent des études à Louvain, publia : D. Auguslini et SS. Palrum de libero arbitrio inlerprcs thomisticus adversus Cornclii Junsenii doclrinam, Mayence, 1652 ; et Bernard Guyard, docteur à l’université de Paris, Discrimina inter doclrinam thomisticam et jansenianam, Paris,

L’affaire des cinq propositions tirées de Jansénius préoccupa les théologiens et le général de l’ordre quand elle lut portée à Rome. Il semblait, en effet, que les questions débattues dans les congrégations De auxiliis allaient être reprises. Comme les deux parties présentes à Rome cherchaient à tirer à elles pour s’en prévaloir le général et ses conseillers, ceux-ci refusèrent d’accepter aucun autre terrain que celui des doctrines de saint Thomas. A cette fin, divers mémoires furent préparés par l’ordre. Mais le pape, qui ne voulait pas rouvrir la question De auxiliis, se limita à l’examen et à la censure des cinq propositions (31 mai I). Innocent X ne cessa d’ailleurs de déclarer constamment que la censure de Jansénius ne devait pas porter la moindre atteinte aux doctrines de saint istin et de saint Thomas. Il fil même donner ordre par le cardinal Barbeiini au général de la Compagnie de Jésus de faire savoir à ses religieux qu’ils n’eussent pas à se prévaloir de la constitution contre saint Augustin et la grâce efficace, sinon il prendrail des mesures (’outre eux. Journal de M.deSaint-Amour. Df qui i passé à Rome dans l’affaire des cinq propositions, s. 1., 1662, passim et p. 568.

par la (acuité de théologie de

. en janvier 1656, contre Antoine Arnauld soulevèrent de vh es polémiques. Le P. Ji an Nicolaï, 0. P., prof 1 iniversité et régent au collège de Salnt fut particulièrement impliqué, Divers écrits (un : I ! entre lui et Antoine Arnauld qui l’ac ibandonnei les doctrines de son ordre. Les lettres provinciales de Pascal, qui commencèrent à ion, jetèrent le débat dans le grand

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l’. N’icolal et ceux qu’il appelle nouveaux thomistes. En réalité, la doctrini

dut Thomas, mais il s’était rallié, i question de la grâce suffisante, aux Idi

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polémiques contre Nicolaï, Arnauld exagère, pour les besoins de sa cause, la position doctrinale de son adversaire, qui fut un écrivain abondant et très érudit. Script, ord. prxd., t. ii, p. 647 : Supplementum novissimum, p. 3 ; Œuvres de messire Antoine Arnauld, Paris-Lausanne, 1775-1783, t. xix-xx ; Les Provinciales de Biaise Pascal, édit. Mobilier, Paris, 1891 ; Guillermin, i De la grâce suffisante, dans la Revue thomiste, t. ix-xi (1901-1903) ; J. Nicolaï, Thomisticæ ac orthodoxse de

gratia divina veritales jansenianis erroribus ac dogmalibus

oppositæ, Paris, 1656 ; Judicium scu censorium suffragium, de propositione Anlonii Arnaldi, s. 1. n. d. [Paris, 1656].

La publication de la bulle Unigenilus (8 septembre 1713) renouvela et aggrava les anciens troubles du jansénisme. Les 101 propositions condamnées, sans aucune détermination précise du sens de la condamnation, ouvraient la porte à toutes les interprétations. Avec des préoccupations diverses, jansénistes et molinistes déclarèrent y voir la condamnation des doctrines de saint Augustin et de saint Thomas, que l’Église n’avait cessé de couvrir de son autorité. Il eût fallu simplement conclure que les propositions condamnées ne l’étaient ni dans le sens de saint Augustin, ni de saint Thomas. Mais ceux qui avaient provoqué la constitution cherchaient à en tirer le plus de profit pour leur école. L’autorité des prêcheurs et la masse de l’ordre n’hésitèrent pas un seul instant, en présence de l’acte pontifical. Mais des docteurs et des professeurs, jetés dans la mêlée, suivirent le mouvement d’appel qui se forma contre l’acceptation de la bulle, particulièrement en France. Le plus célèbre d’entre eux fut Noël Alexandre, docteur de l’université de Paris et historien ecclésiastique très réputé. Les généraux de l’ordre réagirent énergiquement contre les appelants, qui se rangèrent à l’obéissance quand ils virent parles déclarations pontificales que les doctrines thomistes étaient non seulement indemnes, mais louées et favorisées par le Saint-Siège. R. Coulon, .Jacobin, gallican et « appelai ! » , le P. Noël Alexandre, dans la Revue des sciences philosophiques et thêologiques, t. vi (1912), p. 9. Les éloges que les papes fixent plus tard de la doctrine de saint Thomas d’Aquin, affirment que la bulle Unigenilus laisse indemne la doctrine de l’école thomiste. Le pontificat du pape dominicain Benoit XIII vit rentrer dans l’Église bon nombre d’appelants, et le P. Hyacinthe Aniat de Graveson, (). P., s’employa particulièrement à ramener le cardinal de Noailles à l’acceptation de la bulle. Journal de l’abbé Dorsanne, Rome, 1753 ; Mémoires et instructions secrètes du cardinal de Noailles, s. 1., 1756 : E. de Barthélémy, Le cardinal de Noailles d’après sa correspondance inédite (1651-1728), Paris, 1886.

vil. Il— FRÊBBS PRÊCBEURS El II l’ROBADILISifB. — Lcxvr siècle vil naître une théorie nouvelle qui prit place dans la théologie morale et devait demeurer célèbre sous le nom (le théorie de la probabilité. Les idées de saint Thomas sur les conditions nécessaires pour agir licitement dans l’acte moral quand la conscience n’arrive pas a al Ici m Ire la cet lilude étaient des plus rationnelles et des plus claires. Dans beaucoup d’actes humains, nous n’agissons que sur des don probables. La probabilité pour saint Thomas, à la

suite d’Aristote. c’est la justification d’une action a

laquelle les hommes sages donneraient leur approbation. Elle est suffisante pour agir. Contre l’opinion

probable il n’y a qu’une opinion Improbable quc l’on ne saurait suivre. Lorsque notre raison semble trouver une égale probabilité entre deux alternatives qui s’opposent, m l’une ni l’autre n’est probable, el l’esprit ne possède autre chose que l’état de doute, el l’on ne peut

agir dans celle condition. Il faut éclaircir U’doute par soi même OU par d’autres et suivre alors l’opinion pto