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FRÈRES DU LIBRE ESPRIT


apprend du moins qu’elle revendique le droit de faire tout ce qui plaît, et cela sous le prétexte de l’action du Saint-Esprit. Peu de temps après, au concile de Vienne, Clément V condamnait les béghards et les béguines' hétérodoxes, la principale branche des frères du libre esprit. Voir t. ii, col. 528-535. Leurs huit erreurs, telles que le concile les énumère, ne sont guère qu’une réédition abrégée des 97 propositions du formulaire d’Albert le Grand. La lutte de l'Église contre le béghardisme remplit le xive siècle et se prolongea au commencement du xv c.

Répandue en Allemagne, dans les Pays-Bas, en France, en Italie, se maintenant pendant plusieurs générations, en contact avec des hérésies qu’elle influença et qui l’influencèrent, l’hérésie du libre esprit eut des variantes sans fin. Son histoire en devient parfois difficile à suivre. Ce qui l’embrouille également, c’est que, après le commencement du xive siècle, l'étiquette « secte de l’esprit de liberté » se trouve appliquée aux cercles hérétiques les plus différents chez qui l’on suppose le dédain ou la décomposition de la loi morale. Tantôt les béghards allèrent aux extrêmes, par exemple. avec ce Jean Hartmann qu’interrogea, à Erfurt, en 1367, le célèbre inquisiteur Walter Kerlirîg. Cf. I. von Dôllinger, Beitràge zur Seklengeschichle des Mittelalters, Munich, 1890, t. ii, p. 384-389. Tantôt, au traire, ils adoucirent leurs affirmations. Ceux contre lesquels l’inquisiteur Wasmod de Hombourg composa, i ntre 1395 et 1404, un traité qui a été publié par il. Haupt, dans la Zeilschrift fur Kirchengeschichlr, Gotha, 1885, t. vii, p. 567-576, ressemblent plus à des vaudois qu’aux béghards primitifs. De même, les lollards avaient été d’abord confondus avec les béghards par l’usage populaire. Quand les béghards tombèrent dans l’hétérodoxie, on continua à identifier lollards et béghards. A la fin du xiv<e siècle, on appelait béghards, lollards et béguines (sweslriones, de Schwes-- sœur) des fraticelles d’Allemagne. Cf. une bulle de Boniface IX. du 31 janvier 1395, dans Dôllinger, zur Sektengeschichte des Mittelalters, t. ii, 83 ; en rapprocher le document publié par Dôllinger, op. cit., p. 406-416. A la même date, en leterre, lollard étail synonyme de wiclyfiste. Cf. « I. eccl., an. 1392, n. 8 ; an. 1395, n. 18 ; " li% > " " ' mpénétration entre les frères

'1" libre esprit et les apostoliques, cf. F. Tocco, Studii francescani, Naples, 1909, p. 233, les fraticelles (voir ce mot).1 l, s flagellants, cf. H. C. Lea, Histoire de sition au moyen âge, trad. S. Reinach, t. ii, ', , ', '** ' I. op. cit., p. 428, paraît commette « ne Inexactitude en faisant des luciférains « une branche » de la secte > du libre esprit, une action de

rains est. vraisemblable frères du libre esprit voulurent tirer a eux les

andmystlqueEckart.Le.sauvage.oui 'ivre de la vérité du B. Suso, représente les bé reprises, l’autorité du

1 l’appui de sa doctrine

Opéra, édit. L. Surius Co

trad. G. Thiriot, Paris 1899

1 » Schmidt, Études sur le mysticisme

au xiv siècle, Paris, 1847, p. 21 ' regarde

le doute la connexion demattre Eckari

i libreesprit, el admel que

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- en réunissant en un système spé ent< entre

' Pu ol, L’auteur du livre De imtlattone

'alion, Paris, 1899, p 375 37e va

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1 P-"" là le mouvement de piété etaucomn i, 1, ,

xve siècle, de Bâle aux Pays-Bas, dans la région qui avoisine les bords du Rhin, » et que dirigent avec Eckart.Taulère, Suso et le groupe des « amis de Dieu » Le B. Jean de Ruysbroeck, à son tour, a été suspect. Gerson, Epistola super tertia parle libri Ruysbrocch De ornalu spiritualium nuptiarum, dans Opéra, Paris 1606, t. 1, col. 463, croit qu’il était de la secte’des béghards et, peu au courant de la chronologie, suppose que la décrétale de Clément V au concile de Vienne contre les béghards, voir t. 11, col. 532, a pu être dirigée contre lui. Toute cette thèse est inadmissible Dans son fond, le mysticisme d’Eckart, et, à plus forte raison, celui de son école ne sont point panthéistes Voir t. iv, col. 2071-2073. Eckart s’est égaré en divers passages. Suso l’a reconnu, lui qui, dans Le livre de la venté, ne veut pas, selon la remarque de son traducteur G. Thiriot, op. cit., p. 201-262, note, être « entièrement l’avocat d’Eckart comme certains l’ont prétendu, il ne veut pas non plus le laver de tout reproche d’hétérodoxie, il veut simplement montrer que, si ce maître s’est trompé dans quelques endroits' dans d’autres il a eu une doctrine parfaitement orthodoxe, qu’il est impossible de le justifier en toute chose, mais que cependant sa doctrine n’a jamais été absolument celle des béghards. » Suso repousse, pour son compte, la « sauvagerie des frères du libre esprit. Taulère la rejette, Serm., ii, in / » domimca quadragesimse, dans D. Joannis Thauleri sermones, édit. L. Surius, Cologne, 1603, p. 148-152- trad C. Sainte-Foi, Paris, 1855, t. 1, p. 289-295. Cf. Blosius (Louis de Blois), Apologia pro D. Joanne Thaulero adversus D. Joanne m Eckium, c. iii, dans Opéra, Anvers, 1032, p. 345-347. Dans Le livre des deux hommes Rulmann Merswin signale les doctrines de la secte comme un obstacle au développement de la vie spirituelle. Loin de pactiser avec les faux hommes libres, les « amis de Dieu » sont leurs « pires adversaires » , et « ne cessent de dénoncer leurs égarements. » R. Alher, Les frères du libre espril, dans Religions cl sociétés, p. 146-147. Ruysbroeck s’occupe souvent d’eux, spécialement dans L’ornement des noces spirituelles, 1. I, c. lxxvi-lxxvii, trad. M. Mæterlinck nouv. édit., Bruxelles, 1908, p. 313-320, proteste contre leur engeance « ennemie la plus dommageable, « stigmatise leur « vie inique, pleine d’erreurs spirituelles et de perversités, » et, ayant indiqué des différences entre eux, conclut : « Mais tous sont pervers, et les pires méchants qui soient, et il faut les fuir autant que l’ennemi infernal, » p. 313, 317. Cf. A. Auger, De doctrina et mentis Joannis van Ruysbroeck, Louvain 1892 p. ix-x, 102-115, 146.

Le franciscain Alvarez Pelayo (Pelagius), Dr planctu Ecclesiæ (tenniné en 1332), c. vii, Venise, 1560, fol. 113 assure que l’erreur de la liberté de l’esprit étail la plus

commune et qu’elle avail séduil et pervertissait encore

beaucoup de personnes. Mais rappelons-nous que Pelayo ne distingue suffisamment les béghards et les

béguines hétérodoxes ni de ceux el.le celles qui étaient orthodoxes ni des fraticelles et des apostoliques. Quoi

qu’il en SOit de la diffusion de la seele ( u libre esprit,

les femmes eurent un rôle considérable dans sa propagande, l.a béguine Marguerite Porete, originaire du Hainaut, qui fui brûlée a Paris en 1310, avait composé, pour la répandre, un livre que Guy, évêque de

(.ambrai, condamna comme hérétique ; elle avait continué de 1,. distribuer après cette condamnation, Voir 1 ; l sentence de l’inquisiteur Guillaume de Paris, dans 1 1. c. Lea, 1 hisiory oflht inquisition ofthe middïe âges, New York, 1888, 1. ii, p. 575-577 (non reproduite dans la tiaduclimi fr.n, |, , t(. n||l.

Ruysbroeck étail encore prêtre séculier, vers 1330 n v avait, a Bruxelles, une femme que l’on appelait' la Bloermadlnne : 11. Pomeriui (Hendrik van den Bo