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FRANC-MAÇONNERIE

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FRANÇOIS DE SALES (SAINT)

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pendant le cours du xviie siècle. Le xviii c siècle ne fit pas d’édition nouvelle des œuvres complètes. Le xixe en a vu plusieurs, dont les trois principales sont celles de Biaise, 16 in-8° avec 6 vol. de supplément, Paris, 1821-1833, de Vives, 12 in-8°, Paris, 1856-1858, et de Migne, 7 petits in-l°, Paris, 1861-1864.

1° Les Controverses, t. i, composées pendant la mission du Chablais, ne furent publiées que longtemps après la mort du saint, dans le viiie vol. de l’édition de 1672. Le saint auteur les appelait ses Méditations, ses Placards. C’étaient, à l’origine, des feuilles volantes que le zélé missionnaire répandait parmi les habitants de Thonon, et faisait afficher sur les places et dans les rues, alors qu’au début, on n’osait venir à ses prédications. Ces feuillets, recueillis par Charles-Auguste, le neveu du saint, et offerts au pape Alexandre VII Chigi, lors des fêtes de la béatification, furent publiés peu après par le minime Harel, avec de nombreuses lacunes, et ce qui est plus fâcheux encore, avec des retouches. Les éditeurs postérieurs ont reproduit le même texte défectueux. L’édition d’Annecy nous donne la vraie leçon.

Le but de saint François de Sales dans les Controverses est de prouver « que tous ceux sont en faute, qui demeurent séparés de l’Église catholique, apostolique et romaine. » C’est une démonstration complète de la foi catholique à l’usage des protestants d’alors qui, admettant les saintes Écritures, s’étaient séparés de l’Église catholique romaine. L’ouvrage se divise en trois parties : 1° l’autorité de l’Église ; 2° les règles de la foi violées par les ministres ; 3° les règles de la foi observées dans l’Église catholique.

Dans la I re partie, l’autorité de l’Église, l’auteur combat le schisme chez les habitants du Chablais qui ont écouté et suivi des ministres sans mission et usurpateurs d’une autorité qu’ils n’avaient point. Il retrace devant leurs yeux l’image vraie de l’Église de Dieu défigurée par les protestants : cette Église dont les traits principaux sont d’être visible, de renfermer en elle des bons et des mauvais, de ne pouvoir périr, de n’être ni dissipée, ni cachée jamais, et de ne pouvoir errer ; et les ministres ont tenté de violer et d’avilir ] son autorité en faisant revivre l’une après l’autre les’attaques des hérétiques antérieurs qu’elle avait con—’damnés dans les cinq premiers siècles. Il établit alors les m’arques évidentes qui désignent « la vraye Espouse » : unité de chef et de doctrine, sainteté extérieure et intérieure, universalité ou catholicité de temps, de lieux et de personnes. L’Église des protestants n’a pas plus cette marque que les autres : elle n’est pas catholique, « mais encores ne le peut estre n’ayant ni la force, ni vertu de produire des enfans, mais seulement de desrobber les poussins d’autruy. »

Dans la IIe partie, l’auteur établit la règle, ou les règles de la foi, pour montrer comment les « faux prædicants » les ont violées. La règle de la foi, c’est d’abord la parole de Dieu contenue dans l’Écriture sainte et dans la tradition apostolique. Voilà la règle ou plutôt les deux premières règles formelles. Mais ces deux règles ne suffisent pas : la sainte parole pourra « recevoir autant de formes qu’il y a de cerveaux au monde… Il faut quelqu’un qui la propose…, quelque infaillible authorité a la proposition de laquelle nous soyons obligés d’acquiescer… » D’où quatre règles d’application : l’autorité et l’enseignement de l’Église, l’autorité des conciles, celle des saints Pères, et celle du pape. Au sujet de cette dernière règle, il établit la suprématie de saint Pierre sur les autres apôtres ; il montre que les successeurs de saint Pierre, en lui succédant sur le siège de Rome, lui ont succédé dans sa primauté, et sont les chefs de l’Église, vérité qu’il confirme par les éloges, les titres et prérogatives qu’a donnés aux souverains pontifes l’antiquité chrétienne, et

qu’il énumère avec amour. Il en conclut que Rome est le centre nécessaire de la communion catholique, et que le pape peut, sans les conciles, définir les matières de foi : « L’Eglise ne peut pas tousjours estre ramassée en un concile gênerai, et les trois premières centeynes d’années il s’en fist point ; es difficultés donques qui surviennent journellement, a qui se pourroit on mieux adresser, de qui pourroit on prendre loy plus asseuree, règle plus certaine que du chef gênerai et du vicaire de Notre-Seigneur ? Or tout cecy n’a pas lieu seulement en saint Pierre, mais en ses successeurs ; car la cause demeurant, l’effect demeure encores ; l’Eglise a toujours besoin d’un eonfirmateur infaillible auquel on puysse s’addresser, d’un fondement que les portes d’enfer ne puyssent renverser, et que son pasteur ne puysse conduire a l’erreur ses enfans : les successeurs donques de saint Pierre ont tous ces mesmes privilèges, qui ne suivent pas la personne, mays la dignité et charge [publique. » On sait que les premiers éditeurs avaient tout simplement biffé le mot infaillible qui gênait leur gallicanisme. Ce mot a été rétabli pour la première fois par l’éditeur Biaise dans un volume supplémentaire de son édition (1821). Au cours des discussions sur l’infaillibilité pontificale, au concile du Vatican, Mgr Mermillod fit photographier et distribuer aux Pères la page du manuscrit Chigi qui contient la phrase citée plus haut. L’impression produite par ce témoignage autographe fut grande : le bref du doctorat de saint François de Sales en a conservé le souvenir : Imprimis auetoritatem hujus apostolicx Sedis, ac romani pontificis beali Pétri successoris propugnavit, ac ipsius primatus vim ac rationem, ca perspicuitale explicavit, ut Valicani œcumenici concilii definitionibus féliciter præluserit. Certe qine de infallibilitale romani pontificis in quadragesimo sermone « Conlroversicu-um » asseril, eu jus autographum, dam in concilio res ageretur, deleclum est r ejusmodi sunt, quse nonnullos Patres lune eu super re adhuc ancipites ad definilionem decernendam, veluti manu duxerint. Œuvres, t. i, p. xix.

La 7e règle de la foi, continue le saint auteur, règle extraordinaire, est l’autorité des miracles. Et la 8e et dernière règle, la raison naturelle, est présentée comme règle négative, c’est-à-dire que la vraie fei ne doit rien renfermer de contraire à la raison et aux bonnes mœurs. Et le saint, après avoir établi et développé chacune de ces huit règles de la foi, montre comment « l’Eglise des prétendus » les a violées.

La IIP partie des controverses : Les règles de la foi sont observées dans l’Église catholique est malheureusement incomplète.

Après la récapitulation de tout ce qui précède, l’auteur traite des sacrements en général et de l’altération de la forme des sacrements de baptême et d’eucharistie par les ministres. Enfin le saint docteur parle du purgatoire et des prières pour les morts, et il établit victorieusement la légitimité de la doctrine et de la pratique de l’Eglise.

Cette rapide analyse des Controverses suffit à montrer la valeur théologique de ce traité de l’Église : Pro~ fecto in sclectis conclusionibus, seu Controversiarum libris quos sanctus episcopus conscripsil, manifeste eluect mira rci theologicæ scienlia, concinna methodus, incluclabilis argumentorum vis, (uni in refutandis hæresibus, tum in demonslralione calholicæ veritalis, et præserlim in asscrenda romani pontificis aucloritatc, jurisdictionis primatu. ejusque infallibilitale, quie Me tam scite il luculenter propugnavit. ut definitionibus ipsius Vaticanse synodi prælusisse merilo videatur. Décret de doctorat, 19 juillet 1877, Œuvres, t. i, p. xii. Certains auteurs reprochent à notre saint de n’avoir pas fat assez œuvre d’érudition, de n’être pas sorti des lieux communs de la controverse théologique, et de n’avoir