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enseignait à Compiègne. Faut-il ranger au nombre des théologiens français Honorius d’Autun, cet énigmatique personnage, dont la vie et les œuvres sont si discutées ? "Voir son article.

C’est à Paris que, dés lors, le mouvement théologique fut le plus intense. Il y avait alors en cette ville trois écoles célèbres : celles de Notre-Dame, de Sainte-Geneviève et de Saint— Victor. A Notre-Dame, enseignait, dès le xie siècle, Anselme de Laon, célèbre par sa Glose interlinéaire de l’Écriture, ses explications allégoriques du Cantique et de l’Apocalypse et un commentaire sur l’Évangile de saint Matthieu. Il eut pour disciple Guillaume de Champeaux. Abélard enseigna à Notre-Dame quand il eut quitté Sainte-Geneviève. A cette école, tenue par les chanoines réguliers, les maîtres principaux furent Robert de Melun, Gautier de Mortagne et Abélard. L’abbaye de Saint— Victor donna naissance à une théologie à tendance mystique, dont Hugues et Richard furent les chefs. Sur Adam de Saint— Victor, voir t. I, col. 388-389. C’est à Hugues de Saint— Victor que la théologie doit d’avoir été enfin constituée en un corps de doctrine ; aussi a-t-on pu, à bon droit, lui décerner le titre de père de la théologie scolastique. Abélard fut le fondateur de l’école Sainte-Geneviève, qu’il quitta pour aller enseigner à Notre-Dame. Voir t. i, col. 30-43. Sur son école et sur l’influence réciproque de cette école et de celle de Saint— Victor, voir ibid., col. 49-55. L’école théologique de Notre-Dame de Paris compta un plus grand nombre de maîtres distingués. Nommons seulement Robert Pullus et ses huit livres de Sentences, Pierre Comestor et son Histoire scolastique, Adam du Petit-Pont, dont les Sentences sont inédites, Pierre le Chantre et son Vcrbum abbreviatum, Alain de Lille, voir.t. i, col. 656658, Pierre de Poitiers et ses Sentences en cinq livres, Pierre de Corbeil, dont les commentaires sur les Psaumes et les Épîtres de saint Paul sont inédits. Mais son plus célèbre docteur est assurément Pierre Lombard, dont les quatre livres des Sentences devinrent, pour des siècles, le manuel de théologie, et qui fut le maître de tout le moyen âge théologique. Voir G. Robert, Les écoles et l’enseignement de la théologie pendant la première moitié du xz/e siècle, Paris, 1909.

En dehors des écoles, surgirent encore à cette époque des personnages qui furent des maîtres de la pensée théologique et exercèrent autour d’eux et après leur mort une grande influence. Saint Bernard, abbé de Clairvaux, peut être au premier rang. Voir t. ii, col. 745-785. A côté de lui, nous pouvons mettre Pierre le Vénérable, abbé de Cluny. Hervée de Bourg-Dieu a commenté plusieurs livres de la sainte Écriture ; seuls, ses commentaires d’Isaïe et de saint Paul ont été édités. Pierre de Blois résuma le livre de Job, écrivit Contra perfidiam judeeorum et de petits traités de théologie morale.

3° Au xiiie siècle. — Ce siècle vit la théologie scolastique parvenir à son apogée, et Paris devint, par le nombre de ses chaires, la science de ses maîtres et l’affluence des étudiants, le centre intellectuel du monde. Les écoles épiscopales et monastiques de la province pâlirent devant celles de cette ville, la capitale politique de l’Ile-de-France et des provinces voisines. Chartres ne peut citer que Pierre de Roissy, dont le Manuale de mysteriis Ecclesiæ ou Spéculum Ecclesiæ, un traité complet des offices de l’Église, est demeuré inédit. A Paris, l’enseignement s’organise ; le roi et le pape accordent aux maîtres et aux élèves des privilèges. L’université est fondée en 1208 ; la faculté de théologie y tient la première place. Les religieux, favorisés par le pape Innocent III, y occupent des chaires à côté des séculiers. L’opposition à l’enseignement donné par les réguliers, de sourde qu’elle

fut d’abord, éclata publiquement, quand Guillaume de Saint-Amour publia, en 1255, son livre De periculis novissimorum temporum, qu’Alexandre IV condamna à être brûlé et que réfutèrent saint Thomas et saint Bonavenlure. De fait, les prémontrés, les augustins, les carmes, les religieux de Cluny eurent, dans la seconde moitié du xiii c’siècle, leurs collèges, à côté de ceux des mathurins, des dominicains, des franciscains et des bernardins, qui existaient dès le début du siècle. La faculté de théologie de Paris eut donc des maîtres et des docteurs du clergé séculier et du clergé régulier.

Au clergé séculier appartenaient Guillaume d’Auxerre († 1230), dont l’ouvrage principal est sa Summa aurea super IV libros Sententiarum ; Jean d’Abbeville, qui publia une Expositio in Canlica canticorum ; Jacques de Vitry, historien de l’Orient et de l’Occident ; Guillaume d’Auvergne, évêque de Paris, dont les œuvres comprennent un Traclutus de collatione beneficiorum ; De universo ; De sacramentis in génère et Traclalus novus de pœnitenlia ; parmi les Anglais qui enseignèrent à Paris, nommons Alexandre Neckam, Etienne Langton, qui publièrent des commentaires sur différents livres de la Bible ; saint Edmond et Robert Grosse-Tête, renommé pour ses traductions grecques, notamment celle de la Théologie mystique du pseudo-Denys l’Aréopagite. Les premiers franciscains, qui furent professeurs à Paris, sont Haymon de Faversham, Alexandre de Halès et Jean de la Rochelle. Les dominicains, qui savaient l’hébreu et le grec, se livrèrent surtout à l’étude de l’Écriture sainte et ils publièrent des Postilles, des Concordances verbales de la Bible et des Correctoires du lexlus parisius, une mauvaise édition de la Vulgate, faite par les libraires de l’université. Hugues de Saint-Cher est le plus connu de tous. A l’instigation de Roger Bacon, qui avait composé une grammaire hébraïque et une grammaire grecque, les franciscains rivalisèrent de zèle et produisirent de meilleurs Correctoires de la Vulgate. Voir t. ii, col. 23-27. La Bible, en effet, était le seul texte que les statutsdel’universitéimposaientau docteur. Voir Denifle, dans la Revue thomiste, mai 1894.

Le collège de Sorbonne, fondé en 1257-1258, compta bientôt des docteurs célèbres : son fondateur, Robert de Sorbon, qui fit des gloses sur l’Écriture et publia des traités moraux, De conscienlia, De confessione, lier paradisi ; Guillaume Durant, un liturgiste ; Guillaume de Saint —Amour, l’adversaire des ordres mendiants ; Henri de Gand, qui publia une Somme théologique et quinze Quodlibcla ; Laurent l’Anglais, l’auteur de la Somme-le-Roi ou le Livre des vices et des vertus ; Siger de Brabant, qui devait soulever tant de tempêtes. L’ordre de Saint-François fournit saint Bonaventure, Eudes Rigaud, Jean Peckham, Richard de Middletown, Gilbert de Tournay, Arlotto de Prato, Guillaume Warren, etc. Celui de Saint-Dominique compta Vincent de Beauvais, Pierre de Tarentaise, Humbert de Romans, Thomas de Cantimpré, Nicolas de Gorran, qui furent tous éclipsés par le B. Albert le Grand et saint Thomas d’Aquin. Ils commentaient les Sentences de Pierre Lombard ou publiaient des Sommes, qui étaient le fruit de leur enseignement personnel ; quelques-uns, après avoir débuté comme commentateurs de maître Pierre, terminaient leur carrière par une Somme personnelle. Les princes de la théologie scolastique ont été professeurs à Paris. Albert le Grand, saint Thomas, saint Bonaventure, Jean Peckham, Nicolas de Gorram, etc., ont laissé des commentaires sur plusieurs livres de l’Écriture. Vincent de Beauvais était historien dans son Spéculum hisloriale, comme il était théologien dans son Spéculum na.lu.rale, son Spéculum doctrinale et son Spéculum morale.