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FORMOSE


(896). Guy était mort (894) ; sa veuve, l’implacable Agiltrude, et son fils Lambert soutinrent la lutte et attendirent Arnulf dans le château fort de Spolète. Avant d’arriver à Spolète, Arnulf fut atteint de paralysie. C’était l’effondrement des espérances du pape. Formose, octogénaire, ne résista pas au choc ; il mourut le jour de Pâques, 4 avril 896.

Agiltrude se vengea d’une manière épouvantable. Elle reprit possession de Rome au commencement de 897. Sous sa pression, le faible Etienne VI fit exhumer le cadavre de Formose, déposé dans la tombe depuis neuf mois, et, ayant ordonné de l’installer avec les habits pontificaux devant une assemblée synodale, procéda h un procès en forme, qui aboutit à une condamnation absolue de Formose, à l’annulation de ses actes, au dépouillement des insignes dont on avait affublé le cadavre. Plus encore que d’Agiltrude peut-être faut-il voir des haines de Romains dans cet attentat sans nom ; ce qui est incontestable, c’est que la populace s’empara du cadavre ignominieusement traité et le jeta dans le Tibre. Plusieurs papes réhabilitèrent Formose, notamment Théodore II (897) et Jean IX (898)..Mais Serge III (904-911) et Jean X (914-928) tinrent pour Etienne VI et son « concile cadavérique » . Voir t. v, col. 979-980. De là des controverses aiguës sur la validité de la consécration pontificale de Formose et des ordinations faites par lui et par les évêques qu’il avait consacrés, et, en général, sur les conditions de validité des ordinations, et sur les réordinations qui suivirent. Cf. L. Saltct, Les réordinations, Paris, 1 !)07.

II. Appréciation.

Formose eut des qualités éminentes. Les contemporains parlent de sa science, de ses vertus, de la pureté de ses mœurs, de l’austérité de sa vie. Entre autres choses, ils mentionnent le cilice qu’il avait encore en mourant, « si bien que, dans l’horrible synode qui eut lieu neuf mois après dans la basilique de Saint-Pierre, lorsque les exécuteurs de la sentence se mirent à arracher les vêtements pontificaux de son cadavre, il leur vint dans les mains, avec morceaux de chair, 1rs restes de ce rude cilice. » A. Lapôtre, Le pape Jean VIII, p. 43-44. Formose était de la race des forts. Il fut dépourvu de souplesse, indescendance, et il semble n’avoir pas échappé mbition. Il est impossible de dire la mesure dans laquelle il encouragea l’obstination de Boris à le vouloir pour archevêque ; certainement il se prêta aux démarches royales, s’il ne les provoqua point, et par la il contribua, sans le vouloir, à détacher de L’Église romaine et à orienter vers Byzance la jeune chrétienté ire qu’il avait brillamment établie. En arrachant « le Jean VIII les cahiers des dernières andu pontificat, qui contenaient les lettres favorables a la liturgie slave et aux institutions moraves, rendirent possible l’erreur d’Etienne V il duper par un faussaire, croyant que it toujours interdit la liturgie slave, et ni a son tour (885) ; l’accession du slavisme ilique souffrit très fort de la prohibition I l’a uvre des saints Cyrille

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d’Allemagne, donne, de prime abord, l’impression d’avoir usé d’une duplicité calculée, d’une politique à double face. Si l’on y regarde, de près, on est porté à admettre que « ces étonnantes variations ne sont pas nécessairement la conséquence d’un plan arrêté d’avance dans l’esprit de Formose, » et même que « le principe de cette mobilité doit être cherché plutôt à Spolète qu’à Rome. » A. Lapôtre, Le pape Jean VIII, p. 180-181 ; cf. p. 181-189.

En somme, Formose est une personnalité puissante, un caractère de trempe énergique. Il eut des dons de premier ordre. Mais il fut trop d’une pièce. Il ne sut pas se plier à certaines exigences des temps difficiles qu’il traversa. La vraie force, celle des doux, lui manqua. La dignité de sa vie le place très haut dans l’histoire des papes du xe siècle. L’horreur tragique de sa destinée inspire une sympathie douloureuse et admirative, qui apparaît déjà dans ces vers que lui consacrait Flodoard, De Christi triumphis apud Italiam, I. XII, c. v, P. L., t. cxxxv, col. 830 :

tolérons discrimina plurima, promptus, Exemplum tribuens ut sint adversa ferenda Et bene oioenti mcliicnda incommoda nulla,

et dans la légende, rapportée par Liutprand, Anlapodesis, 1. I, c. cxxxi, P. /… t. xxxvi, col. 804 : quand le corps de Formose réhabilité fut retrouvé et porté à Saint-Pierre, les images des saints s’inclinèrent vers lui.

Le discours, que le P. Lapôtre regarde comme l’œuvre de Formose avant le pontificat, affirme le principe de la supériorité du pape sur une assemblée particulière des évêques et le privilège attaché à la chaire apostolique de n’être jugée par aucun tribunal. Cette doctrine n’était nouvelle pour personne. Mais deux choses méritent d’être signalées. D’abord l’insistance et la force avec lesquelles l’orateur proclame les droits du Saint-Siège, a qua nemo est appellarc permissus, de cujus judicio retraclari non licet, eu jus senientia débet fine tenus insolubilis permanere, édit. F. Maassen, Eine Rede des Papstes Hadrian II, p. 23. Ensuite les nombreux emprunts qu’il fait aux fausses décrétales : plus de trente textes, attribués à dix-sept papes, disposés selon le même ordre que dans la collection pseudo-isidorienne, et terminés par un extrait de la préface d’Isidore Mercator. Il n’y a plus à démontrer que le pouvoir suprême du pape n’est pas une innovation due aux fausses décrétales. Voir t. IV, col. 219. Mais il est intéressant de noter un emploi aussi large de ces pièces apocryphes environ vingt ans après leur apparition. Ajoutons qu’un bon juge, P. Fournier, Élude sur les fausses décrétâtes, dans la Revue d’histoire ecclésiastique, Couvain, 1907, t. viii, p. 50, estime que, quel que soit l’auteur de la première partie du discours, la deuxième partie, celle précisément où apparaissent les citations des fausses décrétales, en est distincte ; ce serait une production italienne datant probablement de la fin du ix c siècle. »

I. Œuvres. — Les lettres de Formose se trouvent dans /’. I., I ii, e"i 837-848, et plus complètement dans P..Jaiïé. ttegesla ponlifleum romanoriun, 2’édit., Leipzig, iss ;, . h. 3473-3508, l i. p. 135-439 ; i f l n. p 705, 71 discours que le P. Lapôtre croit avoir été prononcé par Formose au concile de Rome (869) a été publié en partie peu L Muratori, Reriun italicarum stri/iimes. Milan. 1733, t. u /’. P 135-140, ci entièrement par F. Maassen, Eine Rede des Papstes Hadrian II vom Jahre 889, die ci sic umfassende Benulzung iicr falschen Decretalen, Vienne, 1873 (extrait des Sitzungsberichte der K. Akademte der Wissenschajten, Vienne, 1X72. i iwu p 521-554) L’attribution à formose n’est pas admise par i"iis : ir l’exposé de in contro verse et la bibliographie de la question par II SchroTs, vermeintliche Konzilsrede des Papstes Hadrians II dans V Hlslortschet Jahrbuch, Munich, 1901, t p. 23 36, ’i l Seckel, Realency, édit Leipzig 1905

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