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FLORENCE (CONCILE DE)


c. v, centre de tout le discours, que le vrai sens de la préposition Sii, per en latin, indique une cause « médiante » , « coopérante » . Præposilionem igitur « per » in omnibus in quibus accipitur, causam significare nunquamque dici, nisi aliqaam medianiem subostendal causam, nemo est qui ignoret. Semper enimet in omnibus quibus hoc ab hoc per hoc esse aul fieri dicitur, illud « per » tanquam communicans aut coopérons primo agenti accipitur. D’où il résulle que per Filium veut dire exclusivement ceci, c’est que le Fils coopère activement à la procession du Saint-Esprit, parce qu’en Dieu il n’y a qu’une potentia productiva et pas de cause instrumentale. Comme il y a dans le Père et dans le Fils une seule et même puissance productive, on dit que le Saint-Esprit procède également de tous deux (èx en grec, ex en latin). Dire donc que le Saint-Esprit procède du Père par le Fils ou procède du Père et du Fils, c’est, affirme Bessarion, deux expressions synonymes. « Ce sont quatre locutions équivalentes de dire que l’Esprit est du Fils, qu’il est manifesté par le Fils, qu’il procède par le Fils ou qu’il procède du Fils. » En somme, conclut Bessarion, en s’appuyant sur les textes maintes fois allégués, on peut dire sans altérer le dogme, avec les Occidentaux, de et par le Fils. Les uns comme les autres enseignent que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils comme d’un unique principe, n’ayant tous deux qu’une seule et même substance. Après avoir ainsi parlé, Bessarion termina ce grand discours par une émouvante péroraison dans laquelle il montra les malheurs de la patrie et affirma qu’il s’unissait aux latins pour ne pas perdre son corps et son âme.

Tandis que Bessarion parlait théologie, un laïc de l’entourage de l’empereur, Georges Scholarios, commença le 14 avril une série de trois discours dont le dernier fut lu le 30 mai. L’orateur se contenta d’étudier la situation présente des choses en Orient et en Occident pour conclure à l’union. Chose remarquable : il semble bien que les arguments de Scholarios eurent plus de poids que tous les raisonnements scolastiques de Bessarion et de Marc d’Éphèse, car ce dernier en faisait la remarque : « Le latinisme nous envahissait peu à peu, » c’est-à-dire que, sous la pression et des événements et de l’empereur, beaucoup se détachaient de l’opposition et se rapprochaient des latins.

A la suite de ces faits, le 15 avril, en présence des cardinaux Condolmieri, Cesarini, Albergati, il fut décidé qu’on allait nommer une commission, composée de dix membres pour chacune des deux Églises, qui aurait mission de s’entendre pour arriver à la paix. Les commissaires grecs furent directement désignés par l’empereur. C’étaient dix métropolitains. Tout de suite la commission se mit au travail. Des déclarations furent péniblement élaborées, discutées, refusées sur la question du Saint-Esprit. On essaya de rédiger des professions de foi qui ne contentaient aucun des deux partis ; on disputa de nouveau les textes maintes fois cités des Pères orientaux ; on demanda un supplément d’explications et de précisions sur les termes de cause, de par, de principe unique qui ne satisfaisaient point. Bref, l’empereur lui-même, malgré sa volonté d’aboutir, son autorité et son optimisme, dut avouer au pape, le 24 mai, qu’il rencontrait dans la majorité beaucoup de mauvaise volonté. Pour gagner les récalcitrants, Eugène IV, le 27 mai, essaya d’aller à l’assemblée des grecs y prêcher l’union et y amener les irrésolus. Ce fut sans grand succès.

Et cependant, si tous ces efforts n’aboutissaient à aucun résultat, ce n’était pas la faute des latins. Sur la demande des grecs et pour couper court à toutes les insinuations répandues contre leur doctrine, le 1 er mai, les latins avaient envoyé à leurs frères d’Orient une longue et précise déclaration qui, sem ble-t-il, aurait dû les satisfaire : Credimus in uniim Deum Palrem et in unum Filium unigenitum ex Paire j natum et in unum Spiritum Sanclum, habenlem quidem I ex Paire suam subslanliam sicut et Filius sed eliam j ex Filio procedenlem. Unam QVIPPB DiciiWS Fn.u ei | Spiritus i m sa i/ NEMPE Patrbm ; illius quidem per generalionem, hujus vero per processionem. Sed ne identi : latem unilalemque (subslanliic separemus et ut substani tiam) ab hypostasibus non re differcnlem, sed ralione tantum et aclu intelligendi asseveremus, et nulla su-I spicio sit, Spiritum Sam tum bsse l. solo Patrb, ! TRIUMQVE SURSTANTIA, qui : VNICA EST, in 1res parles dissecta cuipiam videatur, vocem illam ex Filio pronunciamus in symbolo ; et propterca dicimus Spiiiiium i Saxctim procedbrb ex Paire et Filio, vtabvsico [ principio. Labbe, Concil., t. xiii, col. 463. Il y avait | là, ce semble, de quoi satisfaire les grecs. L’unité de i principe était nettement affirmée comme expliquée 1 la formule ex Paire et Filio qui choquait les adversaires. Néanmoins ils ne le furent point et, deux jours

durant, discutèrent entre eux la déclaration latine, ’puis, à leur tour, présentèrent la formule suivante,

beaucoup plus vague, qui ne satislit point les latins et’que même certains grecs, comme Marc d’Éphèse,

refusèrent de souscrire
6Li.oXoyoC|j.Ev my-jr)-/ xa’i pt’Çav
’jIo’j te —/.ai TtvE-jLiaTOç tôv TtaTEpa, —/.ai av6r, BEOç-jta tôv

I vtbv y. où tô TivE-jaa to-j TraTpô ;, xatà tov dyiov KvpiXÀov, xa TTjv 71pcoTY]v <jijvo30v, xa’i tov ii.Éyav j3a<7t"/.£iov xa’i Xé-I’ojxev, ou àvao)’J^Ei 6 viô ; to uvsOpia, îiïiyâÇet, Kpoyzl, I xa tô uvEÛpia tô âyiov itpÔE’.Ti y. où èx toC v’toû, xa’i ivee ; Tai —/.ai Tipo/EÏTa ;. lbid. On voit la différence des deux formules. L’une précise, ne laissant — surtout après i les innombrables explications données dès les débuts du concile — aucun point dans l’ombre, et l’autre ! vague à souhait. Que voulait-on dire par ces mots à image icpdsiox, èvisrai, 71povs ; Tx : ? Que de discussions ne pouvaient-ils faire naître.

Finalement, cependant, au début de juin, après J un mois et demi de disputes, la commission, par Fin-I termédiaire de Bessarion et grâce à l’active énergie d’Isidore de Kiev, finit par trouver une formule’d’entente. Il est vrai que, le 1 er juin, le pape venait de faire à l’empereur les promesses suivantes pour le cas où l’union se réaliserait : il supporterait les frais de retour des grecs à Constantinople, il entretiendrait à ses frais à Constantinople trois cents soldats et deux galères ; la croisade destinée à Jérusalem passerait par Constantinople ; en cas de besoin, le pape enverrait à l’empereur vingt grands vaisseaux pour six mois ou dix pour un an ; enfin, si l’empereur avait besoin d’une armée, le pape solliciterait des princes chrétiens l’envoi de soldats.

Cet engagement favorisa incontestablement le vote de la formule préparée par Bessarion. Sauf Marc d’Éphèse qui protesta verbalement, les grecs, le 3 juin, après s’être mis d’accord sur les termes discutés ex Pâtre et Filio ; ex Paire per Filium, ainsi que sur le sens de la proposition per, S ; i, adhérèrent à la déclaration du patriarche Joseph : « Je ne veux rien changer aux dogmes que nous ont transmis les saints Pères…, mais comme les latins nous montrent, non par eux-mêmes, mais par les saints écrits, que la procession du Saint-Esprit s’opère aussi par le Fils, je me rallie à eux et je déclare que la préposition Sibt désigne le Fils comme cause (ï-.Tta) de l’Esprit et en conséquence je m’unis aux latins. » Labbe, ibid., col. 489. Ils précisèrent encore qu’il était bien entendu que le « Saint-Esprit procède du Père et du Fils comme d’une même à ? /^ et o-3<7t’a ; qu’il procède du Père par le Fils en tant que semblable en nature et en essence et qu’il procède du Père et du Fils comme d’une seule spiralio et produclio. » Le 4 juin, ils signèrent enfin trois exemplaires de la formule qui