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Que plusieurs d’entre eux aient admis pour le fait de la révélation qu’il doit, comme objet formel, être cru de foi divine, rien d’étonnant : le fait de la révélation, se prouvant par des témoignages, n’est pas pour eux objet de science, mais de foi humaine ou divine, ou les deux ensemble. Mais quant à l’autre élément de l’objet formel, l’autorité de Dieu, c’est-à-dire sa science et sa véracité, c’est pour eux comme pour tous les théologiens un objet de science, et ils ne peuvent admettre, sans abandonner leurs propres principes, que le philosophe chrétien, dans tout acte de foi, puisse les croire. Voir l’esch. Prseleciiones, 3e édit., t. vin. n. 345, |). 157 en note. Parmi les thomistes, les Salmanticenses attaquent explicitement le système de Suarez. Cursus théologiens, De fuie, disp. I, n. 1<S1. Paris. 1879, t. xi. ]). 83. Seot, que le 1’. Tepe cite en compagnie de saint Thomas comme précurseur de Suarez avec son école, a bien aperçu la difficulté principale de cette solution que Suarez devait un jour développer, c’est-à-dire le processusin in/iiulum. et n’a rien conclu, au témoignage d’un de ses plus célèbres disciples, le cardinal Brancatus de Laurea : Scolus in III Sent., disl. XXIII, agnoscii maximum liane difjficultalem, omnemque movet lapident ut <tl> eu se exlricet. Comment, in III"™ Sent. Scoti, Rome, 1673, t. m. part. I, disp. NUI. a. <>. n. 156, p. Il I. lluc argumentum. .. Scolum ipsum lorsit ; et ideo insolutum reliquit. Luc cit.. n. 189, p. 121. Cf. a. in. n. ; îlit. p. I 19. Mnstrius finit par se rattacher à la doctrine opposée de Lugo, i/iue doctrina, dit-il. salis consonat Scoto. Dispul. theologicse in ///<"" Sent., De fuie, disp. VI, n. 39-41, Venise, 1675, p. iiHi. Il est donc inexact d’enrégimenter l’école scotiste sous le drapeau de Suarez. Quant aux théologiens de la Compagnie de Jésus, , peu après Suarez. nous voyons le cardinal de l-ugo réclamer êhergiquement centre lui et inaugurer un autre système, pour lequel il a trouvé des partisans : sans parler d’autres systèmes « pie nous verrons défendus par d’autres auteurs, comme Thyrse Gonzalez. Tepe. à la suite de Viva, inveque Arriaga comme ayant qualifié le s sterne de Suarez d’opinion commune » . Citation peu exacte : ce qu’Arriaga présente comme » L’opinion commune n’est nullement le système particulier de Suarez, mais une doctrine beaucoup plus générale et que nous avons donnée plus haut, voir col. 1(>(>. à savoir que seule l’autorité de Dieu, qui a autrefois révélé, constitue le motif ou objet formel de notre loi, a l’exclusion de la proposition faile par le curé, ou même par toute rivalise, proposition qui n’est (prune condition manifestant d’une certaine manière cette révélation. Dispul. theologicse, lie fuie. disp. III. n. 17, Anvers, 1649, t. v, p. âl. Du reste, Arriaga lui-même, comme nous le verrons, ne suit pas le système de Suarez. De nos jours, presque tous les théologiens jésuites ont rejeté la solution de Suarez. et plusieurs d’entre eux l’ont attaquée d’une manière fort détaillée. T< La sont Franzelin, De tradilione et Scriplura, ii. Rome, ix~."). Append., c. iv, n. 2. p. 640 sq. ; MaZZClla, qui a partir de sa.’! ' édition, attaque Suarez qu’il avail suivi jusque-là, Naples, >’édit.. 1909, piop. 31e, p. 101 sq. ; Mendivc, malgré l’attachement spécial (les jésuites espagnols poill Suarez. Ilislituliones theoloyiie…, Valladolid, 1895, t. iv, p. 134 sq. ; Ii ! Hurter, Theol. generalis, 9’édit., (. i. n. 162, p. 176 ; Stentrup, />< fuie. Inspruck, 1898, tins, xxv, p. 193 sq. ; I. abolisse, i tr virtutibus theologicit, Bruges, 1900, tins. xxi. p. 198-206 ; le cardinal Billot, De virtutibus infusis, 2’édit., Rome, 1905, Lhes. xvi, p. 28911. Prœlectiones dogmaticm, ’'<" édit., Fri bourg, 1910, t. vin. pi op. l’i. p. 151-157. Le s si < ime d) Suarez, sans modifications, ne semble avoir élé défendu de nos jours que par Tepe, l<><. < il., et Wllmers, loc. cit., p. 351-362.
Critique du système. —
a) Suarez a eu le mérite de
faire la première enquête approfondie sur cette question
ardue ; l’insuccès d’une première tentative n’est
pas étonnant. Il y a d’ailleurs une part de vérité dans
son système ; il a mis en lumière que l’existence de
Dieu, sa science et sa véracité sont des vérités révélées,
qui peuvent être objet de foi ; et de même, le fait
de la révélation, par exemple, que tel homme ait été
envoyé de Dieu pour parler en son nom, que tel livre
ait Dieu pour auteur, que le donné révélé soit contenu
dans l’Écriture et la tradition. Ce qui est objet formel
de la foi peut donc être cru à son tour, être pris parfois
comme objet matériel ; et nous ne devons pas être
moins attachés a ces dogmes qu’aux autres. Ce qui est
excessif, c’est d’exiger qu’on croie de foi divine ces
vérités dans toul acte de foi, et antérieurement à
toute autre chose ; qu’elles soient ainsi toujours objet
matériel en quelque sorte, quod creditur, en même
temps qu’objet formel, quo creditur. Même en concédant
a Suarez que Dieu dans toute révélation révèle
implicitement qu’il révèle et qu’il est véridique (point
qui demeure plus discutable et plus discuté), il ne s’ensuit
pas que Dieu nous oblige à croire dans tout acte
de foi ces vérités comme révélées : il suflit de les connaître
quand nous croyons autre chose, et de les croire
quelquefois de foi divine, comme les autres vérités
révélées. Il ne s’ensuit pas non plus que nous nous sentions
poussés à les croire de foi divine dans tout acte
de foi, ce qui est contre l’expérience. Il en est ici
comme de la foi humaine : Suarez prétend que, toutes
les fois qu’un homme parle et rend témoignage, il
atteste en même temps son existence et son témoignage
et sa véracité, soit ; mais quand nous entendons
parler quelqu’un et quand nous le croyons sur parole,
nous ne pensons pas toujours qu’il nous atteste son
existence, son témoignage et sa véracité, et par conséquent
nous ne sommes pas poussés à croire ces choseslà
sur sa parole ; au moins souvent, sinon toujours,
c’est uniquement par ailleurs que nous les connaissons
et que nous les affirmons. —
b) Suarez se sépare
nettement des ûdéistes, avec lesquels on a eu tort
parfois de le confondre. Il est. vrai que les lidéistes,
eux aussi, fondent la foi sur la foi. mais dans un sens
exclusif de toute préparation rationnelle et de tous
motif s de crédibilité. Voir col. 17(1. 177. Suarez n’a pas
ce sens exclusif. Voir col. 17.S. Avant l’acle de foi, il
veut que nous affirmions l’autorité (le Dieu et le fait
de la révélation en vertu de motifs autres que le motif
spécifique de la fei divine : démonstration philosophique,
témoignages historiques, autorités humaines.
C’est seulement dans l’acte de foi lui même, au moment
où l’auctoritas lui revelantis va remplir sa fonction
d’objet formel de la foi, que Suarez fail abstraction
de ces nulles mol ifs et de ces l’on naissances préalables,
el par un cllnrl île volonté n’admet plus l’aulorilé
divine et le fait de la révélai ion que sur la parole de
Dieu, c’est-à-dire par le motif de la foi divine, par une
lumière objective différente de (elle qui a Immédiatement
précédé.
c) Mais précisément ce changement
de lumière pour les inéines vérités, accompli sous
l’influence de la volonté libre, est une complication à
laquelle les fidèles ne songent pas et qu’ils auraienl
bien de la peine a exécuter, el quc l’Église devrait
absolument leui enseigner s’il était vrai que ce fûl la,
comme Suarez le suppose, une condition essentielle de
l’acte de foi. <)r l’Église ne la leur enseigne pas. elle
n’esi donc pas essentielle. Celle preuxe décisive contre
le s si en le a déjà.te de loppéc a propos de l ; i liberté
de la loi. question connexe. Voir col. 127, 128. il) On
s’accorde : i icpim loi, , ee système un Vice de I’gique,
qu’il n’est p.is facile d’expliquer bien clairement.
Nous l’indiqueront a notre manière, en renvoyant, du
aux auteun cltél qui l’ont expose chacun a la