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est impossible de le voir dans le rrcderc quia est, parce que credere signifie un acte de l’intelligence et surtout quand il a pour complément une proposition, comme dans le cas présent. Voir col. GO. Il est vrai que la foi suppose un acte de volonté : mais si credere signifie la fides laie dicta, ou cet acte préalable de volonté n’a pas lieu, ou en tout cas ce n’est pas le vœu de la foi proprement dite. Cette exégèse de Heb., xi, ti. est donc. insoutenable. On voit par là comment certains thomistes, en voulant soutenir leur opinion très discutable, en sont venus à compromettre la thèse commune de la nécessité de la foi..Mais nous ne prétendons pas rendre l'école thomiste solidaire de ces errements de quelques-uns. Elle admet généralement et avec raison que, par le mot remuncrator, l’apôtre entend une rémunération surnaturelle, qui dépasse par conséquent la portée de la fidex laie dicta. Elle prend généralement le mot credere au sens propre. Elle prouve l’absolue nécessité de la foi proprement dite par des textes bien clairs de saint Thomas. Voir la réfutation du D r Gutberlet par le P. Raymond Martin, O.P., De necessilate credendi et credendorum, Louvain, 1906.

Aptes avoir parcouru toutes ces solutions et ces exégèses de Heb., xi, (>. il semble qu’il reste encore à trouver une réponse satisfaisante à la preuve scripluraire de l’opinion affirmative. Mais en passant, répondons a une objection. I.'existence de Dieu, dira-t-on peut-être, du vrai Dieu distinct de tous les êtres contingents et des fausses divinités, est un préambule nécessaire de la foi, une vérité qu’il faut, avant la foi divine, connaître par la raison (ou au moins par la foi humaine) sous peine de tomber dans le tidéisme. Voir col. I711. 184, 190. Cela étant, que sert à un philosophe, qui en a la science, de croire cette même vérité parce que Dieu l’a révélé '.' D’abord, il est. singulier que Dieu l’ail révélée ; dans les témoignages humains, jamais un témoin ne nous dit : Croyez-moi sur parole, j’existe. > dmettons que Dieu ail. lévélé son existence dans l'Écriture : Ego sum ; il semble que ce soil tourner dans un cercle et n’avancer à rien, que de vouloir nous appuyer sur son témoignage pour admettre son existence, déjà connue de nous, et nécessa ireinent connue pour pouvoir admettre son témoignage, car qui n’existe pas ne peut témoigner. Réponse. I n

témoin que nous voyons ne nous dit pas : « Croyez-moi, j’existe parce que la vision proprement dite rend

la voie du témoignage inutile et moralement impossible. Voir col. 152. Mais nous ne voj ons pas Dieu : il a donc pu nOUS révèle] son existence. Il est vrai qu’avant li foi nous devons déjà la connaître par une autre voie que celle de son témoignage. Mais il n’est pas inutile

d’ajouter ce nouveau moyen de la connaître, le témoignage divin : car grâce a ce témoignage nous pouvons mais tenir l’existence de Dieu non pas seiileinenl avec une Certitude ordinaire et humaine, mais avec

la certitude supérieure de la loi surnaturelle. Voir col. 390 sq. Il fallait d’ai Heurs que la vertu Infusede loi. qui a certainement pour objel la trinité, pûl atteindre

idaircment l’existence d’un Dieu unique, telle

que la raison peut la démontrer. Car celle existence

d’un Dieu unique est contenue comme un élément

dans le mystère même de la trinité : un

teul Dieu < trois personnes ; toul chrétien qui croit

iturellement ce mj itère doit croire surnaturel lemini. au moins pai concomitance, cette existence d’un Dieu unique, qui est par ailleurs un préambule de la foi, (I dont il peut se faire qu’il possède la démons tratlon. Cette existence est contenue aussi dans tous i ribnts divins considérés comme quelque chose de réellement existant, el non pas de purement Idéal ; en

i' ulier. dans le rémunérateur surnaturel que

' Paul eut que nous croyions comme très réel ;

c’est pourquoi il l’a spécialement mentionnée : quia est, et remuncrator…

Preuve nouvelle tirée du concile du Vatican. — « La sainte Église catholique apostolique romaine croit et confesse qu’il y a un seul Dieu vrai et vivant, créateur et seigneur du ciel et de la terre, tout-puissant, éternel, immense, incompréhensible. » etc. Sess. iii, C. i. au début, Den/.inger, n. 17X2. Ecclesia, c’est ici « l’Eglise enseignante » : car peu après on lit : « La même sainte Eglise notre mère (la même dont on parlait au début du c. i cr) tient et enseigne que Dieu, » etc. Ibid., c. ii, Denzingcr, n. 1785. Or le pape et les évèqucs qui composent « l’Eglise enseignante o sont de ceux qui peuvent avoir, qui ont en général la démonstration des attributs divins énumérés dans ce texte, telle qu’elle se fait dans la théodicée, dans ce que le concile appelle plus loin scienlia naturalis de Dca. Can. 2, De ftde, n. 1811. Et toutefois, d’après ce texte, l'Église enseignante croit ces attributs ainsi que l’existence de Dieu, crédit ; elle les croit explicitement, distinctement ; et nous ne pouvons absolument pas supposer un sens impropre à ce mot crédit dans cette attestation solennelle de la foi de l'Église enseignante sur ces divers points. Il y a donc au moins quelques hommes dans l'Église (il suffirait d’un seul) ayant simultanément la foi et la science d’un même énoncé ; cette simultanéité est donc possible. Cet argument a été bien développé et défendu par le D r Didiot, Logique surnaturelle subjective, Paris, 1X91, n. 477 sq., p. 322-327.

Réponse. --- « Les l'éres du concile, dit au D r Didiot le 1'. de Croot, O. P., ne se sont pas proposé de trancher cette controverse sur la coexistence de la foi et de la science. » Summa apologetica de Ecclesia co/holica, 2<- édit., Ratisbonne, 1X92, q. xx, a. 2, p. 743. Assurément, puisque trancher une controverse dogmatique, c’est définir. Mais sans rien définir, le concile peut fournir un argument solide, et à cet argument le I'. de ('.root ne répond point. Vacant a une réponse qu’il convient de noter : « Ce chapitre, dit-il, expose des vérités révélées qui pourraient être formulées par la raison… Mais il n’expose pas ces vérités comme des enseignements de la raison, il les définit au contraire comme des vérités révélées.Or, en les présentant comme des vérités révélées, il leur attribue un rapport avec l’ordre surnaturel. Il est donc bien loin de donner ces vérités sous l’aspect purement naturel qu’elles revêtent lorsqu’on ne les connaît qu'à l’aide des créatures… Les enseignements de ce chapitre ne détruisent donc point la théorie thomiste, i Éluiles Iheol… sur le concile du Vatican, Paris. 1x9 ;., t. i, p. ni, 172. Vacant

semble croire qu’il sullit de présenter comme révélée [el. par suite, exlrinséqucment surnal urellel une vérité démontrée d’ailleurs par la science, pour que l'école

thomiste soil satisfaite, et permette de faire sur cette vérité un acte de foi. Mais non : (die ne saurait le permettre sans renoncer a sa théorie même, a savoir que

la démonstration scientifique d’une vérité révélée est

pOUr celui qui possède celle déinonsl rat ion un obstacle

Infranchissable a la foi di> Ine. (an’est donc pas l'école thomiste, c’est au contraire l'école opposée qui dit ici avec Vacant : Pourvu qu’une vérité soil présentée comme révélée, on peut toujours la croire de foi divine.

Ainsi en Voulant concilier l’opinion thomiste avec le

concile, sans s’en apercevoir, il la jette tout simplement par-dessus hord. Ailleurs Vacant, sans résoudre

davantage la difficulté posée par l’argument de Didiot,

qu’il nomme, défend d’une manière satisfaisante

l’opinion thomiste contre d’autres arguments tlréi 'in concile par Mazzclla. Voir op. cit.. 1. n. p. 201, 2112 ; et dans le même sens. Billot, De virtutibus m/usis. [905, th. 's. xi. p. 245-247. Ces arguments de Mazzella ne sortent donc pas Indemnes de la critique qui en a 1 1' faite ; mais quant a celui de Didiot, d ne lui a pas