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de les laisser au vestibule. Que le concile du Vatican ait tracé aux savants catholiques cette méthode qui réserverait pour la fin de leur travail le contrôle de la foi, on ne peut en apporter aucune preuve. Quant à Pie IX, en disant que « les savants catholiques doivent avoir devant les yeux la révélation divine comme une étoile directrice, » il montre par cette comparaison qu’il ne faut pas faire abstraction de la foi au cours des recherches et du voyage scientifique : l'étoile direcIrice sert aux navigateurs pendant la traversée, et non quand elle est finie. L’idéal serait donc, pour un savant catholique, d’avoir déjà les données de la foi, cl même les données de la science sacrée (j’entends celles qui sont bien certaines) avant d’aborder son travail. Ne vaut-il pas mieux prévenir les erreurs que de les corriger après coup ? Ne vaut-il pas mieux s'éviter à soi-même de longues et inutiles recherches de certains côtés, ou de malheureuses solutions péniblement échafaudées, que l’on devra abandonner ensuite'.' N’y aurait-il pas à craindre, comme dit M. Lebreton, « que le contrôle que (le savant) se. réserverait de faire à la fin de ses travaux ne devînt alors parfois plus difficile et plus douloureux que s’il l’avait fait au fur et à mesure du développement de sa pensée ? » Krruc pratique d’apologétique, t. v, p. 500, 501 sq. i.f. I. vi, p. 629. Enfin cette réponse nouvelle à la vieille objection des idées préconçues présente, comme réponse, un double inconvénient signalé par M. BainveL « Elle déplace la difficulté » — ce qui n’est pas la résoudre ; même, en faisant le plus tardivement possible Intervenir la foi, elle lui suppose encore sur les résultais du travail scientifique un droit de contrôle qui est précisément ce que nient nos adversaires, et ce qu’il s’agit d’expliquer et de concilier avec la juste liberté de la science, pe plus « elle laisse subsister cette idée fausse, qu’il faut faire abstraction de sa foi pour produire de bonne besogne scientifique. » Loc. cit., col. 89. ("est donc une demi-mesure qui ne satisfera personne.

X. La foi, vertu surnaturelle et théologale ; son objet matériel et son objet d’attribution ; sa certitude particulière.

Nous connaissons les vertus par leurs actes ; elles existent pour leurs actes ; voilà pourquoi c’est l’acte de foi surtout qui a jusqu'à présent attiré notre attention, et qui même ici va beaucoup la retenir encore. Pour comprendre la foi comme vertu surnaturelle, il faut d’abord la comprendre comme acte surnaturel. Nous expliquerons donc les points suivants :
1° l’acte de foi en tant que surnaturel ;
2° la vertu infuse de foi ; son infaillibilité ;
3° la foi comme vertu théologale ; son objet matériel et son objet d’attribution ;
4° la certitude particulière de la foi.

I. L’ACTE DE FOI EN TANT QUE SURNATUREL.

On saint que les théologiens entendent par surnaturel dans le sens le plus général du mot ce <iui dépasse les forces et les exigences de la nature. L’acte de fol sera surnaturel, si d’une pari ce n’est pas un simple développement de mes forces innées et de mon activité naturelle, mais un don de Dieu, sans exclure toutefois ma coopération, et si d’autre part ce don de Dieu n’est a aucun titre exigé par ma nature. D’un don aussi transcendant, la raison ne peut prouver l’impossibilité Voir Surnaturel. L’Eglise en affirme la possibllité "si quelqu’un dil que l’homme ne peut p ; is être i l’action de Dieu, à une connaissance et à une perfection qui dépasse celle qui lui est naturelle, mais qu’il peut et doil parvenir de lui même, par un continuel progrès, à la possession de toute vérité ei de tout bien, qu’il soit anathenie. » Concile du Y.ili III, can. :  !. hi reoelatlone, Denzinger, n. 1808. Voilà pour l.i possibilité d’un don surnaturel nous donnant la é/ilé. Quant à Y existence d’un tel don

dans l’ordre de choses actuel, et spécialement dans l’acte de foi qui est l’objet de cet article, nous en connaissons déjà quelque élément.

Surnaturalité objective de la foi.

Le motif de la foi est o l’autorité de Dieu qui révèle. » Voir col. 107119. Or cette < révélation » est un moyen surnaturel de connaître, une « voie surnaturelle > par laquelle nous arrive la vérité, d’après le même concile :

Ecclesia tenet et docel, Deum… naturali humanae rationis luminee rébus creatis, certo cognosci posse… attameit placuisse ejus sapientise et bonitati alia, eaque super naturali, via se ipsum… revelare. dicente apostolo : Olim I>eus loquens patribus in prophetis. novissime diebus istis locutus est nobis in Filio. Sess fil, c. îi, Denzinger, n. 1785.

L'Église tient et enseigne « pie la lumière naturelle de la raison humaine peut connaître Dieu avec certitude au moyen des choses créées ; que cependant il a plu à ht sagesse et à la bonté de Dieu de se révéler lui-même par une voir différente cl surnaturelle, celle qu’indique l’apôtre en disant l>ieu, qui a parlé à nos pères par les prophètes, nous a parlé en ces derniers temps par son Fils.

lit, en elîcl, cette voie de la révélation implique dans les envoyés divins. Christ ou prophètes, une communication divine de vérité qui dépasse le jeu naturel de la raison et ses exigences : et déjà de ce chef elle est surnaturelle. Elle implique aussi, pour que le témoignage de Dieu même nous soit reconnaissable sur les lèvres de son envoyé, des signes miraculeux qui n’ont ce pouvoir de nous certifier la révélation que parce qu’ils dépassent les forces de la nature, comme ils en dépassent les exigences. Voir col. 140-142. Cette « voie surnaturelle » de la révélation, avec ses signes miraculeux, n’est pourtant qu’une espèce inférieure de surnaturel. Voir col. 269-271, 278. Par cette voie surnaturelle de la révélation nous sont arrivées des vérités religieuses accessibles à la raison, comme dit ensuite le concile. Denzinger, n. 1786. Mais par la même voie nous sont arrivées aussi des vérités qui dépassent la raison, par exemple, que » Dieu a destiné l’homme à une fin surnaturelle. » Loc. cit.

Præter ea, ad qua ; naturalis ratio pertingere potest, credenda nobis proponuntur mysteria in Deo abscondita, quse, nisi revelata divinitus, innotescere non possunt… Divina enim mysteria suapte natura intellectum creatum sic excedunt, Ut, eliani revelatione tradita et flde suscepta, ipsius tamen fidei vclaniine conterta et quadani quasi caliginc obvoluta mancanl. quamdl i in hac morlali ii : i peregrlnamur a Domino Ibid., c. iv. Denzinger, n. 1795, 1796.

Outre les vérités auxquelles la raison naturelle peut atteindre, on nous propose à croire des mystères cachés en Dieu, qui ne peuvent être connus que par révélation divine… Les mystères divins, par leur nature même, dépassent tellement lHntellect créé que, même après qu’ils ont été communiqués par la révélation et reçus par la foi, ils demeurent pourtant enveloppés <l’une sorie de ténèbres, tanl

que nous voyageons loin du Seigneur dans cette vie mortelle

i 1 1 s i, à la BUrnaturalité générale que possède la révélation comme voie et moyen de connaître, vient ici s’en ajoute) une autre. Les mystères, cette partie Importante du contenu de la révélation, dépassent la

perspicacité naturelle de la raison même après qu’ils

oui (' ! (' révélés, et déliassent d’autant plus ses exigences que Dieu est moins lenu de révéler de pareils

secrets. Par la ils ont une surnaturalité particulière,

qui ne vient pas de la VOtt par laquelle ils arrivent a nous, mais de la nature même de ces vérités, sutiple nul ura. La révélation des mystères est donc surnatun II.

i i.i deuxième puissance, si l’on peut dire.

Surnaturalité subjective de la foi.

De ce qui précède résulte pour l’acte de foi une certaine luruatu*