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rel de l’esprit humain, par sa nécessité pour l'éducation en général, et en particulier pour l'éducation de l’esprit lui-même, qu’une critique prématurée rendrait impossible, col. 2380, 2381. En rés.imé, la certitude relative dont nous parlons difïère de la certitude absolue et proprement dite par son manque d’infaillibilité, de l’opinion par sa fermeté, de la persuasion d’entêtement par sa légitimité et sa prudence. Elle reçoit de plus une nouvelle valeur, sinon comme certitude, du moins comme connaissance, quand elle se trouve avoir la vérité pour elle, et par là elle s’oppose alors à la certitude erronée, à la connaissance fausse.

Ces notions générales étant supposées, reste à les appliquer sur le terrain théologique de la certitude des préambules de la foi chez les enfants et les simples. Et d’abord, une question préalable se pose.

1. Question de fait. — La certitude improprement dite que nous venons de décrire sous le nom de « certitude relative » exisle-t-elle, au sujet de quelque préambule de la foi, chez un certain nombre de fidèles de l'Église catholique elle-même ? Le problème doit être bien posé pour éviter les équivoques. Le préambule dont il est question surtout, c’est le fait de la révélation, soit qu’on le prenne en général, comme : « Dieu a parlé par le Christ, par les apôtres, » soit qu’on le prenne en particulier, comme : « La trinité, ou l’incarnation, etc., est un des dogmes révélés. » Les preuves du fait de la révélation, comme elles apparaissent à tel esprit, sont appelées les motifs (intellectuels) qu’il a d’admettre ce fait. Quand on compare la certitude avec ses motifs, comme dans la question présente, les « motifs » ne sont pas des arguments in abslracto, tels que la raison humaine la plus parfaite les produirait, ou tels qu’ils existent imprimés dans un traité d’apologétique. Non : le motif, on ne saurait trop se le rappeler, c’est ce qui, étant connu d’une intelligence concrète, et dans la mesure où il en est connu, proul apprehenditur, suffit à la mouvoir et la meut de fait à admettre telle chose. Il faut donc, sous le nom de « motif » , prendre ce qui apparaît de fait à cette intelligence, à cet enfant, photographier (pour ainsi dire) ce qui se passe dans son esprit ; c’est cela, et non pas ce qui est dans les livres qu’il faut juger, dont il faut estimer la valeur quand on veut savoir si sa certitude est infaillible « par ses motifs » , si c’est une certitude proprement dite et non pas seulement l’adhésion ferme de la certitude relative. La question présente n’est pas de savoir si l’argument des miracles ou de la résurrection du Christ, in abslracto, est de nature à donner une certitude infaillible, cela regarde l’apologétique ; ni de savoir si l’on peut accommoder, adapter ce genre de preuves même aux simples, ce qui est certain : la question est de savoir si ce qui apparaît de l’argument des miracles à l’esprit des enfants ordinaires vaudrait pour les meilleurs esprits, si de soi cette apparence est tellement liée avec la vérité du fait de la révélation qu’on ne pourrait jamais, sous la même apparence, faire passer une fausse révélation : en un mot, si cet argument, n insi

adapté et ainsi perçu, est de nature à donner une certitude Infaillible. Une preuve qui, in abslracto, a une valeur absolue, peut se trouver si mutilée, en passant par l’esprit des simples, qu’elle n’ait plus in concreto qu’une valeur relative, suffisante a rassurer cel esprit parce qu’il est peu exigeant, mais Insuffisante à en

rassurer d'.iuties. De plus, on peut concevoir une preuve faillible par sa nature, même in ttbilMClO, et

ne pouvant jamais suffire que relativement, de quel

que façon qu’on la développe : telle l’autorité <lu ténage « les parents, lorsqu’ils attestent à l’enfant,

qui les > i "it sur parole, que I Heu a pai lé, qu’il a ré élé la trinité, etc. Quel esprit cultivé pourrait se contenter du témoignage de ces deux personnes, elles-mêmes

peu instruites ? On dira que de nos jours les enfants ont plus que l’affirmation de leurs parents, ou de leur curé, pour admettre le fait de la révélation, qu’on a soin ordinairement d’ajouter quelque meilleur motif de crédibilité : oui, dans bien des cas, mais le cas contraire subsiste ; et puis il ne faut pas regarder seulement notre temps, où l’instruction est plus répandue et plus soignée, mais tous les siècles antérieurs de l'Église où déjà les simples croyaient ; or les anciens théologiens, témoins de leurs temps, nous affirment, comme nous le verrons, que beaucoup de gens peu instruits n’admettaient alors le fait de la révélation que sur cette autorité, que l’on reconnaît insuffisante à fonder une certitude infaillible.

Sur la question de fait, que nous venons de préciser, nous pouvons partager les théologiens, anciens et modernes, en trois catégories : a) Beaucoup ne l’ont pas traitée, ou en termes si courts et si vagues, qu’on ne peut distinguer nettement leur pensée ; commençons par les mettre de côté. — b) Quelques-uns ont soutenu que tous les simples, avant la foi, tiennent le fait de la révélation en vertu de motifs d’une valeur absolue, et par une certitude infaillible. On peut subdiviser ces théologiens en deux classes différentes et même opposées. Les premiers ont reconnu la faiblesse des preuves extérieures d’apologétique telles qu’elles entrent dans ces humbles esprits ; mais pour y suppléer, ils leur ont donné à tous quelque chose comme une révélation immédiate, ou un miracle intérieur. On pourrait, en effet, par cette nouvelle espèce de « motif » , arriver à une certitude rationnelle et infaillible du fait de la révélation, et le cas n’est nullement impossible : mais il y a de graves inconvénients à généraliser ce charisme de manière à le donnera zo ;  ;.s les simples ; nous en traiterons en parlant du rôle de la grâce. Les seconds, laissant de côté cette explication mystique, s’efforcent de prouver (en négligeant trop les précisions et les distinctions que nous avons données tout à l’heure sur la position du problème) que dans l'Église catholique les simples ont tous à leur portée, pour admettre le fait de la révélation, des motifs réellement valables pour tous les esprits, et qui leur donnent, bien que sous une enveloppe vulgaire qui rebuterait les délicats, une certitude vraiment infaillible ; qu’ils ont donc l’essentiel de la certitude proprement dite, avec des imperfections purement accidentelles. De ce nombre sont surtout quelques théologiens contemporains, dont nous examinerons tout à l’heure les assertions et les objections. — c) Enfin, la grande majorité des théologiens qui ont traité le sujet admet, chez, un certain nombre de fidèles, d’enfants surtout, l’existence d’une certitude « respective dans toute la force du mot, c’est-à-dire ferme, mais manquant d’infaillibilité par les motifs qui

apparaissent à l’esprit, même en les prenant dans leur ensemble quand il y en a plusieurs, même en tenanl compte du motif supérieur qui pourrait s’ajouter (mais dans quelques individus seulement) par le privilège d’une grâce extraordinaire. Nous citerons quelques-uns de ces théologiens, surtout à cause des explications utiles qu’ils ajoutent à leur affirmation, et qui seront le complément des nôtres.

Au xvii c siècle, où la question commence à se dis cuter avec ampleur, voici d’abord LugO : Il paraît incroyable, dit-il, que, toutes les fois que les fidèles rustiques et ignorants font l’acte de foi divine et surnaturelle, on leur ait auparavant présenté les articles de foi non seulement dans une mesure relative à leur Capacité, mais de telle manière qu'à égalité de motifs de crédibilité, à égal degré de preux i s. il eut été impos sible de leur proposer des articles faux. I Disputa liona, durp. IV, n. 84, Paris, 1891, i. i, p. 294. Din

qu’A égalité de molifs de crédibilité on aurait pu leur nier le faUX, c’est dire cpie ces motifs, tels qu’ils