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HILDEBERT DE LAVARDIN

HILDEGARDE (SAINTE

2468 intérêts spirituels réclamaient ses soins autant que les intérêts temporels. Au retour d’un voyage qu’il fit à Rome (1107) et dans les Deux-Siciles, où Roger, fils de Robert Guiscard, lui fit le meilleur accueil, il eut à réprimer les excès de langue du prédicant Henri, disciple de Pierre de Bruis, qui ameutait les fidèles contre le clergé. Voir col. 2178. Ilréussit à faire achever la construction de son église cathédrale.

A la mort de Gilbert, archevêque de Tours, Hildebert recueillit sa succession (1125). Il eut à résister dès le début aux empiétements du roi Louis le Gros sur l’administration de son Église. Ce prince prétendait lui imposer contre tout droit un doyen et un archidiacre de son chapitre cathédral. Sa constance et sa modération finirent par triompher des rigueurs employées contre lui dans le but de fléchir sa volonté. Au milieu de ces difficultés, il chercha toujours un appui dû côté du souverain pontife et de son légat. Il eut le chagrin de ne pouvoir mettre un terme, après la mort de Baudri, évêque de Dol (1130), aux prétentions métropolitaines de cette Église. Le pape Honorius II l’avait chargé précédemment, sur la demande de Conan, duc de Bretagne, d’assembler avec son légat, Girard d’Angoulême, un concile pour remédier aux désordres qui troublaient cette province et qui eut lieu à Nantes en 1127. Voir Mansi, ConciL, t. xxi, col. 351. Il dédia pendant ce voyage l’église abbatiale de Saint-Sauveur de Redon. A la mort d’LIonorius II, sa bonne foi se laissa surprendre par Gérard d’Angoulême, partisan de Pierre de Léon, l’antipape Anaclet. Mais saint Bernard eut tôt fait de le gagner à la cause du pape légitime. Innocent II. Hildebert mourut le 18 décembre 1133.

Ce fut l’un des meilleurs évêques de son temps. Doux, affable, toujours disposé à rendre service, compatissant envers les pauvres et les affligés, dévoué au maintien de la discipline et des bonnes mœurs, à l’instruction des clercs et des fidèles, sincèrement attaché aux lois de l’Église, prêt à tous les sacrifices pour la défense de ses droits, généreux envers les monastères et les églises, il s’attira l’estime de saint Anselme, de saint Hugues de Cluny, de saint Bernard et des personnages les plus vertueux. Bien que plusieurs écrivains lui aient décerné le titre de saint, il n’a jamais été l’objet d’un culte liturgique ni au Mans ni à Tours. Bien qu’il ait joué un rôle considérable au Mans et à Tours, sa renommée comme évêque n’égale pas devant la postérité celle que lui ont value ses écrits. Sa réputation fut incontestée jusqu’au xive siècle. Les maîtres le proposaient à l’admiration et à l’imitation de la jeunesse des écoles. Ses vers passaient pour des chefs-d’œuvre de la littérature chrétienne ; on le surnommait egregius versificator. On apprenait ses lettres par cœur.

II. Écrits.

Baluze prépara une édition des œuvres d’Hildebert, qu’il ne put achever. Les matériaux réunis par lui sont conserves à la Bibliothèque nationale parmi ses notes, CXX. Dom Eeaugendre fut plus heureux ; son édition parut à Paris en 1708. Le chanoine Bourassé l’a publiée de nouveau avec des suppléments dans la P. L. de Migne en 1854. L’édition de dom Beaugendre a été sévèrement critiquée par ses confrères, auteurs de l’Histoire littéraire de la France, 1754, t. xi, par l’augustin Xyste Schier, Dissertalio de Hildeberli operibus, eorum gentilate, inlegritale, edilionibus, in-4°, Vienne, 1767, par Victor Leclerc, en 1841, dans ?es remarques sur l’Histoire littéraire, 2e édit., t. xi, p. 20-26, et par Hauréau. Nous manquons d’une édition à laquelle on puisse se fer.

Hauréau a fait de ses poésies une étude consciencieuse. Son examen porte sur les Carmina miscellanea, édités par Beaugendre, les pièces de même nature imprimées ailleurs ou restées manuscrites. La critique qu’il a faite des 141 sermons que lui avait attribués

dom Eeaugendre a été désastreuse : 54 appartiennent à Geoffroy Babion, 25 à Pierre Lombard, 24 à Pierre Comestor, 7 à Maurice de Sully, 21 ne peuvent être attribués à personne, 2 font double emploi, 4 peuvent être d’Hildebert, 4 lui appartiennent sûrement. La Bibliothèque des Pères ne lui en avait attribué que trois. Dom Beaugendre a publié en premier lieu les lettres classées suivant leur objet en trois livres ; le I er comprend les lettres de piété et de morale ; le IIe, cellesqui ont trait au dogme et à la discipline ; le IIIe, la correspondance d’amitié. C’est l’un des meilleurs monuments littéraires du xiie siècle : la langue est excellente, les pensées fines ; il y a beaucoup à prendre pour l’histoire. Nous n’avons rien de mieux dans ses écrits. On les a fréquemment copiées. Ses opuscules, que l’éditeur donne après les sermons, comprennent une Vie de sainte Radegonde et une autre de saint Hugues, abbé de Cluny, dont l’authenticité ne semble pas douteuse ; un dialogue en prose, en vers, De quærimonia et conflictu carnis et spiritus, un Tractatus theologicus, où l’on trouve un exposé de la doctrine chrétienne basé sur l’Écriture et les Pères, qui est un essai de la méthode destinée à renouveler sous le nom de scolastique l’enseignement de la théologie, et quelques opuscules liturgiques. Les poèmes occupent dans le recueil de ses œuvres la place la plus importante. On y trouve quelques proses et des épitaphes.

Dom Beaugendre, Venerabilis Hildeberti Turonensis archiepiscopi opéra, tam édita quam inedita, in-fo !., Paris, 1708 ; P. L., t. clxxi, col. 1-1463 ; Histoire littéraire de la-France, Paris, 1869, t. xi, p. 250-412 ; dom Ceillier, Histoire générale des auteurs ecclésiastiques, t. xiv, p. 207-225 ; Hauréau, Histoire littéraire du Maine, t. vi, p. 117-159 ; Notice sur les mélanges poétiques d’Hildebert de Lavardin, dans les Notices et extraits des manuscrits, t. xxviii b, p. 289-448 ; Notice sur les sermons attribués à Hildebert de Lavardin, ibid., t. xxxii b, p. 107-166 ; de Déservillers, Unévêque au XIIe siècle. Hildebert et son temps, in-8°, Paris, 1877 ; Dieudonné, Hildebert de Lavardin, évêque du Mans, archevêque de Tours (1056-1133), sa vie, ses lettres, in-8°, Paris, 1898 ; Franz Barth, Hildebert von Lavardin (70561133) und dos kirchliche Slellenbestzungsrecht, in-8°, Stuttgart, 1906 ; Realencyclopàdie fur protestanlische Théologie und Kirche, t. viii, p. 67-71.

J. Besse.

    1. HILDEBRAND##


HILDEBRAND. Voir Grégoire VII (saint), col. 1791-1804.

    1. HILDEGARDE (Sainte)##


HILDEGARDE (Sainte). — I. Vie. II. Œuvres-I. Vie. — Sainte Hildegarde naquit à Bôckelheim (diocèse de Mayence), vers l’an 1100, à peu près sûrement en 1098. Elle fut la dixième enfant de la famille ; cette circonstance décida ses parents à l’offrir à Dieu, , qui, sous la loi ancienne, exigeait la dîme. Quand elle eut huit ans, ils la présentèrent à Jutta (Judith), fille du comte de Spanheim, laquelle s’était retirée près du monastère de Disenberg, au mont Saint-Disibode (Disibodenberg), pour y vivre en recluse, et voyait des imitatrices de son exemple se grouper autour d’elle. Jutta admit Hildegarde comme oblate sous la règle de saint Benoît. Au bout de sept années de noviciat, Hildegarde reçut le voile. Après la mort de Jutta (1136), elle assuma la direction de la petite communauté. En 1147, ou peut-être en 1149 ou 1150, elle partit avec dix-huit religieuses et vint se fixer à Bingen, au mont Saint-Rupert (Rupertsberg). C’est à ce moment qu’elle commença de devenir illustre. Sa gloire a rejailli sur Bingen, dont le nom est devenu inséparable du sien ; elle est appelée communément sainte Hildegarde de Bingen.

L’influence d’Hildegarde fut extraordinaire. On s’en rend compte par sa correspondance, qui la montre en rapports avec des papes, des cardinaux, des archevêques, des évêques, des abbés, de simples moines, des rois, des ducs, des gens de toute condition et de divers-