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IIILAIRE (SAINT)


concile projeté d’abord ; puis à Rimini, où ils furent les maîtres, leurs intrigues et leurs violences avaient amené les évêques occidentaux réunis en cette ville à signer une formule insidieuse qu’on leur présentait comme une concession nécessaire au bien de la paix. A Séleucie, la minorité acacienne, qui se rattachait au même parti, n’avait pas triomphé, mais elle s’était empressée d’envoyer à Constantinople des députés chargés de prévenir Constance en leur faveur et de réclamer une union conçue sur une base plus large. Quand les basiliens se présentèrent, l’empereur était de nouveau gagné à la cause homéenne. Adversus Conslantium, 15, col. 593.

L’évêque de Poitiers avait suivi les basiliens à Constantinople ; il ne put qu’être le témoin navré du revirement impérial. Sans perdre courage, il adresse à Constance, vers le début de 360, la requête désignée couramment sous le titre de Ad Conslanlium Auguslum liber secundus, P. L., t. xxi, col. 563. Suivant Sulpice Sévère, dont l’affirmation est d’ailleurs contestable et contestée, cette requête aurait été suivie de deux autres : tribus libcllis publiée datis audienliam régis poposcii, ut de fide coram adversariis disceptarel. Op. cit., ii, 45, col. 154. Hilaire sollicitait deux faveurs : celle d’une discussion publique avec Saturnin d’Arles, auteur de son exil, afin de pouvoir montrer la fausseté des accusations dont il l’avait chargé, et celle d’une comparution en présence du concile qui se tenait alors dans la ville impériale, afin de pouvoir y défendre, sur l’autorité des saintes Écritures, la foi orthodoxe. Ad Const., II, 3, 8, col. 565, 569. L’empereur n’accorda ni l’une ni l’autre de ces demandes : il se contenta de rendre Hilaire à sa patrie, sans toutefois rapporter la sentence d’exil, absque exsilii indulgentia, dit Sulpice Sévère, ii, 45, col. 155. D’après cet auteur, la mesure aurait été suggérée au prince par les ariens, qui, pour se débarrasser d’un adversaire gênant, le lui auraient présenté « comme semeur de discorde et perturbateur de l’Orient » . Autre serait peut-être la réalité d’après Loofs, art. Hilarius von Poitiers, dans Realencijclopâdie, t. viii, p. 63 : s’appuyant sur ces paroles du Contra Conslanlium, II, col. 588 : fugere mihi sub Nerone licuil, U. demande si l’exilé n’aurait pas pris la fuite. La conjecture semble admise, ou à peu près, par dom Wilmart, L’Ad Conslanlium liber primus, p. 150 : « à moitié renvoyé de Constantinople, à moitié fugitif volontaire. » Ne serait-ce pas prendre le mot fugere dans un sens trop rigoureux ?

Hilaire quitta Constantinople dans la première moitié de 360, probablement au début d’avril. Le Contra Conslanlium imperatorcm, P. L., t. x, col. 577, date de cette époque, qu’il ait été composé par son auteur avant son départ de la ville impériale, ou peu après, pendant le voyage de retour. Cette invective vigoureuse reflète les sentiments d’indignation qui animèrent l’âme du saint évêque, alors que, revenus au pouvoir, les homéens imposèrent leur credo, devenu le credo de Constance, et se vengèrent de leur défaite momentanée en exerçant de terribles représailles contre les homeousiens. Tout espoir de conciliation et d’union dans un avenir prochain disparaissait. L’évêque de Poitiers n’en contribua pas moins, pour sa part, à l’œuvre que d’autres devaient mener à bonne fin. Deux ans plus tard, au concile d’Alexandrie, saint Athanase reprendra l’entreprise dans de meilleures conditions ; puis les grands docteurs cappadociens viendront assurer le triomphe de l’orthodoxie. Leur glorieux chef, saint Basile de Césarée, se rattache par ses antécédents à Basile d’Ancyre, qu’il accompagna même, comme diacre, au concile de Constantinople de 360. Avant de mourir, Hilaire aura la joie de voir la plupart des évêques homeousiens qu’il

avait connus à Séleucie se rallier, à l’exemple de saint Cyrille de Jérusalem, au credo nicéen. Voir t. i, col. 1835 sq., 1840. D’ailleurs, quittant l’Orient, il n’abandonna pas l’œuvre qu’il avait tant à cœur : il allait seulement la continuer sur un autre théâtre.

Retour en Gaule et dernières années.

Le saint

évêque revint par la voie de mer ; il passa par l’Italie et notamment par Rome. Sulpice Sévère, Vita B. Martini, 6-7, P. L., t. xx, col. 164. Il dut voir le pape Libère, rentré dans cette ville depuis deux années, mais tout détail manque ; on peut raisonnablement conjecturer qu’il y eut échange de vues au sujet de la campagne antiarienne à mener en Occident. Enfin le grand exilé reparut dans sa patrie après quatre années d’absence, probablement avant la fin de 360, au plus tard au début de 361. Quel accueil il reçut, on peut en juger par les termes hyperboliques dont saint Jérôme s’est servi : Tune Hilarium deprœlio rcverlenlem Galliarum ecclesia complexa est. Adversus laciferianos, 19, P. L., t. xxiii, col. 173. Cf. Fortunat, Vita, ii, P. L., t. ix, col. 191.

La situation politique était notablement modifiée, j depuis que les troupes cantonnées à Paris s’étaient révoltées et avaient, en mai 360, proclamé Julien empereur. Hilaire n’avait plus à craindre l’intervention de Constance ; il se mit immédiatement à l’œuvre, avec autant de décision que de modération, afin de confirmer dans leurs sentiments les évêques restés fidèles et de ramener dans le droit chemin de l’orthodoxie ceux qui, par timidité ou par ignorance, avaient faibli et souscrit à des formules erronées ou du moins compromettantes, comme celle de Rimini. Sous son impulsion, des synodes provinciaux se réunirent de divers côtés, et même un concile national à Paris. Ceux qui rapportent ce dernier à l’année 360, par exemple, dom Coustant, Vita, 67-68, P. L., t. ix, col. 156 sq., supposent qu’Hilaire n’y assista pas en personne, bien qu’il ait été, moralement parlant, l’àme de l’assemblée ; mais la plupart des historiens placent le concile de Paris en 361 (Baronius, en 362) et tiennent que l’évêque de Poitiers s’y trouva. Tillemont, Mémoires, t. vii, p. 755, note xv. Un document nous est parvenu, où sa doctrine et parfois même son style se révèlent : c’est la lettre synodale du concile aux évêques orientaux, en réponse à une lettre qu’Hilaire avait reçue de ceux-ci depuis son retour en Gaule. Fragm. hist., xi, P. L., t. x, col. 710. La déposition de Saturnin d’Arles et de Paterne de Périgueux consacra la défaite de l’arianisme ; ce qui explique cette phrase de Sulpice Sévère, ii, 45, col. 155 : « Tout le monde reconnaît que notre Gaule est redevable au seul Hilaire du bonheur qu’elle eut d’être délivrée du crime de l’hérésie. » Bientôt, la mort de l’empereur Constance, survenue le 3 novembre 361, porta également un coup décisif à la suprématie homéenne en Orient. Les évêques exilés rentrèrent dans leurs diocèses, et, dès l’année suivante, saint Athanase réunit dans sa ville épiscopale le célèbre « concile des confesseurs » , où fut adoptée la même politique religieuse de conciliation et d’apaisement que l’évêque de Poitiers venait d’inaugurer en Occident. Voir t. i, col. 1834. Chose vraiment providentielle et féconde en heureux résultats que cet accord à distance des deux grands champions de la foi nicéenne au ive siècle. A la lutte contre l’arianisme se joignit alors la lutte contre le paganisme sous Julien l’Apostat. Les violences exercées en Gaule par Dioscore, vicaire du préfet Salluste, déterminèrent LIilaire à publier, en 361 ou 362, un mémoire signalé par saint Jérôme : Ad prsefectum Salluslium sive contra Dioscorum. D’ailleurs, Julien étant mort le 26 juin 363, la controverse n’eut pas de suite. Beaucoup plus importante fut la cam pagne apostolique du docteur gaulois en Italie. Peut-