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ses collègues dans l’enseignement. Cf. Janssen, Histoire du peuple allemand, 1. I, c. iv. Il rentra à la maison de Sorbonne en 1466, mais son départ de Bàle ne lui fit point perdre l’estime des savants et la confiance des citoyens qu’il s’était acquises. Aussi, quoique absent, il fut nommé notaire, tabellion public et juge ordinaire de la ville, 14 octobre 1466. C’est probablement à cette époque qu’il reçut le bonnet de docteur à Paris et y enseigna la théologie. Ses collègues le nommèrent en 1467 préteur de la Sorbonne, en 1469 recteur et en 1470 de nouveau préteur. La date de 1469 et le nom de Jean lleynlin font partie de l’histoire de l’imprimerie en général, de l’histoire de la ville de Paris et aussi, en quelque sorte, de l’histoire littéraire de France. En effet c’est Heynlin, alors recteur de Sorbonne, qui fit venir d’Allemagne les trois ouvriers typographes Ulrich Gering, Martin Krantz et Michel Freiburger, les établit dans cette maison et se chargea de corriger lui-même les épreuves de leurs produits. Son collègue Guillaume Fichet, à qui on a voulu faire, à tort, l’honneur de l’établissement de la première imprimerie à Paris et en France, a réfuté lui-même cette erreur par ces paroles imprimées dans une lettre à Heynlin placée en tête du premier ouvrage : Gasparini Pergamensis Epistolarum opus, sorti de l’atelier de la Sorbonne : a luis quoque Gcrmanis impressoribus… quos…e tua Germania librarios ascivisli. En 1472, ou environ, Heynlin alla enseigner la philosophie à Leipzig, et son départ occasionna la sortie de la Sorbonne des ouvriers imprimeurs, qui s’établirent rue SaintJacques, Au soleil d’or (1473). Il n’entre pas dans notre cadre de spécifier les ouvrages imprimés en la maison de Sorbonne, mais il importe de dire que Heynlin avait gardé un exemplaire de chaque ouvrage, qu’il les donna ensuite avec le reste de sa très riche bibliothèque à la chartreuse de Bàle, où ils restèrent jusqu’à la suppression de ce monastère. Aujourd’hui ils sont conservés à la bibliothèque de l’université bâloise. Heynlin avait vraiment reçu de Dieu le don de la parole, qui, joint à une mémoire très tenace et à sa profonde doctrine, lui fit faire beaucoup de bien dans le peuple chrétien. Il connaissait par cœur à peu près toute l’Écriture sainte et il possédait une vaste connaissance des œuvres des Pères. Aussi sa renommée comme prédicateur eut bientôt franchi les frontières d’Allemagne et de France.

Il prêcha à Bàle pendant quatre années consécutives (1474-1478) et autant de temps à Baden (1480-1484) ; de 1476-1480, on l’invita à prêcher plusieurs fois à Berne, à Tubingue, à Bàle et à Baden. Il reprit l’enseignement de la philosophie à Tubingue, en 1477, et l’abandonna définitivement trois années après. En 1484, il fut nommé recteur de l’église collégiale de Baden-Baden et se lia d’amitié avec le chanoine Jean de Hochberg, chancelier et protonotaire des princes de Baden, qui, à son exemple, se fit chartreux à Bàle (1487) et mourut prieur de la chartreuse de Strasbourg (1501). L’évêque de Bàle offrit à J. Heynlin un canonicat dans son chapitre et l’emploi d’écolâtre, et celui-ci accepta et vint se fixer dans cette ville, où il ne cessa jamais de prêcher au peuple. Mais après avoir tant travaillé au salut des âmes dans l’enseignement et dans le ministère de la prédication, Heynlin voulut imiter saint Bruno, qui avait aussi été professeur, écolâtre et chanoine. Il se décida donc à quitter le monde et la vie active, et le 15 août 1487, après avoir prêché dans la cathédrale de Bàle, il se retira à la chartreuse qui était près de cette ville. L’ordre apprécia toute la valeur du sujet qui venait d’entrer dans son sein, et lui accorda le privilège de faire les vœux après trois mois de séjour dans le monastère. J. Heynlin fit profession le 17 novembre 1487, il donna à son couvent une bonne partie de ses biens et sa bibliothèque, composée de 233 volumes reliés et de 50 brochés. Dans sa cellule, Heynlin

ne renonça pas à l’étude, ni aux préoccupations littéraires, en coopérant à la publication des bons livres. Il pressa beaucoup son ami Jean Trithème, abbé de Spanheim, de publier les deux grandes ouvrages : De scriptoribas ecclesiasticis et le Catalogue des hommes illustres d’Allemagne. Le premier de ces livres fut imprimé à Bàle en 1494, avec une lettre préliminaire intitulée : Docto ac præstanti viro domino Joanni de Amerbach in artibus liberalibus Parisiensi magistro ; frater Johannes de Lapide, monachus ordinis carthusiensis, sacrarum lïtterarttm humilis et indignus ejusdem studii professor, plurimam in Domino salutem optât, etc. Ex Carlhusia Basileæ V calend. septembris 1494. Cf. Hain, Repertorium, n. 15613. Jean Amerbach profita du voisinage de son ancien maître pour l’engager à s’intéresser aux éditions patristiques qu’il voulait imprimer. Heynlin consentit à revoir ces œuvres autant que l’observance claustrale le lui permettait. C’est ainsi que le célèbre imprimeur put faire paraître en 1489 le Psalmorum explanatio de saint Augustin ; en 1490, le De civitate Dei.Dc Trinitate, De animæ quanlilate, in-fol. ; en 1491, le commentaire de Cassiodore sur les Psaumes ; en 1492, le Consolatorium theologicum de Jean de Dombach et les œuvres de saint Ambroise, en 3 tomes in-fol., cf. Hain, op. cit., n. 896 ; en 1493, les lettres de saint Augustin, in-fol., le De compunctione cordis, ainsi que plusieurs autres opuscules de saint Jean Chrysostome. Cf. Hain, op. cit., n. 5044-5047, 2088. L’édition des œuvres complètes de saint Augustin publiée aussi par Amerbach, en 1506, en 9 in-fol., renferme les traités revus et corrigés par J. Heynlin. Le continuateur de la Chronique de la chartreuse de Bàle, dom Georges Zimmermann, entré au noviciat treize ans après la mort de Heynlin, assure que celui-ci coopéra également à l’édition de la Bible et à la publication des œuvres de saint Grégoire le Grand et de saint Jérôme faites aussi à Bàle par Jean Amerbach. C’est dans ces occupations avantageuses à l’Église et à la science que dom Jean Heynlin termina pieusement sa vie, le 12 mars 1496.

Ses commentaires sur tous les livres d’Aristote, sur la logique de Porphyre et les explications sur les livres des principes de Gilbert de la Porrée furent publiés par Jean de Amerbach, à Bàle, in-fol., s. d., certainement avant la mort de Heynlin, cf. Hain, n. 9919 et 13300, puisque Sébastien Brant lui adressa une poésie : De logica per eum explanata. Le commentaire sur les quatre livres De amina d’Aristote se trouve manuscrit à la bibliothèque de l’université de Bàle, X, II, 20, F. VIII, 9, F. VII, II ; Expositio prologorum biblicorum Parisiis habita ; Forma tractandi très priores libros Sententiarum ; Quæstiones Sorbonicse sub (Jo. de Lapide) et ab eodem disputâtes, maxime de peenitentia ; Ejusdem prœ/ationes initio librorum aut disputationum : recueil ms. in-4° conservé dans la susdite bibliothèque, A. VII. 13 ; cinq volumes de Sermons, mss in-4°, sont aussi à la bibliothèque de Bàle : A. VII, 8-12 ; Epislola ad Jo. Hochberg, Ecclesise Badensis canlorem, de qualitate sacerdotis, ms., ibid., A. V. 26 ; Quæstiones theologiæ et expectatoriæ variée sub et ab eodem doclore Parisiis disputatee, etc., ms. in-fol., ibid., A. VI, 12 ; Oraliones duee, una in promolione doctorum théologies, altéra in promotione magistrorum habita, ms. in-4°, ibid., F. IX, 5 ; Sermones de conceptione béates Maries, mss à la bibliothèque de la reine Christine de Suède, au Vatican, n. 82. Cf. Migne, Dictionnaire des manuscrits, t. ii, col. 1225. Dom Jean Heynlin a écrit, selon Trithème, De conceptione immaculatee Virginis, mais on ne sait pas au juste quel nom donner à ce travail. Le R. P. Baglioni dit que c’est un livre. Cf. Dilucidazione cronol. dell’imm. concezione, Florence, 1852, p. 264, n. 31. Il est plus probable qu’il s’agit des Sermons indiqués plus haut et de cette Præmonitio fratris Joannis de Lapide cartusiensis… circa sermones de conceptione gloriosse