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HÉRÉSIE. HÉRÉTIQUE


quement, le baptême reçu devient la seule condition exigible dans le sujet, pour que le péché d’infidélité devienne spécifiquement un péché d’hérésie.

2. Première conclusion relative aux catéchumènes. — Les catéchumènes ne peuvent commettre le péché d’hérésie. L’hérétique e>t b tplisé. Codex juris canonici, can. 132"’, §2. « Bien que le baptèmene soit pas requis pour que quelqu’un se rende coupable devant Dieu d’infidélité, s’il refuse d’adhérer à la vérité révélée suffisamment proposée à son adhésion, cependant celui-là seul peut être dit rebelle à l’Église, qui est le sujet de l’Église, et l’Église ne peut juger et châtier un homme qui ne lui est pas encore soumis par le baptême » Wernz, Jus Decrclalium, Prato, 1913, t. vi, n. 284. Ainsi le catéchumène qui, avant d’avoir reçu le baptême, rejetterait la foi catholique, ne peut être dit hérétique et considéré comme tel, quant aux peines encourues. Cette doctrine repose sur le concile de Trente, sess. XIV, c. ii, affirmant que l’Église ne peut exercer de jugement à l’égard de celui qui n’est pas baptisé, Denzinger-Bannwart, n. 895 ; on la trouve esquissée chez quelques Pères, cf. S. Augustin, De civitate Dei, 1. XVIII, c. li, P. L., t. xli, col. 613 ; S. Grégoire le Grand, Moral., III, c. xix, xx ; l. XXIII, c. i, n. 3-4, P. L., t. lxxv, col. 617-618 ; t. lxxvi, col. 251-254. Voir S. Thomas, Sum. theoi, IIa-IIæ, q.xi, a. 2, et, sur cet article, , les commentateurs Cajetan et Pierre d’Aragon ; Ugolin, De censuris romano pontifici reservatis, Venise, 1609, part. II, ci, § 1 ; Sayrus, op. cit., 1. III, c. iv, n. 10, 11 ; Sanchez, op. cit., 1. II, c. vii, n. 34 ; Tolet, Summa, 1. IV, c. in ; De Lugo, De fide, disp. XX, n. 138 ; Schmalzgruber, Jus ecclesiast., tit. De hæresi, n. 9 Cf. Ballerini-Palmieri, loc. cit., n. 80 ; Wernz, loc. cit. Quelques théologiens et canonistes cependant, A. de Castro, De justa hæreticorum punitione, 1. I, c. i ; Del Bene, De ofjicio S. Inquisitionis contra hæresim, Lyon, 1680, c. i, dub. ii, petit, ii, n. 1, 2 ; Sanctarelli, Tractatus de hæresi, Rome, 1625, c. i, dub. ii, considèrent le catéchumène comme étant déjà sujet de l’Église et, par conséquent, comme capable d’hérésie. Suarez, fidèle à sa conception de la foi. forme essentielle de l’Église, voir Église, t. iv, col. 2161, admet que les catéchumènes appartiennent déjà à l’Église par la foi et peuvent être hérétiques au vrai sens du mot ; mais il apporte à sa thèse une restriction importante : leur hérésie n’existe qu’au for interne et n’est pas punissable par l’Église. De fide, disp. IX, sect. i, n. 18 sq. C’est par cette restriction que Suarez se sépare d’A. de Castro et des autres : il cite en sa faveur Bafiez, In IJan> 77*, q. x, a. 5, ad 3 UI " ; q. xi, a. 2 ; Azor, Institutiones morales, 1. VIII, c. ix, q. m ; Farinacci, De hæresi, q. clxxviii, n. 131-135.

3. Deuxième conclusion relative à ceux qu’on croit, mais à tort, baptisés. — Ceux qui n’ont pas reçu en réalité le baptême, ou dont le baptême a été invalide, théoriquement, ne peuvent devenir hérétiques s’ils renient la foi catholique : ils deviennent infidèles. Cette conclusion s’impose dans l’opinion de ceux qui leur refusent la qualité de membres de l’Église. Bellarmin, Controvcrsiæ, !. III, c. x ; Wilmers, De Christi Ecclesia, n. 393 ; Palmieri, De romano pontip.ee, Proleg., § 2, n. 4 ; Billot, De Ecclesia Christi, q. vii, th. x, § 2 ; Van Noort, De Ecclesia, n. 152. Pratiquement, il faut bien les admettre dans l’Église, puisqu’on les croit baptisés. Cf. Wilmers, loc. cit. ; Billot, loc. cit. Suarez, loc. cit., n. 7, 8, en appelle derechef, pour ce cas embarrassant, à la distinction du for interne et du for externe ; au for interne, ceux qu’on croit à tort baptisés peuvent être coupables d’hérésie, mais, au for externe, ils ne peuvent être poursuivis pour délit d’hérésie. Les inquisiteurs, voir Simanca, op. cit., tit. xxxi, n. 5, professent qu’en fait, dans le cas de doute, il y a présomption en faveur de l’existence ou de la validité du baptême jusqu’à

preuve évidente du contraire, et que l’Église a le droit, au for externe, de punir les « hérétiques » de cette espèce. Cf. Caréna, Tractatus de ofjicio SS. Inquisitionis, Lyon, 1669, n. 36-40 ; Dandini, De suspectis de hæresi, Rome, 1703, prælim. xviii, n. 10 ; Bordoni, Sacrum tribunal judicum in causis sanctæ fidei contra hæreticos et de hæresi suspectos, Rome, 1648, n. 17-19 ; Masini, Sacra arsenale ovvero prallica dell’offtcio délia sanla Inquisizione, Bologne, 1665, part. X, p. 372. M. Garzend, op. cit., p. 120, a vu dans cette attitude pratique des inquisiteurs une nouvelle preuve en faveur de sa thèse. Il faut cependant se rappeler qu’il s’agit, dans le point de vue des inquisiteurs, non de doctrines à condamner, mais de personnes à poursuivre et à juger et que, dans chaque cas individuel où le doute peut exister, on doit faire appel à la présomption du fait pour appliquer le droit. L’Église agit encore ainsi de nos jours dans ses dispositions canoniques relatives au mariage des hérétiques. Voir Wernz, Jus Decrelalium, t. iv, n. 507, 508, notes 28-32. Quant à Suarez qui prétend établir la vérité spéculative de son opinion sur le fait que certains canons des anciens conciles et plusieurs Pères de l’Église donnent le qualificatif d’hérétiques à toute une catégorie de personnes qu’on était obligé de rebaptiser, leur premier baptême étant invalide, voir les textes à l’art. Baptême des hérétiques, t. H, col. 352, nous pensons qu’il tombe dans la même confusion que M. Garzend. Le simple fait d’un baptême que ces sectes religieuses tenaient, à tort évidemment, pour valable et considéraient comme une véritable profession de foi au Christ, suffisait pour que pratiquement l’Église pût leur appliquer la dénomination d’hérétiques. Les Pères et les conciles, par cette appellation de fait, n’ont certes pas entendu trancher la question spéculative de la notion d’hérésie.

Effets.

 1. Par rapport à l’âme de l’Église. —

a) Effet commun à tous les péchés mortels — C’est la perte de la vie de la grâce. Voir Péché. — b) Effet propre de l’hérésie par rapport à la vertu infuse de foi. — a. Destruction de la vertu infuse de foi par l’hérésie formelle. — Cet effet sera étudié à l’art. Infidélité, parce que toute infidélité, dont l’hérésie n’est qu’une espèce, détruit la vertu de foi. On y exposera que c’est là une vérité théologiquement certaine, reposant sur l’autorité de l’Écriture, I Joa., ii, 19 ; I Tim., i, 18-20 ; vi, 3-4 ; Tit., iii, 11, 12, du concile de Trente, sess. VI, c. xv, des Pères et des théologiens. Pour s’en tenir ici strictement à ce qui concerne l’hérésie, notons l’opinion singulière de Durand de Saint-Pourçain, In IV Sent., 1. III, dist. XXIII, q. ix. D’après cet auteur, l’hérétique conserverait en partie Yhabitus de la foi, s’il retient comme objet de foi au moins quelques articles. Les théologiens enseignent, au contraire, unanimement, que, là où l’objet formel de la vertu est détruit, la vertu ne peut subsister ; or, en repoussant le magistère de l’Église, c’est en réalité l’objet formel de la foi, l’autorité de Dieu révélateur manifestée par ce magistère, que rejette le chrétien baptisé : Objectum formate fidei sive habitualis sive actualis, dit Billuart, est prima veritas in dicendo ulmanifesiata per Ecclesiam ; atqui qui negat perlinaciter unum arliculum fidei, non crédit alios quos tenel, propler primam veritalem ut manifeslaiam per Ecclesiam ; alioquin et hune quem negat crederel, cum sit etiam sicut alii revelalus a prima veritate et propositus ut talis ab Ecclesia, sed hune rejicit et illos tenet ex proprio judicio et propria electione. Cursus theologiæ, tr. De fide, diss. IV, a. 2. C’est la doctrine de saint Thomas, Sum. theoi, II : > II æ, q. v, a. 3. Cf. Suarez, De fide, disp. VII, sect. iv, n. 1-3 ; Gonet, Clypeus theologiæ thomislicæ, tr. X, De virtutibus theologicis, disp. VIII, a. 2, § 1, n. 30 ; Billot, De virtutibus infusis, th. xxi et Prolegomenon, ii, § 2, n. 5 ; iv. A l’objection que l’hérétique peut encore faire des actes